« J’imaginais la Syrie comme la France… » : devant le tribunal, Anne-Diana Clain plaide l’aveuglement – Blog Le Monde

La soeur aînée des deux djihadistes liés aux attentats du 13-Novembre, partie en Syrie, maintient qu’elle ignorait tout des exactions de l’Etat islamique.

Par Publié aujourd’hui à 11h16, mis à jour à 19h13

Temps de Lecture 3 min.

Dessin de Mohamed Mongi Amri et Anne-Diana Clain lors de leur procès, à Paris, le 19 novembre.

Etait-elle vraiment naïve ? Un peu sotte, peut-être ? Ou adhérait-elle à l’idéologie mortifère de l’Etat islamique (EI) qui avait déjà mené ses frères, deux de ses filles, sa mère et presque une trentaine de membres ou proches de sa famille en Syrie ? « J’avais des œillères », préfère répondre Anne-Diana Clain. Alors qu’elle comparaît devant la 12e chambre du tribunal correctionnel de Paris avec son « mari religieux », Mohamed Mongi Amri, 59 ans, pour « association de malfaiteurs en vue de la préparation d’actes de terrorisme », la sœur aînée des djihadistes sinistrement célèbres Fabien et Jean-Michel Clain a choisi de plaider l’aveuglement.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Anne-Diana Clain, sœur des djihadistes Fabien et Jean-Michel, devant la justice

Emmitouflée dans son manteau de laine crème, longue crinière blonde et bouclée, cette femme de 44 ans ne ressemble plus à l’ombre noire arrêtée par l’armée turque, en août 2016, alors qu’elle tentait de passer en Syrie, accompagnée de ce « mari » devant la loi islamique, mais déjà marié civilement à une autre femme, et de leurs quatre enfants. C’est pourtant bien elle, la sœur aînée de Fabien Clain, le djihadiste de l’EI qui avait revendiqué avec son accent toulousain « l’attaque bénie » du 13 novembre 2015 qui fit, du stade de France au Bataclan, 130 morts et des centaines de blessés à Paris. A l’époque, assure-t-elle pourtant, « j’étais convaincue que ce n’était pas l’EI qui avait fait les attentats. Je pensais que c’était un complot pour faire porter le chapeau aux musulmans… ».

A ses côtés, dans ce box vitré gardé par des policiers encagoulés, se tient la silhouette étriquée du fameux mari, Mohamed Mongi Amri. C’est lui qui, entre 1999 et 2000, fut à l’origine de la conversion à l’islam de toute la famille Clain, jusque-là catholique. Cheveux noués en queue de cheval et barbe grisonnante, cet ancien ouvrier tunisien qui affirme son opposition au djihadisme explique, pour sa part, que ce voyage vers la Syrie était d’abord « temporaire ». « C’était pour voir la famille de mon épouse et peut-être aussi convaincre les femmes et les enfants [à l’époque, il y avait une vingtaine de mineurs de la famille Clain en Syrie] de rentrer. »

« Rigueur religieuse »

Quand l’une plaide l’ignorance, voire la bêtise, d’une mine contrite, l’autre s’emmêle dans les explications. Et contredit parfois son épouse comme si leurs stratégies de défense s’opposaient, eux qui continuent pourtant, selon leurs avocats, de « s’écrire des lettres d’amour » de la prison de Fleury-Mérogis où elle est détenue à celle de Bois-d’Arcy où il est enfermé. Le couple pouvait-il cependant ne pas comprendre la nature des actions menées par Daech ? Pouvait-il ne pas y adhérer, alors qu’il avait économisé patiemment le montant de ses allocations familiales et détourné celles de la mère d’Anne-Diana, pourtant morte en Syrie, afin de préparer son voyage « sur zone », comme on disait alors dans les milieux radicalisés ?

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *