Incendie à Rouen: les questions qui se posent après la publication de la liste des produits brûlés – BFMTV.COM

Pour essayer de rassurer une population particulièrement inquiète, les autorités tentent de jouer la carte de “la transparence” ce mardi soir.

Comme promis, la préfecture de Seine-Maritime a mis en ligne sur son site Internet la liste des produits présents sur le site lors de l’incendie de l’usine Lubrizol de Rouen jeudi dernier. D’après les documents publiés, 5253 tonnes de produits chimiques au total ont été détruits dans l’incendie de l’usine classée Seveso, seuil haut.

“Tous les produits ne sont pas dangereux. La dangerosité dépend de la quantité présente, du devenir des molécules après avoir brûlé et de la manière dont on est exposé (contact cutané, inhalation, ingestion)”, est-il précisé sur un des documents publiés, accompagnant la liste des produits incendiés.

479 fiches de sécurité dévoilées

La préfecture publie également sur son site la liste des produits chimiques présents dans les principaux “additifs multi-usages” et les 479 fiches de sécurité qui “précisent les caractéristiques des produits et les risques associés, notamment en cas de combustion”.

La liste des produits chimiques présents dans les principaux additifs multiusage.

Parmi ces 5.253 tonnes de produits détruits, 62.88% sont des additifs multi-usages. La liste dévoilée par la préfecture indique que 13.53% des produits détruits sont des améliorants de viscosité. 4.21% et 4.18% sont des dispersants, et de l’huile vierge, tandis que 3.99% de détergents ont brûlé lors de l’incendie. Entre 1et 3% d’additifs anti-usure, d’additifs pour carburant diesel, d’abaisseur du point de congélation ou encore d’additif pour le travail des métaux.

Bien que la préfecture indique que “tous les produits ne sont pas dangereux”, les listes révèlent que plusieurs d’entre eux sont classés “hautement inflammables”.

Répartition des produits chimiques contenus dans les principaux additifs multiusages.

Une campagne de prélèvements (air, eau, sols, aliments…), “engagée dès le début de l’accident” sera adaptée “et si nécessaire complétée afin de procéder à une évaluation quantitative des risques sanitaires qui se déroulera pendant plusieurs semaines”, précise la préfecture. “En fonction des résultats de cette évaluation, une surveillance sanitaire adaptée sera mise en place”, indique-t-elle.

De nombreux produits présentant un danger

Des rapports officiels consultés mardi par Mediapart évoquaient en 2016 la présence dans l’usine Lubrizol de produits “très dangereux pour l’environnement” et “nocifs”. Les documents publiés ce mardi attestent du niveau de dangerosité des produits stockés dans l’usine Lubrizol.

Plusieurs produits sont classés “très toxiques pour les organismes aquatiques”, “susceptibles de nuire à la fertilité ou au foetus”. Pour certains, il est indiqué qu’ils peuvent êtres “toxiques” voire “mortels” si inhalés. D’autres encore peuvent présenter “des effets graves pour les organes”, être cancérogènes ou “irritants pour les voies respiratoires”.

Pour l’heure, on ignore cependant si les produits présentent la même dangerosité une fois brûlés. Les rapports officiels consultés par Mediapart estimaient qu’un incendie pourrait donner lieu à la “formation de substances toxiques”.

“On nous donne une fonction, mais cela ne nous dit pas quel est le produit chimique qui est derrière”, regrette sur notre antenne Gilles Dixsaut, médecin du comité national contre les maladies respiratoires. Au vue du manque de grille d’analyse pour éplucher cette longue liste de produits, “il faut donc aller chercher dans la liste, un par un, ceux qui peuvent présenter un danger”.

“Qu’est-ce qui est parti en fumée?”

“La question est désormais de savoir ce qui est parti dans les fumées,” s’interroge donc le médecin. “Puisqu’on a manifestement eu des modifications des produits lors de leur combustion: en quoi ce sont transformés ces produits? Pour l’instant on ne le sait pas encore, ces recherches n’ont pas encore été faites”.

“C’est majoritairement des hydrocarbures”, rappelle de son côté Laura Verdier, ingénieure en environnement, fondatrice de LVR consulting, à la lecture des documents publiés par la préfecture. La spécialiste atteste par ailleurs de la présence de “H2S, un gaz extrêmement impactant sur la santé et qui requiert des précautions infinies dans les opérations”.

“Mais ce ne sont pas les produits en eux-mêmes qui vont poser problème”, tempère-t-elle, rappelant que quelques 160 “fûts abîmés sont encore présents sur le site, dont certains sont potentiellement très dangereux. “C’est plutôt leur combustion et ceux qui ont été dégradés dans l’incendie”. Et d’ajouter: “L’autre problème, c’est qu’il faut un certain temps de laboratoire pour analyser certaines toxines. Donc à l’heure actuelle on a pas eu le temps nécessaire pour les analyser”.

Si “cette liste ne nous permettra pas de dire ce qu’il y a dans l’atmosphère”, regrette Laura Verdier, celle-ci assure que cette liste de produits va permettre à l’INERIS et l’ANSES de “faire des investigations supplémentaires pour qu’on sache et qu’on évalue mieux ce qui s’est passé”.

Elisabeth Borne a indiqué mardi qu’une partie des produits avait pu être évacuée jeudi lors de l’incendie par les services de secours.

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