La condamnation à perpétuité du « Boucher des Balkans » Ratko Mladic confirmée par la justice internationale – Le Monde

C’est une condamnation historique. La justice internationale a confirmé mardi 8 juin la condamnation à perpétuité, désormais définitive, de l’ancien chef militaire serbe de Bosnie Ratko Mladic pour génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis pendant la guerre de Bosnie, de 1992 à 1995.

A la majorité, les magistrats ont intégralement rejeté l’appel de l’ancien général pour son rôle dans le massacre de Srebrenica, le pire qui ait eu lieu en Europe depuis la seconde guerre mondiale.

Ratko Mladic, qui par le passé fut un soldat massif que l’on surnommait le « Boucher des Balkans », est aujourd’hui âgé de près de 80 ans. A la lecture du verdict du Mécanisme pour les tribunaux pénaux internationaux (MTPI), qui siège à La Haye, M. Mladic a très brièvement fermé les yeux et secoué la tête.

La condamnation, que l’ancien chef militaire ne peut plus contester à présent, a notamment été saluée par l’ONU, l’Union européenne (UE), Washington et Berlin. « La chambre d’appel confirme la peine de réclusion à perpétuité prononcée contre M. Mladic », a déclaré Prisca Nyambe, juge présidente du MTPI, qui a pris le relais du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY), fermé en 2017.

Ratko Mladic restera en détention à La Haye en attendant la finalisation des modalités de son transfert vers l’Etat où il purgera sa peine, ont ordonné les juges, sans préciser quel serait ledit Etat. Les magistrats ont par ailleurs rejeté l’appel de l’accusation, qui souhaitait que l’ancien général soit également condamné pour génocide dans plusieurs autres municipalités.

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« Jour historique »

Les proches de certains des 8 000 hommes et garçons musulmans tués par les forces serbes de Bosnie à Srebrenica en 1995 avaient fait le déplacement à La Haye. « C’est un jour historique, non seulement pour nous les mères, mais aussi pour l’ensemble des Balkans, de l’Europe et du monde », a déclaré Munira Subasic, présidente de l’une des associations des « mères de Srebrenica ».

Ratko Mladic est l’un des principaux dirigeants jugés par la justice internationale pour les crimes commis pendant les guerres en ex-Yougoslavie, outre l’ancien chef politique des Serbes de Bosnie, Radovan Karadzic, condamné à la prison à vie en 2019, et l’ancien président yougoslave Slobodan Milosevic, mort dans sa cellule à La Haye d’une crise cardiaque en 2006, avant l’achèvement de son procès.

La guerre en Bosnie, qui a eu lieu de 1992 à 1995, a fait quelque 100 000 morts et 2,2 millions de déplacés. Près de Srebrenica, au Centre mémorial du génocide, un écran géant diffusait mardi les témoignages de survivants et de familles, tout près des stèles blanches parfaitement alignées où reposent les corps de plus de 6 600 des victimes identifiées.

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« Accepter la vérité »

« Ce jugement historique montre que ceux qui commettent des crimes horribles en sont bien tenus responsables », s’est félicité le président américain. Le verdict « souligne la détermination de la justice internationale à faire rendre des comptes, quel que soit le temps que cela prend – et dans le cas de Mladic, ç’aura été presque trois décennies après ses crimes abominables », a déclaré dans un communiqué la haut-commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, Michelle Bachelet.

Arrêté en 2011 après seize ans de cavale, Ratko Mladic est aujourd’hui un vieil homme qui souffre de problèmes de santé, selon ses avocats. Son âge exact fait débat : lui affirme être né le 12 mars 1943, alors que le MTPI retient le 12 mars 1942.

Des images de l’époque le montrent en train de distribuer, à Srebrenica, des bonbons à des enfants, embarqués ensuite dans des bus avec les femmes, tandis que les hommes et adolescents de la ville étaient conduits dans une forêt et exécutés.

M. Mladic a également été reconnu coupable d’avoir orchestré une campagne plus large de « nettoyage ethnique » pour chasser les musulmans des zones-clés de Bosnie-Herzégovine afin de créer une « Grande Serbie » en ex-Yougoslavie, pays déchiré après la chute du communisme.

Selon ses avocats, il n’y a pas de lien entre l’ancien général et les tueries commises à Srebrenica, et les charges de génocide qui lui ont valu une peine de détention à vie sont dénuées de fondement.

« Le moment est venu d’accepter la vérité. Mladic compte parmi les criminels de guerre les plus notoires de l’histoire moderne », a déclaré le procureur du MTPI, Serge Brammertz, ajoutant que ce verdict ne suffirait pas à mettre un terme aux divisions dans les Balkans.

« Dans toute l’ex-Yougoslavie, des milliers de suspects de crimes de guerre de tous les camps doivent encore faire l’objet d’enquêtes et de poursuites », a souligné M. Brammertz, appelant les justices nationales à « poursuivre ce travail ». « Ensemble, nous pouvons faire en sorte que toutes les victimes de génocide, de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre commis dans l’ex-Yougoslavie puissent voir ceux qui leur ont fait du tort répondre de leurs crimes », a enfin ajouté le procureur.

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Le Monde avec AFP

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