La COP26 joue des prolongations laborieuses, alors que l’Inde défend le droit à « un usage responsable » des énergies fossiles – Le Monde

Faute d’accord, les négociations de la COP26 ont été prolongées, samedi 13 novembre, à Glasgow, en Ecosse.

La 26e Conférence des parties (COP) s’est engagée, samedi 13 novembre, dans un final à suspense. Un nouveau projet de déclaration de clôture de la conférence mondiale sur le climat, publié par la présidence, britannique, n’a pas débouché sur les avancées espérées. Une séance plénière à la mi-journée s’annonçait houleuse, l’espoir d’un dénouement dans l’après-midi reculant sans cesse.

Le président de la COP26, Alok Sharma, s’est exprimé après une heure de discussions entre petits groupes de délégués venus du monde entier, alors qu’il avait tenté en vain de faire commencer la séance. Il a appelé les délégués à accepter le projet de déclaration diffusé samedi, jugeant qu’il est « équilibré » et « fait réellement avancer les choses pour tout le monde ».

« Tous les aspects n’en seront pas accueillis favorablement par tous », a concédé M. Sharma au sujet du texte. « Mon intention est que nous mettions un terme à cette COP cet après-midi », a-t-il affirmé d’un ton ferme, alors que cette 26e conférence internationale sur le climat organisée à Glasgow, en Ecosse, devait officiellement prendre fin vendredi.

« C’est le moment de vérité pour notre planète, et c’est aussi le moment de vérité pour nos enfants et nos petits enfants », a-t-il déclaré plus tard, admettant que le monde n’avait pas tenu les promesses faites lors de l’adoption de l’accord de Paris en 2015, mais que le projet de déclaration finale de la COP26 « reconnaissait ce fait et appelait à y répondre ». « Nous sommes au moment des négociations où votre délégation peut se demander si vous pouvez utiliser ce temps pour obtenir plus pour votre pays, votre région, votre groupe. Je vous implore de ne pas le faire », a-t-il ajouté après un marathon de deux semaines de négociations.

Après un sommet accueillant plus de cent vingt chefs d’Etat, des annonces en tout genre sur les forêts ou le méthane, Londres espérait toujours conclure la COP26 en « gardant en vie » l’objectif le plus ambitieux de l’accord de Paris, limiter le réchauffement à 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle. Alors que le monde se trouve toujours, selon l’Organisation des nations unies, sur la trajectoire « catastrophique » d’un réchauffement de +2,7 °C à la fin du siècle, le nouveau texte préserve les avancées en matière de réductions d’émissions de gaz à effet de serre.

Des artistes du collectif Red Rebels organisent une cérémonie de funérailles au cimetière Necropolis de Glasgow, pour symboliser l’échec de la COP26, le 13 novembre 2021.
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Discussions compliquées

Ces discussions sont compliquées par la méfiance des pays pauvres, qui sont les moins responsables du réchauffement mais en première ligne face à ses impacts, puisque les pays riches n’ont toujours pas tenu leur promesse faite en 2009 de porter à partir de 2020 leur aide « climat » au Sud à 100 milliards de dollars (86 milliards d’euros) par an.

Le dernier texte n’apporte pas de progrès substantiel sur ce dossier au cœur des tensions des derniers jours. Les pays en développement avaient notamment demandé un mécanisme spécifique de prise en compte des « pertes et préjudices », c’est-à-dire des dommages déjà causés par les impacts ravageurs des tempêtes, sécheresses et canicules, qui se multiplient.

Pour Mohamed Adow, de l’Organisation non gouvernementale (ONG) Power Shift Africa, « le texte a été affaibli » par rapport à une précédente version publiée jeudi, expurgée d’une référence déjà considérée comme minimale à un système d’appui « technique ». « Les pays riches poussent vers un système qui aboutirait à un forum de bavardages incessants », a-t-il dénoncé.

Selon plusieurs observateurs et sources proches des négociations, les pays riches, particulièrement les Etats-Unis, qui craignent de possibles conséquences juridiques, ont fait barrage à cette proposition de mécanisme spécifique. L’Union européenne, de son côté, rechigne à l’idée d’un tel mécanisme, mais serait en revanche ouverte à l’idée d’un calendrier.

Mais les pays en développement ont malgré tout signalé leur intention d’accepter, à contrecœur, l’absence de leur proposition dans le texte. Au nom du groupe de négociation G77 + Chine (plus de cent pays en développement et émergents), qui a mené la bataille ces derniers jours, le Guinéen Ahmadou Sebory Toure a exprimé son « extrême déception » sur ce point, assurant toutefois que dans un « esprit de compromis », le groupe « peut vivre » avec.

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Moins de sévérité dans le domaine des énergies fossiles

Autre point très controversé, la mention inédite dans un tel texte des énergies fossiles, principales responsables du réchauffement de la planète – et qui ne sont même pas citées dans l’accord de Paris –, est préservée dans cette troisième version du projet de déclaration, au grand dam des pays producteurs.

Mais, de version en version, la portée du texte a là aussi été amoindrie. Il appelle désormais les pays membres à « accélérer les efforts vers la sortie de l’énergie au charbon sans systèmes de capture [de CO2] et des subventions inefficaces aux énergies fossiles ». La précédente déclaration ne comportait notamment pas le terme d’« efforts » ni celui d’« inefficacité ».

Sur ce point, l’Inde a par ailleurs fait entendre une voix discordante. « Les pays en développement ont le droit à leur juste part du budget carbone mondial et à un usage responsable des énergies fossiles », a martelé le ministre de l’environnement du pays, Bhupender Yadav.

Les pays pauvres accusent les pays développés de vouloir leur imposer d’agir davantage pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, alors qu’ils ne se considèrent pas comme responsables du changement climatique.

Plus généralement, sur les émissions de gaz à effet de serre, le nouveau texte reprend sans changement l’appel aux Etats membres à relever leurs engagements de réductions plus régulièrement que prévu dans l’accord de Paris, et ce dès 2022. Mais il donne la possibilité d’aménagements pour « circonstances nationales particulières » – ce point a été ajouté vendredi lors des négociations, suscitant des critiques des ONG sur la réelle ambition des pays à limiter la hausse des températures.

Les délégations aimeraient d’autre part enfin venir à bout des discussions sur le reliquat spécifique, dans la mise en pratique de l’accord de Paris, du fonctionnement des marchés carbone. Les négociations sur cet article très disputé n’avaient pu aboutir lors des deux dernières COP.

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Le Monde avec AFP

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