Fraudes aux pass sanitaires : ‘Ils se vendent de 50 euros jusqu’à 500, voire 600 euros’ – France Inter

182.000 pass sanitaires indus ont été repérés depuis l’entrée en vigueur de la mesure, selon le chiffre dévoilé le 20 décembre par le ministère de l’Intérieur, et plus de 400 enquêtes sont en cours. Des investigations dont les données sont centralisées à la Sous-direction de la lutte contre la criminalité financière.

L'ajout de la troisième dose dans l'application TousAntiCovid.
L’ajout de la troisième dose dans l’application TousAntiCovid. © AFP / Mathieu Thomasset

C’est un chiffre vertigineux et ce n’est qu’une estimation. Le ministère de l’Intérieur a mis au jour 182.000 faux pass sanitaires ont été générés d’après le ministère de l’Intérieur. Le précédent chiffre donné par Beauvau jeudi faisait état de 110.000 faux pass sanitaires en circulation. Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin avait, selon son entourage, donné la semaine dernière instruction aux directeurs généraux de la police et de la gendarmerie d’intensifier les contrôles.

Thomas de Ricolfis dirige la Sous-direction de la lutte contre la criminalité financière, au sein de la Direction centrale de la police judiciaire. Thierry Pezennec est, quant à lui, le chef du Sirasco financier (Service d’information, de renseignement et d’analyse stratégique sur la criminalité organisée), qui dépend de la Sous-direction de la lutte contre la criminalité financière. Interrogés par France Inter, ils expliquent comment certains arrivent à délivrer des faux pass sanitaires.

FRANCE INTER : Pour quelles raisons votre service centralise-t-il les enquêtes liées aux pass sanitaires indus ? 

THOMAS DE RICOLFIS : Nous intervenons en réalité depuis le début de la crise, en mars 2020. Nous nous sommes mis en ordre de bataille pour détecter les différents types d’escroqueries liées à la crise : cela avait commencé par les escroqueries au matériel sanitaire, puis les escroqueries au chômage partiel, puis le Fonds de solidarité. Et puis, cet été, les fraudes liées aux pass sanitaires. Ceux qui fraudent ne font pas ça pour le plaisir de l’art, ils font ça pour l’argent, tout simplement. Et c’est pour cela que nous sommes compétents. Les pass sanitaires se vendent de 50 euros, jusqu’à 500, voire 600 euros, et il y a des flux financiers. Ce ne sont pas des flux très sophistiqués, parce que l’argent est utilisé très rapidement par les gens qui font ces fraudes.

Il y a également des problématiques de santé publique, nous travaillons donc avec l’OCLAESP, l’office de Gendarmerie spécialisé en santé publique, et également de manière étroite avec nos collègues de la Sécurité publique [dont dépendent les commissariats, ndlr] et la Gendarmerie nationale pour centraliser l’ensemble des informations et faire des recoupements sur les différents faits qui sont portés à notre connaissance.” 

Pour quels types de faits ?

THOMAS DE RICOLFIS : “Il y a différents types de faits : la fraude la plus simple est l’achat d’un vrai pass sanitaire auprès d’un tiers qui va vous le revendre – ou qui va le revendre à plusieurs personnes. Cela va jusqu’à des faits plus sophistiqués qui sont le détournement des comptes de certains professionnels de santé.”

Comment ces fraudes sont-elles repérées ?

THOMAS DE RICOLFIS : “Nous avons, grosso modo, trois types de signalements : soit par la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) soit par les professionnels de santé, soit par des remontées d’informations.” 

THIERRY PEZENNEC : “La CNAM peut aussi prévenir le professionnel de santé qu’il y a des validations de connexions réalisées en dehors de ses heures de travail, la nuit ou les jours fériés. Ou alors en journée, mais avec un nombre conséquent de connexions qui ne peuvent pas être justifiées par un travail légal.” 

Qui sont les personnes derrière ces fraudes? 

THIERRY PEZENNEC : “On peut avoir plusieurs types de personnes. Nous avons des gens complaisants avec les anti-vaccin. D’autres sont des opportunistes, aux stratégies plus ou moins élaborées, et qui vont utiliser les réseaux sociaux type Telegram (pour les réseaux fermés), Snapchat, TikTok et autres pour attirer des rabatteurs, chercher des clients. Ensuite, en fonction de la clientèle, ils vont pouvoir agir pour obtenir le sésame à ces clients, soit en copiant un pass existant, soit en usurpant l’identité d’un professionnel de santé en utilisant son numéro e-CPS [identifiant de la Carte de professionnel de santé] et en confirmant son code et son accès à son compte professionnel. Dans le dernier dossier conséquent, qui date d’à peu près 15 jours et traité actuellement par la police judiciaire à Angers, plus de 50.000 pass ont été émis après que l’identité d’un professionnel de santé a été usurpée.”

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