Le « Qatargate » fait dérailler la relance des ambitions de l’Union européenne dans le golfe Persique – Le Monde

Le Parlement européen, à Bruxelles, le 22 juin 2022.

LETTRE DE BRUXELLES

Officiellement, la stratégie développée par l’Union européenne (UE) pour développer son partenariat avec les pays du golfe Persique « reste une politique valable », assure Peter Stano, l’un des porte-parole du service européen d’action extérieure… Après deux ans de lente maturation pour aligner les Vingt-Sept sur cette stratégie, la révélation, vendredi 9 décembre, d’une affaire de corruption impliquant un pays de la région qui n’est autre que le Qatar, ainsi qu’au Maghreb, le Maroc, et l’arrestation d’une demi-douzaine de protagonistes pour « corruption, blanchiment d’argent et participation à une organisation criminelle », dont la Grecque Eva Kaili, jusqu’à début décembre vice-présidente du Parlement européen, met Bruxelles dans l’embarras.

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Depuis l’éclatement de l’affaire, les autorités de l’UE ont fait bien attention de ne pas viser l’émirat dans leurs discours. Ni le président du Conseil européen, Charles Michel, ni la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, les grandes figures de l’UE, n’ont évoqué nommément l’émirat gazier depuis l’éclatement de l’affaire. La seule mention de Mme von der Leyen du Qatar, lundi 12 décembre, était pour évoquer les multiples coopérations en cours avec l’Europe. « Le scandale n’est pas terminé et fait toujours l’objet d’une enquête. Jusqu’à présent, aucun pays n’a été officiellement spécifié », précise-t-on à la Commission.

Quant à Josep Borrell, le haut représentant de l’UE, en voyage en Jordanie, il a rencontré, mardi 20 décembre, le ministre des affaires étrangères qatari. Dans un tweet, il a assuré avoir évoqué avec son homologue « des allégations contre certains membres et membres du personnel du Parlement européen. Nous avons convenu de la nécessité que les enquêtes en cours apportent une clarté totale », concluait-il.

Au Parlement européen, dans un discours enflammé contre la corruption, sa présidente Roberta Metsola s’est refusée, le 13 décembre, également à évoquer le pays… jusqu’à ce qu’elle annonce le renvoi en commission parlementaire d’une loi concernant la libéralisation des visas avec le Qatar et le Koweït. Et puis le vote d’une résolution, jeudi 15 décembre, privant d’accès à l’institution tout diplomate qatari ou de lobbyiste représentant les intérêts de l’émirat a levé officiellement le voile. C’est seulement après ce texte que Doha a réagi, vertement, contre cette mise en cause, évoquant un impact négatif sur les coopérations à venir.

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Coup d’arrêt

Pour l’UE, c’est un vrai coup d’arrêt dans la région. Cela détricote le patient travail pour réinvestir une zone du monde aujourd’hui très disputée, où la Chine est à l’offensive pour y établir son influence. Historiquement, les Vingt-Sept n’y avaient pas de relations structurées et unies. Si la France, l’Italie ou l’Allemagne y menaient leur propre stratégie, notamment d’achat d’hydrocarbures, l’Union européenne en tant que telle était absente.

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