Guerre en Ukraine : après six mois de conflit, les Occidentaux font toujours bloc derrière Kiev – Le Monde

Sergiy Kyslytsya (à gauche), représentant permanent de l’Ukraine auprès des Nations unies, et l’ambassadeur russe à l’ONU, Vassily Nebenzia (à droite), au Conseil de sécurité, à New York, le 23 août 2022.

Alors que le conflit armé s’enlise sur son territoire, l’Ukraine célèbre, sous les bombes, la fête nationale de l’indépendance, mercredi 24 août, six mois jour pour jour après le début de l’invasion du pays par la Russie.

« Nous devons être conscients que [mercredi], des provocations russes répugnantes et des frappes brutales sont possibles », a mis en garde, mardi, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky. « Et nous répondrons bien sûr à toute manifestation du terrorisme russe », a-t-il ajouté.

M. Zelensky s’était engagé, plus tôt dans la journée, à restaurer la souveraineté ukrainienne sur la Crimée, annexée par la Russie en 2014, afin de rétablir « l’ordre public mondial ».

« Nous reprendrons la Crimée, c’est notre territoire. Nous le ferons de la manière dont nous le déciderons. Et nous prendrons notre décision seuls, sans consulter aucun autre pays. »

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Le président français, Emmanuel Macron, a, lui aussi, haussé le ton, mardi, exhortant la communauté internationale à ne faire montre d’« aucune faiblesse, d’aucun esprit de compromission » face à la Russie. Les Européens sont prêts à soutenir le « combat » de l’Ukraine « dans la durée », a-t-il ajouté à l’attention de Volodymyr Zelensky, s’adressant par vidéo au sommet de la Plate-forme de Crimée, qui réunit les principaux alliés de l’Ukraine et qui existait déjà avant l’invasion du 24 février.

De nouvelles aides militaires pour l’Ukraine

Dans leurs messages, les autres dirigeants occidentaux ont également continué à fermement condamner l’offensive russe et rejeté par avance les référendums d’annexion que la Russie veut organiser dans les territoires occupés, comme elle l’avait fait en Crimée en 2014.

Le chancelier allemand, Olaf Scholz, a affirmé qu’« aucun simulacre de référendum ou d’autres tentatives de modifier le statut de certaines parties du territoire ukrainien ne sera[it] reconnu ». Dénonçant « l’agression aucunement provoquée de l’Ukraine par la Russie », il a promis de poursuivre les sanctions contre Moscou et d’envoyer une nouvelle aide militaire à Kiev d’environ 500 millions d’euros, incluant des systèmes de défense antiaérienne.

« Nous devons continuer à fournir à l’Ukraine toute l’aide (économique, militaire, etc.) nécessaire, jusqu’à ce que la Russie mette fin à cette guerre et retire ses troupes de toute l’Ukraine », a renchéri le premier ministre britannique, Boris Johnson.

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De leur côté, les Etats-Unis doivent annoncer, mercredi, une nouvelle aide militaire d’environ 3 milliards de dollars (3 milliards d’euros), a fait savoir, mardi, un responsable américain. Il s’agira de la plus grosse enveloppe depuis le début de la guerre, qui permettra à Kiev d’acquérir de nouvelles armes ou de financer des formations ou des opérations.

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Sur le terrain, depuis le retrait des forces russes des environs de Kiev, à la fin de mars, l’essentiel des combats s’est concentré dans l’Est – où Moscou a lentement gagné du terrain avant que le front se fige – et dans le Sud – où les troupes ukrainiennes disent mener une contre-offensive, elle aussi très lente. La Russie continue cependant de viser régulièrement les villes ukrainiennes à l’aide de missiles de longue portée, même si Kiev et ses environs sont rarement touchés.

Des centaines de drapeaux ukrainiens, représentant chacun une personne tuée par l’offensive russe, sont plantées sur une pelouse de Maïdan, la place de l’Indépendance, à Kiev, le 23 août 2022.

La centrale de Zaporijia au cœur des tensions

Dans le sud-est du pays, le long du Dniepr, la centrale nucléaire de Zaporijia, près de laquelle ont eu lieu des frappes, continue d’alimenter les tensions. La Russie et l’Ukraine se sont à nouveau mutuellement accusées, mardi, lors d’une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies (ONU), de mettre en péril les installations tandis que le secrétariat général de l’ONU les appelait à cesser toute activité militaire autour du site.

L’ambassadeur de la Fédération de Russie à l’ONU, Vassily Nebenzia, a fustigé les Occidentaux qui « vivent dans une réalité parallèle dans laquelle l’armée russe bombarde elle-même le site qu’elle protège ». « Personne ne peut imaginer que l’Ukraine viserait une centrale nucléaire en créant un risque énorme de catastrophe atomique sur son propre territoire », a rétorqué l’ambassadeur de l’Ukraine, Sergiy Kyslytsya.

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La ministre des affaires étrangères française, Catherine Colonna, a discuté avec son homologue russe, Sergueï Lavrov, d’une inspection par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Cette visite, destinée à « diminuer le risque d’un grave accident nucléaire en Europe », pourrait se dérouler « d’ici quelques jours si les négociations en cours aboutissent », a espéré le directeur général de l’AIEA, Rafael Grossi, signalant « des dégâts supplémentaires dans la zone » après les bombardements des derniers jours. La Russie a proposé que cette mission se rende sur le site en passant par la Crimée, ce que Volodymyr Zelensky juge contraire aux lois de son pays.

Les funérailles de Daria Douguina

En Russie, plusieurs centaines de personnes se sont réunies mardi à Moscou pour les funérailles de Daria Douguina, la fille d’un idéologue et écrivain ultranationaliste proche du Kremlin, tuée samedi soir dans l’explosion de sa voiture. Daria Douguina, journaliste et politologue de 29 ans, était, comme son père, Alexandre Douguine, farouchement en faveur de l’offensive russe en Ukraine.

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« Cela a été un crime barbare pour lequel il ne saurait y avoir de pardon (…). Il ne peut y avoir aucune pitié pour les organisateurs, les commanditaires et les exécutants », a réagi le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov. « Elle est morte au front pour la nation, pour la Russie. Le front, il est ici », a lâché M. Douguine d’une voix tremblante.

L’idéologue russe Alexandre Douguine assiste, à Moscou, le 23 août 2022, à la cérémonie d’adieu à sa fille Daria Douguina, tuée quelques jours plus tôt dans l’explosion d’une voiture piégée.

La sécurité d’Etat russe (FSB) a affirmé, lundi, que l’attaque avait été préparée et menée par les services de renseignement ukrainiens. Kiev a démenti en bloc ces allégations et a, en retour, accusé la Russie d’avoir commis ce crime pour tenter de remobiliser une opinion publique de moins en moins favorable à la guerre. « Ce n’est certainement pas notre responsabilité. Ce n’est pas une citoyenne de notre pays. Elle ne nous intéresse pas », a sèchement répliqué mardi M. Zelensky.

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Le Monde avec AFP

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