L’Arcom enquête sur les moyens mis en oeuvre pour protéger la création en ligne

L'Arcom enquête sur les moyens mis en oeuvre pour protéger la création en ligne

L’application effective du droit d’auteur sur internet ne va pas de soi. Les titulaires de droits comme les plateformes qui diffusent les contenus protégés doivent faire preuve d’une vigilance toute particulière, et mettre en place des mesures très concrètes pour repérer les partages illicites des oeuvres.

Dans son rôle de contrôle, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) veut aller un cran au-dessus en matière de protection des contenus en ligne. A travers deux questionnaires diffusés respectivement aux plateformes et aux ayants droit, l’Arcom souhaite affiner ses connaissances sur les mesures techniques d’identification (MTI) adossées aux oeuvres numériques.

Cette enquête vise à déterminer quelles solutions technologiques sont déjà mises en place par les fournisseurs de services de partage de contenus en ligne, et identifier les manquements le cas échéant. L’Arcom veut aussi faire le point sur les accords conclus à date entre les plateformes et les titulaires de droits, et voir dans quelle mesure les ayants droit sont satisfaits des outils jusqu’à présent mis à leur disposition.

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Protéger les plus petits ayants droit

« L’envoi des questionnaires, c’est tout à fait nouveau. C’est la première fois que l’on évalue les MTI » déclare Laure Pécaut-Rivolier, membre du collège de l’Arcom et co-présidente du groupe de travail “Protection et diffusion de la création et des contenus sportifs sur internet”, à ZDNet.

Depuis l’an passé, à la suite de la transposition en droit français de l’article 17 de la directive de 2019 sur la protection du droit d’auteur et des droits voisins, l’Arcom est chargée d’évaluer le niveau d’efficacité des mesures de protection des oeuvres en ligne. Sur la base des informations recueilles au travers de ces questionnaires, l’Arcom est appelé à formuler des recommandations dans le futur sur l’efficacité des mesures de protection. Les trois critères regardés de près sont « la robustesse, la praticité et la finesse », résume Raphaël Berger, directeur de la création de l’Arcom.

« Nous savons que chaque fournisseur de service a sa technique. Pour nous, ce qui importe, c’est que les ayants droit de moindre importance  puissent avoir accès à la même protection que les plus “grands” » insiste Laure Pécaut-Rivolier.

Une multiplicité des technologies

Les plus grosses plateformes de diffusion de contenus audiovisuels et musicaux n’ont pas attendu la loi pour se doter d’outils d’identification efficaces, à commencer par YouTube et son système d’empreinte Content ID, qui reçoit des millions de requêtes de retrait de contenus chaque année en lien avec le droit d’auteur, ou encore Facebook et son outil Rights Manager.

Si les techniques d’empreinte (dite de “fingerprinting”) sont les plus répandues, leur installation nécessite « une certaine masse » pour être en capacité d’alimenter une base de référence suffisante, note Laure Pécaut-Rivolier.

Pauline Blassel, directrice générale adjointe de l’Arcom, rappelle que certains secteurs de la création entrent moins dans le champ de ces systèmes d’identification. « On observe que pour l’image et la photographie, il n’y a pas de technologie de reconnaissance d’empreinte, mais ce sont plutôt des marquages ou des métadonnées qui sont utilisées. Or, les métadonnées posent plusieurs problèmes, notamment parce qu’elles ne sont pas attachées à toutes les images mises en ligne, sans compter que certaines plateformes les effacent au moment du téléversement » indique-t-elle.

Au-delà du fingerprinting et des métadonnées, d’autres technologie existent également comme le watermarking (une sorte de “tatouage” numérique) ou encore le hachage. Face à cette multiplicité de technologies, c’est donc un véritable travail de fouille qui attend l’Arcom. D’autant que son spectre d’analyse est étendu : « Un certain nombre de plateformes, auxquelles on pense moins habituellement, sont concernées par l’article 17 », souligne Laure Pécaut-Rivolier. A commencer par TikTok et Telegram, entre autres, aussi visés par ce questionnaire.

Des questionnaires qui déboucheront sur des recommandations

Si l’Arcom n’en est donc qu’aux prémices de son action de supervision, l’autorité ne part pas d’une page blanche : des travaux de pré-évaluation ont déjà été entamés par l’ex-Hadopi et le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) conjointement. Aux termes de son examen, l’Arcom formulera des recommandations pour améliorer les dispositifs. « La loi ne prévoit pas de pouvoir de sanction pour le régulateur ;  notre rôle est de prendre la mesure de ce qui est mis en place et de faire des recommandations si le niveau d’efficacité des mesures n’est pas satisfaisant. C’est un chantier considérable et l’enjeu est fort » assure Laure Pécaut-Rivolier.

Toutefois, Laure Pécaut-Rivolier admet que la loi autorise une certaine souplesse dans l’interprétation sur le niveau de responsabilité des uns et des autres. « La responsabilité des fournisseurs, c’est de faire en sorte qu’il n’y ait pas de contrefaçon. Quant aux ayants droit, ils doivent mettre en place des outils de sorte à ce que leurs droits soient respectés, d’où l’importance des conventions, surtout quand chaque fournisseur demande des choses différentes » constate-t-elle.

A terme, la solution serait peut-être « d’adapter le niveau d’exigence imposé aux plateformes en fonction de leurs moyens » ajoute-t-elle.

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