Féminicide à Paris : le policier suspecté du meurtre s’est rendu dans le Var – Le Parisien

Plus de trois semaines après le décès d’Amanda Glain, à Paris (XIXe), son compagnon et meurtrier présumé, Arnaud Bonnefoy, a été placé en garde à vue par les gendarmes de Montmeyan (Var). Selon nos informations, il s’est constitué prisonnier ce mardi en se présentant volontairement dans cette brigade. Les enquêteurs du deuxième district de la police judiciaire de Paris vont se rendre dans le Sud pour gérer les auditions. Arnaud Bonnefoy devra s’expliquer sur les circonstances du drame mais aussi sur ses faits et gestes durant sa cavale.

C’est dans la nuit du samedi 29 janvier, à Paris (XIXe), vers 20h55, que le corps de cette jeune femme blonde de 28 ans est découvert dans le logement du gardien de la paix. L’homme de 29 ans, affecté au commissariat du Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis), avait envoyé en milieu de journée un SMS à son responsable hiérarchique pour prévenir qu’il ne viendrait pas travailler. Une situation inquiétante, car le policier est connu pour avoir des tendances suicidaires.

Du désordre et des bouteilles d’alcool

Une patrouille se rend alors à son domicile, rue David-d’Angers, une petite artère située à une centaine de mètres du métro Danube. Le fonctionnaire occupait un logement dans cette résidence de l’administration qui n’est habitée que par des policiers de passage. Les forces de l’ordre frappent à la porte de l’appartement.

Devant l’absence de réponse, c’est la gardienne qui leur ouvre la porte. Arnaud n’est pas là. Dans la salle de bains, les policiers trouvent le corps d’une femme, gisant la tête dans le bac de douche. Ils relèvent que l’appartement est en désordre et mettent la main sur des bouteilles d’alcool. L’autopsie révélera que la victime a sans doute été étranglée dans la nuit précédente ou dans la matinée de vendredi.

Son portable coupé rue de Crimée

Les enquêteurs découvrent que le suspect s’est enfui, avec son arme de service, au volant de sa vieille Peugeot 208 blanche, dont l’aile tient avec de l’adhésif. Son portable est traqué, mais il a été coupé le vendredi matin, rue de Crimée. Dans le quartier, les riverains qui le connaissaient décrivent un homme un peu renfermé.

Arnaud Bonnefoy est entré dans la police en 2012. Il avait déjà été placé en garde à vue en octobre 2019 pour des violences sur sa compagne de l’époque avant d’être condamné à une peine alternative aux poursuites. Le jeune homme avait suivi un stage de sensibilisation aux violences conjugales. Sur le plan administratif, il avait été sanctionné d’un simple avertissement.

Il a également fait l’objet d’un « suivi social », assuré par des psychologues, des assistantes sociales et des médecins de prévention. Par ailleurs, le 17 juin, le suspect « avait sollicité l’intervention de la police pour un différend avec sa compagne, qui se serait montrée violente avec lui. Il présentait un visage tuméfié ». Amanda aurait saisi l’occasion pour dénoncer des violences régulières dont elle était la victime. Mais aucune plainte, d’un côté comme de l’autre, n’avait été déposée.

Comme de nombreux jeunes actifs, Amanda avait des difficultés à trouver un premier emploi stable et continuait à vivre au domicile de ses parents aux Clayes-sous-Bois. La jeune femme a grandi dans les Yvelines. Elle avait terminé un cursus dans une école d’art parisienne et se destinait au métier de graphiste. « C’était une artiste, résume son frère, Charlie, rencontré à l’entrée de leur maison. Elle avait beaucoup de talent. Ma sœur était une fille passionnée de tout. Une jeune femme incroyable. Il faut que tout le monde le sache. »

Amanda Glain avait 28 ans lorsqu'elle a été tuée.
Amanda Glain avait 28 ans lorsqu’elle a été tuée. DR

Elle animait un site Web qu’elle avait construit entièrement seule. Elle y donnait son avis sur tous les sujets : cuisine, cinéma, la vie parisienne et même sur l’amour… L’un de ses posts sur les relations toxiques est tristement éclairant, et peut-être prémonitoire. « Selon mon expérience personnelle, entrer dans une relation toxique peut arriver très vite et sans que l’on ne s’en rende compte, écrit Amanda. J’ai été longtemps avec une personne toxique, aussi bien pour moi, pour ses proches et pour lui-même. Des fois, cela frôlait la démence. »

Un retrait au distributeur et un appel à témoins

Compte tenu de ses antécédents psychologiques, les forces de l’ordre s’attendaient à découvrir le cadavre d’Arnaud Bonnefoy. « Il y a même un policier médium qui a contacté les enquêteurs pour leur confier que le suspect s’était pendu dans une forêt de Méru, dans l’Oise », remarque une source proche du dossier.

Mais, le 9 février, la situation change, car une preuve de vie vient relancer les investigations. Le gardien de la paix soupçonné de meurtre a retiré 1 500 euros dans un distributeur de Breteuil (Oise). Le lendemain, la préfecture de police lance un premier appel à témoins dans la presse montrant sa voiture et son visage. L’initiative paye.

Le 11 février, un riverain découvre sa Peugeot 208 et son arme de service sur le parking du Burger King d’Amiens (Somme). Les forces de l’ordre se cachent à proximité et attendent durant plusieurs heures. En vain, Arnaud Bonnefoy ne se montre pas. Le 18 février, son père publie une vidéo dans laquelle il lui demande de se rendre. « Fais-le pour Amanda, pour sa famille, ils ont besoin de savoir. Je suis ton père et tu seras toujours mon fils. Mais, maintenant, il est temps de tout arrêter », assure cet homme à l’accent du Sud.

Un appel qui aura été payant puisque son fils a entendu la voix de la raison. Il aurait téléphoné à la gendarmerie pour annoncer son arrivée après avoir rendu visite à son père. Lors de ses auditions qui pourront durer quarante-huit heures, le policier devra s’expliquer sur les circonstances de la mort d’Amanda. Se sont-ils à nouveau battus ? Voulait-elle le quitter ? Il sera ensuite déféré devant la juge parisienne en vue d’une mise en examen.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *