L’actrice italienne Gina Lollobrigida est morte – Le Monde

Gina Lollobrigida dans « La proie des vautours », en 1959.

Née le 4 juillet 1927 à Subiaco (Italie, Latium), Luigia Lollobrigida, morte le 16 janvier, à l’âge de 95 ans, fut remarquée par le milieu cinématographique dans un roman-photo où elle posait sous le pseudonyme de Diana Loris, alors qu’elle poursuivait des études aux Beaux-Arts et participait à des concours de beauté (en 1947, elle termine deuxième au concours de Miss Rome et troisième à celui de Miss Italie derrière Lucia Bose et Gianna Maria Canale).

Durant des années, sa présence à l’écran, dans des rôles secondaires, n’est dictée que par ses atouts physiques, sa beauté voluptueuse. Elle partage avec Silvana Mangano l’honneur de susciter les fantasmes érotiques des spectateurs italiens de l’après-guerre. Il se dit dans la Péninsule que Gina est « la meilleure chose qui soit arrivée depuis l’invention des spaghettis ».

Regain de carrière

En 1952, dans un film à sketches d’Alessandro Blasetti, Heureuse époque, elle incarne une séduisante criminelle qui, le jour de son procès, use d’un argument déloyal (aux yeux de la justice) pour impressionner ses juges : une robe s’ouvrant en losange sous le col, comme si le tissu avait éclaté, dévoilant un corset blanc délicieusement rempli. Mais tout se régule. En décembre 1953, on pouvait lire ceci dans les Cahiers du cinéma (n° 30) : « La charmante Gina Lollobrigida a été lancée par la gorge. Une gorge généreuse en vérité et faite d’une matière à la fois marmoréenne et transparente qui fascine le regard et énerve la main. Ceux qui ont vu La Marchande d’amour”, de Mario Soldati, adapté de La Provinciale”, d’Alberto Moravia, savent maintenant que Gina ne dispose pas seulement d’une gorge, d’un nombril et d’une très belle chute de reins, mais aussi d’un très sûr et très sensible talent de comédienne. »

Howard Hughes la séquestre plusieurs mois dans une chambre de l’Hôtel Town House sur Wilshire Boulevard, à Los Angeles

Entre-temps, elle a épousé un médecin, Milko Skofic, qui est devenu son agent. Et a accédé aux premiers rôles, dans Fanfan la Tulipe, de Christian Jaque (1952) et Les Belles de nuit, de René Clair (1952), tous deux aux côtés de Gérard Philipe, regain de carrière qu’elle poursuit dans La Belle Romaine, de Luigi Zampa (rédemption d’une prostituée sous Mussolini, 1954), Notre-Dame de Paris, de Jean Delannoy (Esmeralda, femme fatale en robe rouge, 1956), Pain, amour et fantaisie puis Pain, amour et jalousie, de Luigi Comencini (piquante bersaglière, en 1953 et 1954, aux côtés de Vittorio de Sica), Le Grand Jeu, de Robert Siodmak (un double rôle de maîtresse et de prostituée dans un bordel tenu par Arletty, 1954).

Gina Lollobrigida dans « Notre-Dame de Paris », en 1956.

Survient l’épisode hollywoodien. Amateur compulsif de bustes canons, le producteur Howard Hughes la voit sur une photo en bikini, envoie un émissaire lui faire signer un contrat. Et la séquestre plusieurs mois dans une chambre de l’Hôtel Town House sur Wilshire Boulevard, à Los Angeles. Un gorille posté devant sa porte a ordre de l’empêcher de sortir. Parfois, Hughes survient à 2 heures du matin, l’emmène au restaurant de l’hôtel où il a fait venir un orchestre, et l’entraîne sur la piste de danse. Elle réussit à plier bagage, mais aligne quelques films américains.

Jalouse de Sophia Loren

On la voit avec Humphrey Bogart (Plus fort que le diable, de John Huston, 1953), avec Burt Lancaster (Trapèze, de Carol Reed, 1956), avec Yul Brynner (Salomon et la reine de Saba, de King Vidor, péplum kitsch pour une espionne envoyée ensorceler le roi d’Israël, 1959), avec Rock Hudson (Le Rendez-vous de septembre, de Robert Mulligan, 1961).

Contrariée par l’essor de Sophia Loren, Gina Lollobrigida voit sa carrière marquer le pas. « Elle joue les paysannes, moi les dames », lâche-t-elle, mauvaise joueuse. Un nouveau film à sketches lui vaut une condamnation à deux mois de prison en 1966, heureusement amnistiée, pour attentat à la pudeur dans Les Poupées, à cause de tenues osées. En 1968, elle fait un bref numéro d’autodérision dans La Marine en folie, de Franck Tashlin, pour se moquer de son image de brune volcanique. Dans Ce merveilleux automne, de Mauro Bolognini (1969) et Roi, dame, valet, de Jerzy Skolimovski (1972), elle campe joliment des tantes matures ensorcelant leurs jeunes neveux. Puis fait une brève apparition dans Les Aventures de Pinocchio, serie télévisée de Luigi Comencini : elle y interprète une revêche fée Turquoise. Puis se consacre à sa passion pour la photographie.

Gina Lollobrigida dans « Bad Man's River », en 1972.

Gina Lollobrigida aura interprété plusieurs fois son propre rôle, dans Boum sur Paris, de Maurice de Canonge (1954), et dans Box-Office 3D, d’Ezio Greggio (2011), le premier film italien tourné en 3D. Elle incarne la fée du cinéma dans Les Cent et Une Nuits, d’Agnès Varda (1995), perruque rose et pulsions très star system. Nommée ambassadrice de bonne volonté en 1999 par l’Organisation des nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, elle s’était présentée la même année aux élections européennes en numéro 2 de la liste d’Antonio Di Pietro, l’ex-magistrat anticorruption, sans être élue.

Gina Lollobrigida en quelques dates

4 juillet 1927 Naissance à Subiaco (Italie)

1952 « Heureuse époque »

1952 « Fanfan la Tulipe »

1956 « Notre-Dame de Paris »

1969 « Ce merveilleux automne »

1995 « Les Cent et Une Nuits »

2023 Mort à l’âge de 95 ans.

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