Immigration, islam, environnement… Entre Jean-Luc Mélenchon et Eric Zemmour, un débat sans surprise – Le Monde

Avant le débat entre Jean-Luc Mélenchon et Eric Zemmour, sur le plateau de BFM TV, à Paris, le 23 septembre 2021.

L’un est candidat depuis quasiment un an, l’autre maintient toujours le suspens. A sept mois de l’élection présidentielle, le débat entre Jean-Luc Mélenchon et Eric Zemmour sur BFM TV, jeudi 23 septembre, était très attendu en cette rentrée politique. Pendant plus de deux heures, le candidat de La France insoumise et le polémiste d’extrême droite se sont opposés sur de nombreux sujets – immigration, islam, sécurité, pouvoir d’achat, lutte contre le réchauffement climatique… – et ont confronté leurs visions antagonistes de la société.

Si M. Mélenchon a souhaité que ce débat ne « tourne pas en une guerre de coqs », il s’en est tout de même pris dès les premières minutes à M. Zemmour. « Vous êtes un danger pour notre pays. Vous avez une vision rabougrie de la France, a-t-il lancé. Vous êtes un raciste, condamné pour ça. » Critiqué à gauche pour avoir accepté de débattre avec M. Zemmour, le député des Bouches-du-Rhône a également tenté de se justifier : « J’ai souhaité ce débat parce qu’on est à sept mois d’une élection présidentielle, je suis candidat et les occasions de convaincre doivent être toutes saisies. »

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Election présidentielle 2022 : Jean-Luc Mélenchon veut relancer sa campagne en débattant avec Eric Zemmour

Les deux débatteurs ont ensuite évoqué leur vision de l’immigration sur le thème « La France est-elle en danger ? ». L’auteur du Suicide français, qui a régulièrement exprimé sa crainte « d’une guerre civile en France », estime que « nous avons donné les droits de la politique d’immigration aux immigrés. Ce sont eux qui choisissent qui vient, qui ne vient pas : le fils, la mère, la femme, le cousin… » « Oui, ce sont des êtres humains qui ont des familles », a répliqué dans la foulée M. Mélenchon.

L’ancien chroniqueur de CNews a ensuite attaqué l’islam qui serait, selon lui, « aux antipodes de la France » : « L’islam est une religion politique par essence. Elle ne s’occupe pas de l’intériorité des fidèles mais des normes sociales et politiques. L’islam est une religion qui concurrence le code civil, (…) qui n’est pas compatible avec la France. » De son côté, M. Mélenchon a vanté « la créolisation de la France ». Pour lui, « nous sommes le pays qui pratique depuis le plus longtemps une forme de créolisation assumée, c’est-à-dire la création d’une culture commune de gens qui se trouvent au même endroit. ».

Sécurité et fracture sociale

Interrogés sur la sécurité, le candidat de la France insoumise à la présidentielle pour la troisième fois, après 2012 et 2017, a égrainé son programme. Il a notamment proposé de « dissoudre les Brigade anticriminalité et les BRAV (Brigade de répression de l’action violente motorisée) ». « On a réussi à couper la police de la population. Je veux une police respectueuse des gens », a-t-il poursuivi. « Pour moi, la délinquance que nous vivons n’est pas une délinquance, c’est un djihad, a pour sa part lancé M. Zemmour. C’est une guerre de civilisation qui nous est menée, une guerre de pillage, une guerre de viol, une guerre de meurtre. »

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Dans ses meetings, Eric Zemmour prêche sa « vraie histoire » de France

MM. Mélenchon et Zemmour ont ensuite abordé le thème de la fracture sociale. Le candidat de la France insoumise a notamment rappelé qu’il était « partisan du blocage d’un certain nombre de prix de premières nécessités : l’alimentation, l’énergie et l’eau » pour augmenter le pouvoir d’achat des plus démunis. Il souhaite également une augmentation du SMIC à 1 400 euros net. Le polémiste d’extrême droite s’en est pris, lui, à l’Etat providence français qu’il a qualifié d’« obèse » : « Le modèle social a renoncé à ces deux principes : lier les contributions au travail et nous sommes passés d’un système de répartition à un système d’assistanat. » Il souhaite notamment « réduire les impôts et les charges sociales », sans toutefois plus de précisions.

Désaccord sur le nucléaire

Autre sujet de discorde : l’environnement. Quel mix énergétique pour lutter contre le réchauffement climatique ? Pour Eric Zemmour, la solution reste le nucléaire qui permet à la France « d’être le pays qui émet le moins de CO2 ». « Abandonner le nucléaire c’est abandonner la souveraineté de la France, c’est abandonner 200 000 emplois directs », a-t-il expliqué souhaitant « réinventer une écologie de droite, enracinée, près de la nature ».

M. Mélenchon propose, lui d’« abandonner » le nucléaire dans les prochaines années à cause notamment du risque d’accident et de la question des déchets. Le député souhaite ainsi « déployer l’hydroélectrique, redéployer les hydroliennes, l’énergie géothermique et améliorer la sobriété dans la consommation énergétique. Ça va mettre au travail des dizaines de milliers de gens ».

Paris le 23 septembre 2021. BFM TV, Le Debat Jean Luc Melenchon - Eric Zemmour // Le débat vu de la régie

Enfin, dans les derniers instants de la soirée, les deux débatteurs ont été interrogés sur l’état de la démocratie en France, et notamment sur l’abstention massive lors des dernières élections. Cette fois, MM. Mélenchon et Zemmour se sont accordés sur l’analyse : « Quoi que les électeurs votent, le résultat est le même », estiment-ils. « Les politiques depuis trente ans se sont rassemblées comme des sœurs jumelles, estime M. Zemmour. Le point d’orgue de cette ressemblance, c’est Emmanuel Macron, enfant de la droite libérale et de la gauche libérale. »

De son côté, le candidat de la France insoumise a notamment mis en cause les traités européens : « Ceux qui gouvernent n’ont plus aucune marge. Je prends l’engagement absolu que le programme sera appliqué d’un bout à l’autre si je suis élu. » Avant de rappeler son souhait de mettre en place une assemblée constituante pour « abattre la monarchie présidentielle ». Il a aussi plaidé pour le référendum d’initiative citoyen et l’institution de référendums révocatoires des élus.

A l’issue du débat, Eric Zemmour a de nouveau été interrogé sur son intention, ou non, de se présenter à l’élection présidentielle. Et une nouvelle fois, le polémiste d’extrême droite a laissé planer le doute : « On verra. Vous permettez que je choisisse mon moment. » Or à moins de 200 jours du premier tour, « vous vous rendez compte qu’il y a des gens qui n’ont même pas de programme ? », s’est amusé M. Mélenchon en clôture de ce débat, dans une dernière pique à son adversaire du soir.

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Eric Zemmour, une ascension médiatique entre attraction et répulsion

Le Monde

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *