Etudiants, hôpitaux, retraites : Macron est-il en train de jouer son quinquennat? – Le Journal du dimanche

Le moment de vérité pour Emmanuel Macron devait avoir lieu en décembre, avec le début de la grève reconductible à la SNCF et à la RATP contre la réforme des retraites. Il pourrait arriver un peu plus tôt. L’exécutif est confronté à un début d’étincelle sociale aux urgences, dans les universités ou à l’occasion du premier anniversaire du mouvement des Gilets jaunes. Dans les facultés, le mouvement a débuté après l’immolation par le feu d’un étudiant en difficulté financière. Aux urgences, c’est l’ensemble des personnels soignants qui demandent davantage de moyens et d’effectifs pour l’hôpital public. “Le risque, c’est la contagion, la coagulation”, estime un proche du Président dans Le Figaro. Jeudi, Emmanuel Macron a annoncé des “décisions fortes” sur l’hôpital qui seront dévoilées mercredi prochain.

Au gouvernement, on surveille comme le lait sur le feu ce début de contestation à quelques jours du 5 décembre, date du début des grèves dans les transports publics. “Je viens souvent vous voir en vous disant que ça va tanguer. Cela a parfois tangué, parfois pas du tout. Mais ce n’est rien en comparaison de ce que l’on peut craindre avec la réforme des retraites. Cela va être sportif”, a lancé Edouard Philippe la semaine dernière aux députés de la majorité, selon le compte-rendu du Monde

Les retraites, un test pour Emmanuel Macron

Le projet de loi sur les retraites n’est pas encore connu dans ses détails mais les syndicats cherchent à mettre la pression sur le gouvernement avant une éventuelle présentation en Conseil des ministres. Pour Emmanuel Macron, ce qui est en jeu c’est sa capacité à réformer. Élu sur une promesse de transformation du pays, le chef de l’Etat a d’abord voulu très vite changer les choses (suppression de l’ISF, réforme du code du travail, réforme de la SNCF) avant d’être rattrapé par la crise des Gilets jaunes. 

Depuis début 2019, le rythme des réformes s’est ralenti. Le gouvernement s’est engagé dans un acte 2 du quinquennat, censé favoriser le dialogue avec les corps intermédiaires. Signe de cette nouvelle prudence, l’exécutif a par exemple décidé de temporiser sur le sujet explosif du travail de nuit dans les commerces alimentaires. Un article de loi devait permettre aux supermarchés et autres supérettes d’ouvrir de 21h à minuit en bénéficiant de dérogations aux règles du travail de nuit accordées à des secteurs comme le spectacle, le cinéma ou les discothèques. Il a finalement été retiré à la veille de sa présentation en Conseil des ministres.

La réforme des retraites sera en tout cas un nouveau test pour le chef de l’Etat, à deux ans de la présidentielle. Pour le moment, le chef de l’Etat est dans une situation plutôt favorable, malgré sa relative impopularité. Si la présidentielle avait lieu aujourd’hui, Emmanuel Macron et Marine Le Pen seraient largement en tête au premier tour, loin devant Jean-Luc Mélenchon. Au second tour, le président de la République recueillerait 55% des intentions de vote (-2 points par rapport à mai, -11 points/2017), contre 45% à la cheffe du parti d’extrême droite.

L’atout de la clause du “grand-père”

Les grèves de décembre pourraient toutefois tout changer. Surtout si le gouvernement se voit obligé de retirer son projet ou si la contestation s’enlise dans le temps. “Je suis là pour continuer à transformer le pays […] Je ne veux pas avancer dans la division mais pas au prix de l’inaction”, a expliqué jeudi Emmanuel Macron. Un éventuel échec risquerait de mettre en péril la crédibilité politique d’Emmanuel Macron, lui qui avait promis de réaliser la réforme des retraites durant la campagne de 2017. C’est pourquoi l’exécutif garde dans sa manche la clause du “grand-père” qui pourrait permettre de faire adopter le “système universel” voulu par le chef de l’Etat censé remplacer les 42 régimes existants.

La “clause du grand-père” consisterait à n’appliquer la réforme qu’aux jeunes qui entreront sur le marché du travail après le vote de la loi, prévu en juillet 2020, voire après son entrée en vigueur envisagée en 2025.

Un stratagème déjà utilisé dans la loi ferroviaire de 2018, qui a supprimé le statut de cheminot pour ceux qui seront embauchés à compter du 1er janvier 2020. Mais tout le monde n’est pas sur la même longueur d’onde au gouvernement. Le Haut commissaire aux retraites Jean-Paul Delevoye s’est opposé publiquement à cette mesure avant de se faire recadrer par Matignon.

En cas d’échec sur les retraites, Emmanuel Macron pourra toujours se rappeler que beaucoup d’observateurs l’avaient enterré politiquement après la crise des Gilets jaunes. En décembre 2018, la popularité du chef de l’Etat était ainsi tombée à son plus bas (24%). Mais, il avait réussi à se relancer avec le Grand débat, prenant 11 points en 10 mois.

Leave a Reply

Discover more from Ultimatepocket

Subscribe now to keep reading and get access to the full archive.

Continue reading