Grands de ce monde et anonymes rassemblés pour Jacques Chirac – Le Parisien

De longues secondes, seule, figée face à la pierre tombale où les mots « Jacques Chirac, 1932-2019 » ont été gravés. Dans l’immensité du cimetière du Montparnasse, face au caveau ouvert où le corps de l’ancien président de la République vient d’être inhumé, aux côtés de sa fille aînée Laurence, Claude Chirac dit au revoir à son père.

Pour l’accompagner, un silence de plomb, les regards attristés de son mari Frédéric Salat-Baroux, de Martin, l’unique petit-fils de l’ex-chef de l’Etat, et d’une poignée d’intimes, parmi lesquels Muriel Robin, qui tient par le bras son amie Line Renaud.

Ultime moment de recueillement, dans la plus stricte intimité réclamée par la famille, auquel une personne fait défaut : Bernadette Chirac, trop affaiblie pour assister à toute cette journée d’obsèques et d’hommage national. Très tôt le matin, elle s’est tout de même rendue aux Invalides, pour la cérémonie privée réservée aux proches et soignants de l’ancien chef d’Etat.

Applaudissements sur le trajet

Ce lundi, une bonne partie des Français ont accompagné le clan Chirac dans son deuil. Devant leurs écrans de télévisions pour suivre les cérémonies en direct, dans les bâtiments publics et les écoles où une minute de silence a été proposée dans l’après-midi, et bien sûr aux abords de l’église Saint-Sulpice (VIe), pour assister à l’office religieux.

Un hommage entamé le matin même, par les honneurs militaires en présence d’Emmanuel Macron. Dans la cour des Invalides, le visage marqué de l’actuel locataire de l’Elysée en dit long sur la pesanteur du moment.

Pas un mot, pas un bruit, si ce n’est la musique de la Garde républicaine, tandis que le président se tient devant le cercueil de Jacques Chirac, déposé au milieu de la cour et ceint du drapeau tricolore. À trois kilomètres de là, la famille Chirac gravit les marches de Saint-Sulpice sous les applaudissements de plusieurs centaines de badauds massés sur le parvis.

Le convoi funéraire se met en route. Escortée d’un important dispositif de motards de la police, la limousine qui transfère le cercueil de Jacques Chirac reçoit des applaudissements sur le trajet qui relie les Invalides à Saint-Sulpice. « Bravo ! », « Merci ! », entend-on au passage du corbillard. Lentement, porté par ses anciens gardes du corps, le cercueil entre sous les orgues et le Requiem opus 48 de Gabriel Fauré.

«Un ballet millimétré»

L’église est pleine à craquer. À droite face à l’autel, le couple Macron, Édouard Philippe et aussi les anciens présidents Valéry Giscard d’Estaing, Nicolas Sarkozy et François Hollande. Derrière, un aréopage très éclectique de la classe politique française, où s’entremêlent les membres du gouvernement, la jeune garde macroniste, des socialistes du quinquennat précédent et quelques anciens ministres de Jacques Chirac comme Luc Ferry, Philippe Douste-Blazy ou Jacques Toubon.

« C’est le parcours de vie de Chirac. Il y avait des Parisiens, des Corréziens, des riches, des pauvres, des hommes de pouvoir, des hommes d’action », loue Jean-Paul Delevoye. Un participant tempère : « C’était très beau, mais en réalité un peu froid, pas très émouvant. Un ballet millimétré. On célébrait le Chirac institutionnel. » Parmi les représentants étrangers : l’ex-président américain Bill Clinton, l’Italien Sergio Mattarella, le Premier ministre libanais Saad Hariri, et même Vladimir Poutine.

VIDÉO. Une messe solennelle à l’église Saint-Sulpice

Une messe au cours de laquelle le message très politique de Mgr Aupetit, l’archevêque de Paris, n’aura échappé à personne. « La fracture sociale est un mal qu’il est visiblement difficile de traiter puisque aujourd’hui encore, certains se sentent exclus », relève-t-il en reprenant le fameux slogan de la présidentielle de 1995. Comme un message à l’actuel président, frappé par la crise des Gilets jaunes et à l’aube d’un possible automne social.

« J’étais à côté d’Édouard Balladur, il n’a pas cillé. Tout le monde a un peu souri. Ça nous rappelle aussi les limites du discours de 1995 », confie Manuel Valls, présent dans la rangée des anciens Premier ministres. Même dans les instants les plus solennels et douloureux, la politique n’est jamais bien loin. Surtout lorsqu’on célèbre, dixit Valls, « l’un des derniers grands monstres de la politique ».

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