Jean Castex à Rome pour rencontrer le pape François – Le Monde

La visite du premier ministre tombe au milieu d’une tempête pour l’Eglise de France. Jean Castex sera reçu, lundi 18 octobre dans la matinée à Rome par le pape François dans un contexte houleux pour l’Eglise de France, confrontée aux révélations fracassantes sur les abus sexuels et à une polémique autour du « secret de la confession ».

La visite de M. Castex, prévue de longue date afin de célébrer le centenaire du rétablissement des relations diplomatiques entre la France et le Saint-Siège, est bousculée par l’actualité après la publication, le 5 octobre, des conclusions de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise (Ciase), présidée par le haut fonctionnaire Jean-Marc Sauvé.

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Si le premier ministre, reçu en audience privée par le souverain pontife, devrait, selon son entourage, évoquer plusieurs sujets sur lesquels France et Vatican convergent (accès aux vaccins pour tous, changement climatique, Liban…), impossible d’occulter l’ampleur des chiffres du rapport : 216 000 mineurs agressés par un prêtre ou un religieux en France depuis les années 1950, 330 000 en comptant les agresseurs laïcs en lien avec les institutions de l’Eglise.

Une des priorités de son pontificat

D’autant que depuis son élection en 2013, le pape a fait de la lutte contre les abus sexuels – « instrument de Satan » – une des priorités de son pontificat. François a, par ailleurs, déjà exprimé sa « honte » et sa « douleur » à la suite du rapport Sauvé et M. Castex assurera qu’il suivra « de très près les décisions que vont prendre les évêques dans les prochaines semaines », selon ses conseillers.

Mais le débat s’est aussi noué autour du secret de la confession, que le président de la Conférence des évêques de France (CEF), Emmanuel de Moulins-Beaufort, avait jugé « supérieur aux lois de la République », avant de rétropédaler et d’évoquer une « formulation maladroite ».

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Sur ce point, M. Castex, qui rencontrera au cours de la matinée à Rome plusieurs dignitaires du Saint-Siège ainsi que des représentants de la communauté ecclésiastique française, devrait circonscrire le débat aux frontières nationales en rappelant que « l’interlocuteur du gouvernement, c’est l’Eglise de France ».

« La pierre est avant tout dans le jardin des évêques » de France, qui devront « dire comment articuler la protection des enfants et le secret de la confession qui, dans le droit français, est un secret professionnel, ni plus ni moins », insistent les services du premier ministre.

Une façon de ne pas brusquer le Vatican qui lui-même marche sur des œufs : d’un côté, un formulaire de signalement de délit a été mis à disposition de tout ecclésiastique en juillet 2020 ; de l’autre, le Saint-Siège a confirmé la primauté du secret de la confession, le confesseur étant simplement encouragé à « tenter de convaincre le pénitent » d’alerter des personnes en mesure, elles, de saisir la justice.

Renforcement des frontières extérieures

Dans l’après-midi, M. Castex, accompagné du ministre des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, et du ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, sera attendu au Palazzo Chigi par le chef du gouvernement et ancien patron de la Banque centrale européenne, Mario Draghi.

L’occasion d’incarner davantage le réchauffement des relations entre France et Italie, marquées par des épisodes de tension, notamment sur la question migratoire quand le leader d’extrême droite Matteo Salvini était ministre de l’intérieur.

Le sujet s’invitera évidemment de nouveau à la table des discussions alors que la France exercera, à partir du 1er janvier prochain, la présidence tournante de l’Union européenne. Dans ce cadre, Paris compte faire du renforcement des frontières extérieures de l’Europe une de ses priorités, en mettant notamment en place des camps d’enregistrement sécurisés aux principales portes d’entrée sur le continent, dont l’Italie.

L’enjeu est d’amener Rome à mettre en place ce filtrage, qui conditionnera une « politique de solidarité », c’est-à-dire l’attribution de fonds, objet de négociations serrées à Bruxelles depuis un an.

Enfin, MM. Castex et Draghi devraient affirmer leur volonté de voir aboutir rapidement, peut-être d’ici à la fin de l’année, le projet de traité du Quirinal, initié en 2017 et qui est destiné à donner « un cadre plus stable et ambitieux » à la coopération franco-italienne, sur le modèle du traité de l’Elysée entre France et Allemagne.

Publication du rapport de la commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise catholique : ce qu’il faut savoir

Mardi 5 octobre, la commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise a rendu public son rapport. Elle estime le nombre de victimes, durant leur minorité, de violences sexuelles de la part d’un prêtre, d’un diacre ou d’un religieux, dans la population actuelle âgée de 18 ans et plus, à 216 000 personnes. Pour tout comprendre, les articles du Monde sur le sujet :

Le Monde avec AFP

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