Le replay menacé par l’AVOD

TF1 attendait cela depuis longtemps, trop longtemps. Face à la déferlante des séries sur les plateformes, toutes les chaînes sont à l’affût de la série qui fera exploser les compteurs : unitaires, séries policières ou sujets de société, mini-séries ou saisons complètes. Grâce à leurs applications, les chaînes veulent aussi augmenter l’expérience utilisateur pour mieux fidéliser leurs téléspectateurs : preview payante, replay étendu, replay avec ou sans pub, TVOD, EST et même encore coffrets DVD et Blu-ray. Et dans cette chronologie d’exploitation, le replay occupe désormais une place stratégique : pour les audiences, pour le confort de visionnage des téléspectateurs sur tous les terminaux à toute heure et partout et bien entendu pour les recettes publicitaires.

9,1 milliards de vidéos en replay

Avec sa série HPI, TF1 a réussi le grand chelem. Critique positive, audiences qui dépassent 10 millions de téléspectateurs et un replay qui bat tous les records en dépassant 2 millions de téléspectateurs supplémentaires.

En quelques années, le replay est donc devenu le complément d’audience indispensable des programmes TV. Les chiffres publiés par le CNC en témoignent : en 2020, 9,1 milliards de vidéos ont été visionnées sur les services de Télévision de Rattrapage contre 9,3 milliards en 2019, soit une baisse de 2,3 % sur un an. En cinq ans, la consommation de télévision de rattrapage a été multipliée par 1,8. En 2020, 25,3 millions de vidéos sont consommées en moyenne chaque jour en télévision de rattrapage (25,5 millions en 2019). La consommation de télévision en ligne (qui inclut la TVR ainsi que les bonus et la consommation des chaînes en direct sur les autres supports que la télévision) est en progression sur tous les supports, excepté sur la télévision (-3,9 % à 3,2 milliards de vidéos vues). La plus forte croissance est enregistrée sur l’ordinateur (+4,0 %). En 2020, 1,8 milliard de vidéos sont visionnées sur un écran de télévision (-3,9 %) et 5,4 milliards sur un appareil mobile (+1,4 %) dont 4,3 milliards sur un téléphone mobile (+1,4 %) et 1,2 milliard sur une tablette (+1,6%). 

En 2020, pour la cinquième année consécutive, le mobile confirme son statut de premier support de consommation de la télévision en ligne.

Des recettes publicitaires qui ne décollent pas

Mais à bien y regarder, le bilan de la télévision de rattrapage publié par le CNC comporte une information pour le moins surprenante : le chiffre d’affaires du replay ne décolle pas, pire il a reculé de 7,4% en 2020 à 125 millions d’euros. 125 millions d’euros pour 9,1 milliards de vidéos vues. Soit 14 euros pour 1000 vidéos vues. Dans le même temps, on assiste à l’émergence d’une nouvelle forme de replay, pas forcément proposée par des chaînes de télévision, c’est l’AVOD, c’est-à-dire la vidéo à la demande gratuite avec de la publicité. L’AVOD se décline en deux formats : soit sous forme de fausse chaîne TV linéaire, souvent appelée FAST (Free Ad-supported Streaming Television) soit sous forme de site de vidéo à la demande gratuit. En France, plusieurs opérateurs occupent le marché (RakutenTV, Pluto TV, MolotovTV avec Mango, mais aussi Samsung avec son offre Samsung TV+) et d’autres devraient arriver prochainement. Aux Etats-Unis, le marché est en pleine ébullition et les offres sont de plus en plus nombreuses. Le cabinet britannique Digital TV Research estime que les dépenses publicitaires grimperont de 144% entre 2020 et 2026 pour atteindre un chiffre d’affaires de 66 milliards de dollars dans 138 pays.

La déferlante AVOD

Alors, est-ce que le replay à la française va pouvoir résister à la déferlante de l’AVOD ? La BVOD (broadcast VOD, comme l’appellent les anglo-saxons) aura-t-elle la capacité à endiguer l’arrivée d’acteurs internationaux, studios ou nouveaux acteurs, qui vont proposer des dizaines de chaînes FAST et de services AVOD ? Car le marché publicitaire n’est pas extensible et même si le CPM du replay tricolore semble être assez proche de celui des premiers services de AVOD (autour de 14 euros du mille), la bataille va se durcir. L’un des points clés sera la capacité des acteurs locaux à intégrer les technologies de ciblage et de personnalisation, la fameuse publicité adressée. Dans ce contexte, le rapprochement de TF1 et de M6 pourrait faciliter la consolidation d’une offre AVOD qui truste une bonne partie des meilleures audiences du PAF.

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