Haut-Karabakh : Moscou dénonce la présence de combattants syriens et libyens dans la région – Le Monde

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La situation empire jour après jour dans le conflit qui oppose l’Azerbaïdjan à l’Arménie autour de la région du Haut-Karabakh, une enclave séparatiste d’Azerbaïdjan, peuplée de 150 000 habitants en majorité arméniens.

Erevan et Bakou continuent de se rejeter la responsabilité des attaques qui ont fait près d’une centaine de morts en quatre jours, faisant craindre une internationalisation des hostilités dans une zone où des puissances comme la Russie, la Turquie ou l’Iran sont déjà en concurrence.

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  • Des insurgés syriens en Azerbaïdjan

Moscou a ainsi affirmé, mercredi 30 septembre, que des combattants syriens et libyens appartenant à des groupes armés illégaux avaient été envoyés dans la région, en proie à d’intenses combats opposant l’armée azerbaïdjanaise aux séparatistes pro-arméniens. Sans préciser ses accusations, la Russie a exhorté les pays impliqués dans le confit à éviter d’employer des « terroristes étrangers et des mercenaires » et s’est dite « profondément préoccupée par des processus susceptibles de provoquer une escalade des tensions ».

Deux sources proches des insurgés syriens ont déclaré à l’agence de presse Reuters que la Turquie avait envoyé des rebelles soutenir les forces azerbaïdjanaises. Une enquête du quotidien britannique The Guardian, publiée lundi, affirmait que des rebelles syriens avaient été embauchés par une société privée de sécurité turque pour rejoindre l’Azerbaïdjan.

Le journaliste syrien Hussein Akoush a ensuite publié mardi sur son compte Twitter la photographie de l’un de ces combattants, Muhammad Shaalan, originaire d’Al-Atarib, dans la région d’Alep. Envoyé par les Turcs en Azerbaïdjan il y a une semaine avec la promesse d’un bon salaire, il a été tué dans les combats entre Arméniens et Azerbaïdjanais.

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L’Observatoire syrien des droits de l’Homme avait confirmé, dimanche, que des mercenaires, issus de factions soutenues par Ankara en Syrie, avaient bien été déployés pour combattre aux côtés de l’armée azerbaïdjanaise. Erevan avait aussi accusé des alliés syriens de la Turquie d’avoir été recrutés pour combattre sur le front du Haut-Karabakh, ce que Bakou avait démenti, l’accusant en retour de déployer des vétérans du conflit syrien.

La Turquie est la seule puissance à ne pas avoir appelé à un cessez-le-feu, encourageant, au contraire, son allié azerbaïdjanais à reprendre le contrôle du Karabakh par la force et se déclarant déterminée à l’aider à « recouvrer ses terres occupées et à défendre ses droits et intérêts selon le droit international », conspuant ainsi l’Arménie, son adversaire historique. Le Kremlin, lui, avait appelé mardi les autorités turques à s’abstenir de jeter « de l’huile sur le feu » et à œuvrer pour la paix.

  • Poutine et Macron appellent à un arrêt des combats

Les présidents russe Vladimir Poutine et français Emmanuel Macron ont appelé à un arrêt « complet » des combats au Karabakh et se sont dits prêts à intensifier les efforts diplomatiques pour contribuer à la résolution du conflit, a annoncé le Kremlin.

« Vladimir Poutine et Emmanuel Macron ont appelé les parties au conflit à, dès que possible, à faire redescendre les tensions et à montrer le maximum de retenue », a déclaré la présidence russe. Les deux présidents se sont dits « disposés » à l’adoption d’un communiqué qui serait publié au nom des coprésidents du groupe de Minsk sur le Karabakh et appellerait à la fin « immédiate » des hostilités et au début de discussions, a ajouté le Kremlin.

  • Passe d’armes entre Paris et Ankara

Entamés dimanche, les combats se sont poursuivis, mercredi, entre l’Azerbaïdjan et les forces de la région à majorité arménienne du Haut-Karabakh, les plus violents depuis un cessez-le-feu conclu en 1994, sur fond de tensions diplomatiques croissantes entre Paris et Ankara.

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« La France demeure extrêmement préoccupée des messages guerriers que la Turquie a eus ces dernières heures, au fond décomplexant l’Azerbaïdjan dans ce qui serait une reconquête du Nord Karabakh, et cela, nous ne l’accepterons pas », a réagi mercredi Emmanuel Macron.

Le chef de l’Etat français a annoncé qu’il aurait des entretiens avec son homologue russe, Vladimir Poutine, mercredi soir, et avec le président américain, Donald Trump, jeudi, avant de rendre compte de la situation devant le Conseil européen. « Je dis à l’Arménie et aux Arméniens, la France sera dans son rôle », a insisté M. Macron.

Ankara a vivement réagi à ses propos : « La solidarité exprimée par Macron envers l’Arménie, tandis qu’il ne se préoccupe pas pour les territoires d’Azerbaïdjan, signifie qu’il soutient l’occupation », a affirmé le ministre turc des affaires étrangères, Mevlüt Çavusoglu.

« Nous sommes près d’une guerre à grande échelle, peut-être même à l’échelle régionale », s’inquiète Olesya Vartanyan, analyste de l’International Crisis Group. Les ONG de défense des droits de l’homme Human Rights Watch et Amnesty International ont, quant à elles, appelé les belligérants a ne pas « viser » les populations civiles.

  • Rejet des pourparlers

Mercredi, le ministre russe des affaires étrangères a proposé d’accueillir des pourparlers sur la région séparatiste. Lors d’entretiens téléphoniques − séparés − avec ses homologues arménien et azerbaïdjanais, Sergueï Lavrov avait alors « confirmé la disponibilité de Moscou pour organiser les contacts nécessaires, y compris la tenue d’une rencontre »

Mais, Erevan a jugé prématuré l’idée de pourparlers avec Bakou. Le premier ministre, Nikol Pachinian, a fermé la porte à des négociations de paix immédiates, quelques heures après un vote unanime du Conseil de sécurité de l’ONU appelant à la fin des hostilités et à « reprendre sans tarder des négociations ».

« Il est inapproprié de parler d’un sommet Arménie-Azerbaïdjan-Russie alors que des combats intenses sont en cours », a-t-il répondu à des médias russes l’interrogeant, selon l’agence Interfax. « Pour des négociations, il faut une atmosphère et des conditions adéquates », a-t-il fait valoir.

De son côté, la diplomatie de l’Azerbaïdjan a fait savoir mercredi qu’elle allait poursuivre ses opérations militaires jusqu’au retrait des forces arméniennes. Tant que « nous ne verrons pas clairement les troupes arméniennes quitter le territoire de l’Azerbaïdjan, nous continuerons notre opération militaire légitime », a déclaré la représentation du pays à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

  • Des bilans partiels

Selon des bilans officiels, probablement très partiels, les combats d’ampleur qui ont éclaté dimanche ont coûté la vie à 98 personnes, dont 81 combattants séparatistes arméniens et 17 civils des deux côtés du front. L’Azerbaïdjan n’a communiqué aucune perte militaire, et les deux camps se rejettent la responsabilité des hostilités.

Le nombre de morts s’annonce bien plus important. Le ministère azerbaïdjanais de la défense indique que « d’intenses combats se poursuivent » mercredi, et que depuis le week-end 2 300 séparatistes arméniens ont été tués.

Le Monde avec AFP et Reuters

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