Féminicide de Julie Douib : son ex-compagnon condamné en appel à la réclusion criminelle à perpétuité – Le Monde

La famille de Julie Douib lors du dernier jour du procès en appel de Bruno Garcia-Cruciani, à Ajaccio, le 20 janvier 2023.

Le verdict est le même que celui prononcé en première instance : la cour d’assises d’appel de Corse-du-Sud a condamné, vendredi 27 janvier, Bruno Garcia-Cruciani à la réclusion criminelle à perpétuité pour le meurtre, en 2019, de son ex-compagne et mère de ses enfants, Julie Douib. « La cour vous condamne à la majorité de huit voix au moins à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une peine de sûreté de vingt-deux ans », a déclaré la présidente à Bruno Garcia-Cruciani.

Reconnu coupable d’assassinat, cet homme de 46 ans a également fait l’objet d’un « retrait total de l’autorité parentale » sur ses deux fils de 12 et 14 ans, qu’il avait eus avec Julie Douib, tuée à l’âge de 34 ans, la cour estimant que l’accusé « privilégie son intérêt à celui de ses enfants ». M. Garcia-Cruciani est aussi condamné à payer 10 000 euros à la famille Douib. Il a cinq jours pour se pourvoir en cassation.

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A l’énoncé du verdict, celui qui avait prononcé des mots d’excuses avant que les jurés ne partent délibérer est resté imperturbable dans le box. La famille Douib a, elle, laissé poindre son soulagement.

« Exécution pure et simple »

Pour Jordan Douib, le frère de Julie, ces décisions « rendent aux enfants le droit de choisir ». « Ça va épargner des souffrances à mes parents, ils vont pouvoir se concentrer à aimer ces enfants », a-t-il confié aux médias. « Ils vont pouvoir enfin dire ouf ! », a déclaré, soulagée, Violetta Douib, la mère de Julie.

Cette condamnation correspond aux réquisitions de Catherine Levy, l’avocate générale, et au verdict de première instance. « C’est une exécution pure et simple », avait martelé la magistrate, rappelant qu’il « a traqué » la jeune femme de 34 ans avant de la tuer par balle le 3 mars 2019 à l’Ile Rousse, en Corse. « Le seul fait de se présenter à la porte de quelqu’un avec une arme chargée constitue la préméditation », avait-elle également insisté.

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Pour la défense, Me Gilles Antomarchi et Me Jean-Paul Eon ont nié la préméditation, défendant la thèse d’un premier tir accidentel tout en concédant un deuxième tir volontaire mais « pas d’exécution ». « Je n’y suis pas allé pour enlever la vie de Julie », avait répété l’accusé. Quant à la peine de perpétuité requise, « c’est la peine des tueurs en série », s’est indigné Me Antomarchi.

L’avocate générale a de son côté rappelé les menaces de mort proférées par l’accusé lors de sa détention après la mort de Julie Douib, contre des amies de la jeune femme, un entraîneur de sport qu’elle fréquentait et son père. « Rien ne l’arrête, même en détention », a résumé Mme Levy. Pour ses avocats, sa violence était imputable à sa consommation d’anabolisants stéroïdiens. Ils ont demandé aux jurés, en vain, de retenir « une abolition du discernement ».

« Je demande pardon »

Plus tôt, Me Francesca Seatelli, avocate des deux fils du couple, avait appelé la cour à les « protéger de leur père », décrivant des garçons « terrifiés à l’idée qu’il sorte de prison et vienne les chercher ». Bruno Garcia-Cruciani, « un homme dangereux », a « constamment utilisé » ses enfants « comme un propriétaire » et a fait d’eux « à perpétuité des fils d’assassin, à jamais des orphelins », a-t-elle asséné.

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« Je voudrais avoir un mot pour Julie », a dit vendredi soir Bruno Garcia-Cruciani avant que la cour ne se retire. « J’ai enlevé la vie de Julie », « la mère de mes enfants » et « je demande pardon », « je m’en excuse ». Il a également « demandé pardon à la famille Douib ». Quant à ses enfants, il a affirmé à la cour : « Je les laisserai jamais ».

Ce procès d’un « féminicide devenu symbole » a montré, selon un des avocats de la famille Douib, Jean-Sébastien de Casalta, un accusé « voleur de vie », « voleur de rêves », « voleur d’amour ».

Electrochoc social, ce crime, le trentième féminicide sur 149 en 2019 en France, avait entraîné l’organisation par le gouvernement d’un « Grenelle » sur les violences faites aux femmes.

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Le Monde avec AFP

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