Intempéries en Europe : le bilan s’alourdit à 183 morts, dont 156 en Allemagne – Le Monde

Le matériel du cabinet médical de chirugie vasculaire est endommagé à Bad Neuenahr le 17 juillet 2021.

Le bilan des intempéries dévastatrices en Allemagne s’est encore aggravé, samedi 17 juillet, atteignant au moins 156 morts dans le pays, ce qui porte à 183 le nombre de victimes en Europe. Ce bilan reste provisoire, car des dizaines de personnes sont encore portées disparues outre-Rhin et en Belgique, où vingt-sept morts ont été dénombrés. Ces inondations d’une rare ampleur, provoquées par des pluies diluviennes, ont également causé des dégâts au Luxembourg, aux Pays-Bas et en Suisse.

  • Un colossal travail de déblaiement en Allemagne

Dans le Land de Rhénanie-Palatinat (ouest de l’Allemagne), l’un des plus touchés, « 90 personnes ont perdu la vie pendant la catastrophe », selon la police de Coblence, qui comptabilise aussi « environ 618 blessés ». Ce bilan s’ajoute aux 43 morts survenues en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, un autre Land frappé par la catastrophe. « Il est à craindre que nous ne découvrions plus de morts », ont prévenu les autorités locales.

Près de Cologne, à Erftstadt, une portion de village s’est littéralement effondrée sur elle-même vendredi à la suite d’un énorme glissement de terrain. Les images, spectaculaires, de la zone sinistrée montraient un vaste cratère béant dans lequel se déversaient des masses de terre, d’eau brune et de débris. « Nous devons présumer que nous allons trouver d’autres victimes », a prédit Carolin Weitzl, maire d’Erfstadt.

« Leur destin nous déchire le cœur », a lancé, samedi, le chef de l’Etat, Frank-Walter Steinmeier, à propos des victimes de la catastrophe, lors d’une visite à Erftstadt. La chancelière, Angela Merkel, doit se rendre, elle, dimanche sur les lieux. Elle ira dans le village de Schuld, en Rhénanie-Palatinat, qualifié de « martyr » car tout ou presque y a été détruit.

Glissement de terrain à Erfstadt, près de Cologne, en Allemagne.

L’Allemagne a fait face, entre le 14 et le 15 juillet, à des pluies diluviennes, d’une violence inédite, qui ont provoqué des crues subites envahissant des zones habitées et détruisant de nombreuses localités. Les habitants qui ont pu se mettre à l’abri mercredi soir, lorsque les inondations ont débuté, regagnent progressivement leur domicile. Des scènes de désolation les attendent : maisons défoncées, arbres arrachés, voitures retournées, routes et ponts effondrés, réseaux coupés.

Dans les localités sinistrées, pompiers, protection civile, responsables communaux et militaires ont commencé le colossal travail de déblaiement et de nettoyage des amas de débris boueux qui obstruent souvent les rues. Les médias locaux diffusaient samedi des images de chars militaires sur les routes de la ville sinistrée d’Erftstadt. En Rhénanie-du-Nord-Westphalie, 22 000 sauveteurs ont été mobilisés.

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« La tâche est immense », a reconnu le maire de Solingen, une ville du sud de la Ruhr. Il faut pomper l’eau, évaluer la solidité des bâtiments endommagés, dont certains devront être abattus, rétablir l’électricité, le gaz, le téléphone, héberger les personnes qui ont tout perdu. Les perturbations des réseaux de communication, qui rendent de nombreuses personnes injoignables, compliquent tout chiffrage du nombre de disparus.

Des habitants enlèvent la boue et sortent les meubles des maisons dans le centre-ville de Bad Neuenahr, samedi 17 juillet 2021.

Les autorités restent sur le qui-vive. Dans le district de Heinsberg, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, un barrage sur la rivière Rour, un affluent de la Meuse, s’est rompu vendredi soir, conduisant à l’évacuation de 700 personnes.

Le gouvernement a fait savoir qu’il travaillait à la mise en place d’un fonds d’aides spéciales, alors que le préjudice devrait atteindre plusieurs milliards d’euros. La solidarité s’organise aussi, avec des appels aux dons lancés dans tout le pays, des collectes locales, des soutiens financiers promis par de grandes entreprises, comme le constructeur automobile Volkswagen.

