
Fin d’une journée d’élections locales en Russie, test pour le soutien à Poutine – Le Monde

Les bureaux de vote ont fermé dimanche 8 septembre à Moscou, et dans la plupart des régions de Russie, après une journée d’élections locales, qui permettront surtout de mesurer le soutien des Russes aux candidats pro-Kremlin et à Vladimir Poutine. Des élections qui interviennent après une campagne agitée et une des plus importantes opérations de répression judiciaire contre des manifestants en près de dix ans.
Ces scrutins municipaux et régionaux ont lieu dans tout le pays au lendemain d’un échange historique de 70 prisonniers entre la Russie et l’Ukraine, salué unanimement comme un premier pas vers une résolution du conflit qui oppose les deux pays depuis 2014.
Les résultats définitifs ne seront connus que lundi mais la participation s’annonce décevante dans la capitale russe, où seuls 17,2 % des électeurs s’étaient déplacés à 18 heures. Selon les analystes, les résultats du vote seront suivis de près à l’approche des élections parlementaires de 2021 et contribueront à façonner l’avenir politique de la Russie, alors que le président Vladimir Poutine entame sa troisième décennie au pouvoir.
Tous les yeux étaient rivés vers la capitale, où des manifestations quasi-hebdomadaires ont eu lieu cet été pour protester contre l’éviction de candidats de l’opposition à l’élection du Parlement local. Plusieurs milliers de manifestants ont été arrêtés au cours de ces manifestations. Dimanche, le seul incident a été l’arrestation d’une quinzaine de personnes parmi lesquels l’ex-Pussy Riot Maria Alekhina et le journaliste Ilia Azar, après une action en faveur des manifestants condamnés.
« Ce n’est pas de la démocratie »
Dans le centre et en banlieue, les moscovites étaient accueillis par des policiers en uniformes blancs, des ballons gonflables aux couleurs de la Russie, des stands de nourritures, des retraités s’arrêtant pour un thé avant ou après le vote.
L’opposant Alexeï Navalny avait appelé les électeurs à « voter intelligemment » en soutenant, faute de candidats de l’opposition libérale, les candidats en lice les mieux placés pour battre les candidats du Kremlin. La pluplart d’entre eux sont communistes. « Aujourd’hui, nous nous battons pour détruire le monopole de Russie Unie », le parti du pouvoir, a-t-il déclaré en votant.
L’avocate Lioubov Sobol, une des meneuses du mouvement de contestation après avoir été exclue de la campagne, a voté près de son domicile du sud de Moscou, accompagnée de nombreux journalistes. « Bien sûr, personne ne veut aller voter, car leurs candidats n’ont pas été autorisés à se présenter, a-t-elle déclaré aux journalistes. Ce n’est pas de la démocratie ».
Le convoi présidentiel a quant à lui traversé le centre-ville à vive allure en direction du bureau de vote de l’Académie des Sciences, où Vladimir Poutine a ses habitudes d’électeur. « Ce qui est important, ce n’est pas la quantité, c’est la qualité » des candidats, a-t-il déclaré après avoir voté, selon les agences russes.
Les candidats d’opposition emprisonnés
La ville de Moscou a fêté ce week-end son anniversaire, à grand renfort d’animations de rue et de feux d’artifice. L’occasion pour la mairie de se montrer sous son meilleur jour en organisant une fête géante sur la principale artère de Moscou, la rue Tverskaïa, à l’endroit même où, il y a quelques semaines, la police interpellait en masse des manifestants.
Pour la plupart non autorisées, ces manifestations ont donné lieu à près de 2 700 interpellations à Moscou. Du jamais vu depuis la vague de protestations de 2011-2012 qui avait précédé le retour de M. Poutine à la présidence après un mandat de premier ministre.
Les autorités ont brièvement emprisonné pratiquement tous les candidats d’opposition voulant participer au scrutin moscovite. Plusieurs manifestants ont également été condamnés à de lourdes peines, allant jusqu’à quatre ans de prison. Un homme a lui été condamné à cinq ans de prison pour un Tweet appelant à attaquer les enfants de policiers.
A Moscou, près de 7,2 millions d’électeurs étaient appelés à élire 45 députés au Parlement de la ville, dominé par le parti au pouvoir, Russie unie, et qui ne s’oppose jamais aux politiques du maire pro-Kremlin, Sergueï Sobianine.
Pas un seul candidat ne se présente toutefois officiellement sous les couleurs du parti, dont la popularité a atteint un score historiquement bas.
Plus de 5 000 élections
En tout, plus de 5 000 élections ont eu lieu dans le pays ce dimanche. Les Russes vont élire 16 gouverneurs régionaux et les parlementaires locaux de 13 régions, dont la Crimée, péninsule ukrainienne annexée par la Russie en 2014.
Les résultats provisoires dans les régions de Sakhaline et de Transbaïkalie, à l’est du pays et qui comptaient parmi les premières à voter, donnent une large avance des candidats pro-Kremlin.
A Saint-Pétersbourg notamment, la campagne a été très vive, le Kremlin soutenant l’impopulaire gouverneur par intérim, Alexandre Beglov. Le taux de participation était là aussi très faible et plusieurs mouvements d’opposition ont fait état de grossières violations électorales, interviewant des électeurs affirmant avoir été payés pour voter ou filmant en cachette des bourrages d’urne.