Le Covid, une fuite de laboratoire ? Ce que l’on sait vraiment après un an de spéculations – LCI

AUX ORIGINES – Longtemps écartée, car trop proche des thèses complotistes, la théorie selon laquelle le coronavirus aurait accidentellement fuité d’un laboratoire de Wuhan a récemment regagné en crédibilité. Retour sur un an de tâtonnements.

On a déjà trouvé un vaccin contre le coronavirus. Et nous sommes sur le point de reprendre “la vie d’avant”. Pourtant, on ne dispose toujours pas de la réponse à une question cruciale. Mais d’où vient le coronavirus ? Un article du Wall Street Journal a remis le sujet au cœur du débat. Publié ce dimanche 23 mail, il assure que des laborantins de Wuhan, foyer du covid-19, ont été hospitalisés en novembre 2019, peu avant la flambée de l’épidémie en Chine. Une révélation qui a relancé la théorie de la fuite d’un laboratoire. Longtemps écartée par le consensus scientifique, comment cette théorie d’abord considérée comme complotiste est-elle devenue crédible ?

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Un consensus scientifique dès mars 2020

Dès début 2020, un consensus émerge. Le coronavirus est d’origine animale. Très partagé, ce discours se base pourtant seulement sur trois textes… Qui comportent tous des limites. Le premier a été publié par les chercheurs de l’Institut de virologie de Wuhan (WIV), celui-là même qui est désormais au cœur des soupçons. Le 3 février, ils rapportent dans la revue Nature que le nouveau virus qui se propage dans le monde est dérivé d’une chauve-souris. Baptisé le RaTG13, son génome est identique à 96,2% à celui du covid-19. Cette piste devient alors la théorie privilégiée, corroborée ensuite par deux lettres écrites par des auteurs de renom. 

La première, publiée dans le Lancet, écarte définitivement la piste d’un virus sorti d’une éprouvette. Les 27 scientifiques à son origine disent s’unir pour “condamner fermement les théories du complot suggérant que le covid-19 n’est pas d’origine naturelle”. Le groupe conclut “à une écrasante majorité que ce coronavirus est originaire de la faune”. Seul argument de cette lettre : celui d’autorité. Bien qu’elle comporte un conflit d’intérêt. Rédigée par un certain Peter Daszak, il est le président d’EcoHealth Alliance, l’ONG qui a financé la recherche au laboratoire de Wuhan. 

La deuxième correspondance qui a servi de prétexte pour clore définitivement le débat est publiée le 17 mars dans Nature. Ses auteurs listent les arguments en faveur de la thèse de la zoonose – une infection qui se transmet des animaux à l’homme. Ils notent cependant avec prudence que “bien que les preuves montrent que SARSCoV-2 n’est pas un virus délibérément manipulé, il est actuellement impossible de prouver ou de réfuter les autres théories de son origine”. Une précaution rapidement oubliée par la sphère scientifique. Et médiatique.

Pourquoi une telle précipitation ?

Ce doute était légitime. Mais inaudible dans le contexte de l’époque. Régnait alors une  volonté de lutter contre les théories du complot sur l’origine du virus, parmi lesquelles la thèse d’une molécule créée par l’institut Pasteur, celle d’une arme biologique ou encore celle d’un virus issu du VIH. En voulant contrer ces fausses informations, chercheurs et médias ont enterré la piste du laboratoire simultanément. Les profils des défenseurs de cette thèse  ont achevé de la rendre peu crédible. 

Elle était notamment soutenue par Donald Trump aux États-Unis. Chacun laissant sous-entendre que la Chine aurait pu fabriquer un virus de manière intentionnelle. À noter qu’à l’époque, rien ne permettait de diffuser cette information. Ni preuve, ni élément tangible.

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L’administration de l’ancien locateur de la Maison blanche n’a ainsi jamais donné d’autres informations que de vagues renseignements… Souvent accompagnés d’une rhétorique anti-chinoise. Le meilleur exemple est celui du 30 avril 2020. Les renseignements nationaux américains déclarent avec fracas que, s’ils sont d’accord avec “le large consensus scientifique selon lequel le virus COVID-19 n’était pas d’origine humaine ou génétiquement modifié”, ils veulent “examiner rigoureusement des informations récentes afin de déterminer si l’épidémie (…) est le résultat d’un accident dans un laboratoire de Wuhan”. Des propos nuancés. Totalement déformés par Mike Pompeo, alors vice-président des États-Unis. Trois jours plus tard il lance en pleine interview : “Il existe d’énormes preuves que c’est là que tout a commencé. … N’oubliez pas que la Chine a une histoire d’infection dans le monde et qu’elle a une histoire de gestion de laboratoires non conformes aux normes.” 

De nouveaux éléménts

Depuis, de nouveaux éléments sont venus changer la donne. En premier lieu, les révélations du Times of London. Le 4 juillet, le quotidien britannique a indiqué qu’un virus identique à 96% au covid-19 avait été trouvé en 2012 dans une mine de Chine abandonnée et infestée de chauve-souris. Six hommes chargés de chasser les bêtes ont été atteints de pneumonie similaire à celle liée au coronavirus, dont trois en sont morts. Le virus en question avait alors été collecté puis stocké pour être étudié à l’Institut de virologie de Wuhan. Une mine à laquelle les chercheurs voudraient avoir accès, mais que les autorités chinoises gardent bien protégée.

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Autre élément récent qui interroge : la publication de trois thèses réalisées en Chine en 2014, 2017 et 2019. Relayées par Le Monde, elles montrent que Pékin aurait délibérément caché certains travaux conduits dans le laboratoire de Wuhan. Enfin, dernier élément en date cité en début de cet article : les révélations du Wall Street Journal, qui assure que trois scientifiques de l’institut de virologie de Wuhan seraient tombés malades au point d’être hospitalisés en novembre 2019. 

Des informations d’autant plus troublantes que face à ces aveux, les autorités chinoises nient en bloc. Tout en refusant l’accès à certaines données. Ce manque de transparence et les zones d’ombre autour du laboratoire de Wuhan poussent donc à envisager cette thèse longtemps écartée. Quant à la piste “naturelle”, elle reste la plus crédible. Mais les efforts pour découvrir cette source du virus sont restés vains. Le fameux “chaînon manquant”, qui aurait permis le passage du covid-19 de la chauve-souris à l’homme reste introuvable. 

Le mystère persiste donc. Seule une nouvelle enquête pourrait permettre de faire toute la lumière. C’est ce qu’ont demandé 18 scientifiques dans une lettre publiée dans Science. Ils résument parfaitement la situation. Les deux thèses actuelles – celle de la libération accidentelle d’un laboratoire et celle de la zoonose – “restent toutes les deux viables”.

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