Les dégâts sont « si importants qu’ils nous occuperont pendant longtemps », a prévenu la dirigeante de Rhénanie-Palatinat, Malu Dreyer, tandis que son homologue de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, Armin Laschet, a parlé d’une « catastrophe d’ampleur historique ».

  • Le rire du potentiel successeur de Merkel suscite l’indignation

Une polémique a toutefois éclaté : Armin Laschet, également chef du parti conservateur (CDU) d’Angela Merkel, et candidat à sa succession au pouvoir lors des législatives du 26 septembre, a provoqué l’indignation dans le pays, après avoir été filmé en train de rire lors d’une visite à des victimes. Armin Laschet s’est excusé, samedi soir, sur Twitter : « Je regrette l’impression qu’a donnée une conversation. C’était inapproprié et j’en suis désolé », a-t-il déclaré. Favori des sondages, il a été pris d’hilarité pendant qu’il assistait au discours d’hommage du chef de l’Etat. Situé derrière lui, on le voit sur les images rire pendant près de trente secondes, avec des personnes l’accompagnant.

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La vidéo, diffusée par la chaîne de télévision locale WDR, a provoqué l’ire de responsables politiques sociaux-démocrates (SPD), partenaires des conservateurs au sein du gouvernement de coalition de Mme Merkel, et de nombreux internautes. « Je suis tout simplement sans voix », a déclaré sur Twitter Lars Klingbeil, secrétaire général du SPD.

  • Jour de deuil national en Belgique

Les responsables allemands et européens appellent dans ce contexte à redoubler d’efforts pour lutter contre le réchauffement climatique, responsable de cet épisode extrême, selon eux, au même titre que la vague de chaleur dans l’ouest du continent nord-américain.

Aux Pays-Bas, où les inondations ont causé de nombreuses destructions, mais sans faire de victimes, le premier ministre, Mark Rutte, a également mis en cause le changement climatique, estimant que les intempéries en étaient « sans aucun doute » une conséquence. Pour éviter qu’un tel scénario ne se répète, « la première chose à faire, et heureusement nous le faisons aux Pays-Bas, est de donner de l’espace aux rivières », a-t-il souligné. Mais les Néerlandais vont, eux aussi, devoir « tirer des leçons », et se demander : « Que peut-on faire de plus ? », a estimé M. Rutte.

La Belgique voisine paie aussi un lourd tribut, avec au moins vingt-sept morts, selon un bilan encore provisoire. A mesure que l’eau se retire, « nous allons probablement encore trouver des situations catastrophiques », a jugé la bourgmestre de Liège, Christine Defraigne.

Le centre de crise belge, qui centralise les données au niveau national, ne communique plus à propos du nombre de disparus, a expliqué un porte-parole à l’Agence France-Presse. Il a souligné la difficulté de joindre les personnes en raison des coupures d’électricité et des perturbations touchant les réseaux téléphoniques.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et le premier ministre belge, Alexander De Croo (2e à droite), à Rochefort, samedi 17 juillet 2021.

L’armée a été déployée dans quatre des dix provinces du pays pour participer aux secours, et notamment aux nombreuses évacuations. « Il se pourrait que ces inondations soient les plus catastrophiques que notre pays ait jamais connues », a affirmé le premier ministre, Alexander De Croo ; il a décrété une journée de deuil national, mardi. M. De Croo et la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, se sont rendus samedi matin à Rochefort, une des communes belges frappées par la catastrophe.

« Je suis triste et choquée de voir ces destructions (…) Nous, les Européens, sommes avec vous en ce moment difficile, de tout notre cœur. Votre deuil est notre deuil », a déclaré Mme von der Leyen, en promettant l’aide de l’Union européenne.

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La météo s’est améliorée sur l’ensemble du pays avec la fin des précipitations dès vendredi, l’apparition du soleil et l’arrivée de températures estivales samedi. En conséquence, le niveau des cours d’eau a reflué, dévoilant un paysage de désolation. Quelque 120 communes ont été touchées à travers le pays. Dans les zones sinistrées, essentiellement dans le sud et l’est du pays, des policiers ont été mobilisés pour aller frapper aux portes des habitations, afin de rechercher d’éventuelles nouvelles victimes.

Le Monde avec AFP

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