Le patron de Boeing démissionne, usé par la crise du 737 MAX – Les Échos

La  crise du 737 MAX  a fini par avoir raison du patron de Boeing. Dix mois après l’interdiction de vol de l’appareil, le groupe a annoncé ce lundi la démission, à effet immédiat, de son directeur général, Dennis Muilenburg, aux commandes depuis 2015. L’actuel président du conseil d’administration, David Calhoun, deviendra PDG du groupe Boeing à compter du 13 janvier. L’intérim au poste de directeur général sera assuré par le directeur financier, Greg Smith.

« Le conseil d’administration a décidé qu’un changement de direction était nécessaire pour rétablir la confiance dans l’entreprise, tandis qu’elle s’efforce de rétablir les relations avec les régulateurs, les clients et toutes les autres parties prenantes », a déclaré Boeing dans un communiqué.

Déjà « rétrogradé » début octobre au poste de directeur général, Dennis Muilenburg n’a pas survécu à l’annonce de l’arrêt de la production du 737 MAX, la semaine dernière, qui signait l’échec de sa stratégie. Depuis l’interdiction de vol du 737 MAX en avril dernier, Dennis Muilenburg avait en effet toujours misé sur un retour rapide en vol de l’appareil, ce qui avait justifié la poursuite de la production. Auditionné à plusieurs reprises par les sénateurs américains en octobre dernier, Dennis Muilenburg avait toutefois peiné à convaincre de la sincérité du repentir affiché sur le tard par Boeing.

Une crise sans précédent

Les déclarations du directeur de l’aviation civile américaine,  Steve Dickson , renvoyant à 2020 toute décision sur la levée de l’interdiction de vol du 737 MAX, avait douché les espoirs de Boeing, précipitant le groupe dans la plus grave crise de son histoire. Selon JP Morgan, la crise du 737 MAX a coûté, jusqu’à présent, 2 milliards de dollars par mois à l’avionneur. Et malgré l’arrêt de la production, le groupe continuerait de « brûler » 1 milliard par mois. Or sa trésorerie, qui dépassait les 10 milliards avant la crise, a déjà fondu et sa dette pourrait atteindre 24 milliards de dollars en fin d’année, selon l’agence de notation Fitch Ratings.

Avec la démission de Dennis Muilenburg, le conseil d’administration espère probablement convaincre à la fois l’aviation civile américaine mais aussi les actionnaires et les créanciers du groupe de sa volonté de faire table rase des erreurs du passé. En octobre dernier, le limogeage du patron de la branche aviation commerciale,  Kevin McAllister , à la veille de la publication des résultats du troisième trimestre, avait déjà permis de limiter les dégâts sur le cours de Bourse. La démission de Dennis Muilenburg a suscité un bond du titre Boeing de 3,6 % à l’ouverture de la Bourse de Wall Street. Mais Boeing a désormais grillé sa dernière carte.

Les lourds défis du successeur

Reste à savoir si son successeur, David Calhoun, bénéficiera d’un délai de grâce suffisant pour attendre le feu vert de la FAA à un retour en vol des 737 MAX et restaurer l’image de marque de Boeing, passablement ternie tant auprès de ses clients compagnies aériennes qu’auprès du grand public. Bien qu’il siège au conseil d’administration de Boeing depuis bientôt dix ans et qu’il a occupé différentes fonctions chez GE, David Calhoun n’est pas une figure de l’aéronautique, ni même un pur produit de Boeing, comme son prédécesseur. Il dirigeait précédemment la société d’études de marché Nielsen.

Une accumulation de challenges

Or le futur PDG de Boeing va devoir faire face à une accumulation sans précédent de défis et de difficultés. David Calhoun devra non seulement gérer la sortie de crise du MAX, et notamment le retour en vol de quelque 800 appareils, mais il lui faudra aussi gérer la remontée de la production du 737, qui aurait dû monter à 57 appareils par mois fin 2019, ainsi que la mise en service du 777X, dont la date a déjà été reportée. Et ce, tout en pilotant au plus serré la trésorerie du groupe et l’évolution de ses coûts.

Fixer un nouveau cap

En supposant que ces deux principaux challenges se déroulent sans anicroche, David Calhoun devrait aussi redonner de la visibilité à la stratégie de Boeing dans l’aviation civile, en tranchant notamment la question du lancement d’un nouveau modèle « milieu de gamme », en projet depuis deux ans. A plus long terme, il lui reviendra également de répondre aux préoccupations environnementales, en engageant le groupe sur la piste d’un nouveau modèle à faible émission de CO2 pour succéder au 737 MAX. Une problématique qui nécessitera d’énormes investissements, pour Airbus comme pour Boeing. Mais dans le cas du patron de Boeing, il lui faudra convaincre ses actionnaires que la crise du 737 MAX est bel et bien achevée, avant de pouvoir les convaincre d’investir une bonne quinzaine de milliards de dollars dans le successeur du 737.

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