Fin de l’opération « Barkhane », dons de vaccins, haine en ligne : les points essentiels de la conférence de presse d’Emmanuel Macron – Le Monde

Le président de la République, Emmanuel Macron, lors de la conférence de presse sur la politique étrangère de la France, à l’Elysée, jeudi 10 juin.

A la veille d’une rencontre entre les dirigeants du G7 suivie d’un sommet de l’Organisation pour le traité de l’Atlantique Nord (OTAN), Emmanuel Macron a déroulé lors d’une conférence de presse de deux heures, jeudi 10 juin, les grands axes de sa politique étrangère.

  • Fin progressive de l’opération Barkhane au Sahel

Emmanuel Macron a déclaré, jeudi, vouloir engager une « transformation profonde » de la présence militaire française au Sahel en annonçant la « fin de l’opération Barkhane en tant qu’opération extérieure » et la mise en œuvre « d’une alliance internationale associant les Etats de la région » pour continuer la lutte contre le terrorisme et les groupes djihadistes.

« La forme de notre présence, celle d’opérations extérieures engageant plus de 5 000 hommes, maintenant depuis plusieurs années, n’est plus adaptée à la réalité des combats », a-t-il expliqué. La lutte contre le terrorisme sera faite « avec des forces spéciales structurées autour de [l’opération] “Takuba” avec, évidemment, une forte composante française – avec encore plusieurs centaines de soldats – et des forces africaines, européennes, internationales », a précisé le président de la République.

Cette décision, dont les modalités et le calendrier devraient être précisés avant la fin du mois de juin, est actée une semaine après l’annonce par Paris de la fin de sa collaboration bilatérale avec Bamako au Mali. Emmanuel Macron a, dans le même temps, qualifié d’ « erreur » et de « mauvaise jurisprudence » la décision de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) de reconnaître le colonel Assimi Goïta, investi président le 8 juin, suite au second coup d’Etat en neuf mois dans le pays.

  • Les laboratoires pharmaceutiques appelés à donner 10 % de leurs doses aux pays pauvres

Emmanuel Macron a également abordé la question de l’aide vaccinale pour lutter contre le Covid-19, notamment en Afrique. Sur le continent, qui concentre de nombreux pays parmi les plus pauvres au monde et au sein desquels l’accès aux vaccins est très limité, le président souhaite que le G7 endosse l’objectif de « 60 % d’Africains vaccinés à la fin du premier trimestre 2022 », défini par l’agence de crise de l’Union africaine. Emmanuel Macron a également avancé l’objectif d’atteindre 40 % de la population africaine vaccinée avant la fin de l’année 2021 grâce à l’aide internationale.

Les Etats ne doivent cependant pas être les seuls à être mis à contribution : pour le président français, les laboratoires pharmaceutiques doivent aussi donner des doses aux pays pauvres. « Le don de doses fait par les Etats doit être complété par un don de doses des laboratoires pharmaceutiques », à hauteur de « 10 % des doses vendues », a défendu le chef de l’Etat.

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La veille, le président américain Joe Biden avait annoncé que les Etats-Unis feraient un don de 500 millions de doses aux pays pauvres dans le cadre de l’initiative Covax d’ici la fin 2022. « S’ils sont plus ambitieux que nous [Européens], on doit rejoindre leur ambition et faire au moins autant », a-t-il lancé, tout en appelant les Etats-Unis à lever leurs restrictions à l’export de composants qui, selon lui, ont empêché la production de vaccins dans des pays tiers et constituent pour lui la priorité la plus immédiate.

Le chef de l’Etat a aussi confirmé qu’il soutenait la proposition de l’Inde et de l’Afrique du Sud d’une suspension temporaire des brevets sur les vaccins, le temps de la crise, ce dont s’est réjouie l’ONG Oxfam. Selon lui, il est nécessaire de s’engager « à l’Organisation mondiale de la santé, à l’Organisation mondiale du commerce, pour garantir que la propriété intellectuelle ne sera jamais un obstacle à l’accès aux vaccins ».

  • Emmanuel Macron rencontrera Recep Tayyip Erdogan lundi

Le chef de l’Etat a annoncé qu’une rencontre bilatérale allait avoir lieu avec son homologue turc juste avant le sommet de l’Otan qui doit débuter, lundi, à Bruxelles. « Nous l’avons souhaité l’un et l’autre. Je pense que c’est une bonne chose, nous avons besoin de nous voir et d’échanger », a commenté Emmanuel Macron. Nous avons mené parfois des controverses, et nous les assumons, mais quels que soient les désaccords, on doit toujours se parler. »

Les relations entre les deux pays se sont aussi fortement dégradées en raison de désaccords sur la Syrie, la Libye et plus récemment sur le conflit entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie au Haut-Karabakh. En octobre, Recep Tayyip Erdogan avait mis en cause la « santé mentale » de son homologue français, l’accusant de mener une « campagne de haine » contre l’islam, parce qu’il avait défendu le droit de caricaturer le prophète Mahomet et pour son discours contre le « séparatisme » islamiste en France.

  • Haine en ligne : « Nous sommes en train de bâtir le pire »

Emmanuel Macron a enfin exploité les questions posées sur la gifle qu’il a reçue à Tain-l’Hermitage (Drôme), mardi 8 juin, pour laquelle son auteur a été condamné, jeudi, à une peine de quatre mois de prison ferme. Ne souhaitant pas « exagérer la portée de cet acte », le président de la République a tout de même rappelé que « la violence à l’égard de celles et ceux qui sont dépositaires de l’autorité publique, soit parce qu’ils sont fonctionnaires ou élus de la République, est inacceptable », avant de poursuivre : « la haine, la violence civile, se justifient à l’égard des dirigeants, quand on ne peut pas les changer ou infléchir leurs décisions. Cela n’est pas le cas de la France. »

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Lors d’une séquence consacrée à la régulation d’internet, Emmanuel Macron a abordé le sujet d’un nécessaire cadre international qui « permettrait de lutter contre un ensauvagement des esprits et de la communication et donc, d’un ensauvagement de notre nouvel ordre public mondial. » Sur la question de la haine en ligne, le président a fait savoir que des « transformations en profondeur du capitalisme et de l’économie de marché international » devaient avoir lieu afin de « calmer la racine de la colère, qui est ce sentiment d’injustice ».

Selon lui, « l’utilisation des réseaux sociaux menace par leur fonctionnement, notre vie démocratique ». Avant de mettre en garde : « il ne faut pas s’étonner que des gens, lorsqu’ils sont dans la rue, se mettent à avoir le même comportement qu’ils ont des heures durant lorsqu’ils sont derrière ou sur leur téléphone. Nous sommes en train de rebâtir le pire. »

Le Monde

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