«Et si Rachida Dati nous débarrassait d’Anne Hidalgo?» – Le Figaro

Philippe Bilger est magistrat honoraire et président de l’Institut de la parole. Il est également l’auteur duMur des Cons(Albin Michel, 2019).

À Paris, un sondage place pour la première fois Rachida Dati en tête avec 25 %, devant Anne Hidalgo à 23 % et Agnès Buzyn qui fait à peine mieux que Benjamin Griveaux dont elle a d’ailleurs annoncé qu’une bonne part de son projet municipal ne lui convenait pas.

Si les choses demeurent en l’état, il faudra s’interroger sur la fausse bonne idée qu’aura été l’arrivée de l’ex-ministre dans cette joute pour suppléer en catastrophe un candidat contraint de l’abandonner. On ne peut pas impunément dire tout et son contraire, se déclarer attachée à son ministère puis le quitter sous la pression du président, pleurer lors de la passation à Olivier Véran et affirmer «qu’on n’a peur de rien» et qu’on «sent cette ville à 100 %». Il y a dans la société, à Paris ou ailleurs, une répugnance à l’égard de ce qui ostensiblement relève d’anciennes pratiques. Où les engagements sont secondaires par rapport aux opportunités, où les tactiques l’emportent sur les convictions.

Cette détestation civique, d’ailleurs, n’est pas loin paradoxalement de favoriser Rachida Dati dont les adversaires la servent plus qu’ils ne lui nuisent. Le second tour, dans tous les cas, ne sera pas pour elle une partie de plaisir, et de mauvais augures ne lui prédisent pas la moindre chance. On a moqué sa candidature dès qu’elle l’a annoncée et par conséquent on n’est plus à une surprise ou à un miracle près en ce qui la concerne.

Rachida Dati est d’abord une formidable candidate, une battante d’exception dont les vertus sont décuplées quand on doute d’elle.

N’ayant jamais dissimulé ma pensée à l’égard de son action ministérielle – ombres et lumières composant un paysage qui aurait mérité mieux, mais remarquable si on se réfère à Michèle Alliot-Marie qui l’a suivie – je n’en suis que plus à l’aise pour souligner que l’erreur serait d’oublier que Rachida Dati est d’abord une formidable candidate, une battante d’exception dont les vertus sont décuplées quand on doute d’elle et dont l’espoir de victoire est stimulé par les grincheux qui sèment avec sadisme des obstacles sur son parcours.

Ces derniers se reconnaîtront et ne pourront plus invoquer, sans mauvaise conscience, un futur où l’alliance avec LREM demeurerait la panacée et le salut. Rachida Dati ne peut que se sentir confortée dans son invocation au rassemblement qui ne doit pas exclure tristement certains de ses soutiens tentés par une dissidence absurde.

Alors que ce qui se déroule à Paris montre la justesse de l’analyse de Rachida Dati: une force politique qui avant l’heure se livre devient d’une insigne faiblesse, alors qu’elle se renforce quand elle proclame son identité et sa capacité à y demeurer fidèle.

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Municipales: Dati s’en prend à Hidalgo sur la place de la voiture à Paris – Regarder sur Figaro Live

Que Rachida Dati soit clivante n’est pas une appréciation bouleversante d’originalité. Mais si l’alternative ne nous est laissée qu’entre un consensus tiède et une bataille risquée mais gagnable, le choix est vite fait.

Il était important de se recentrer sur les « basiques  » fondamentaux et déplorables qui devraient objectivement disqualifier Anne Hidalgo : saleté, sécurité et circulation.

J’oublie à dessein l’essentiel. C’est un changement de cap que cette relégation d’Anne Hidalgo, qui semblait installée dans un essor moins dû à son bilan que longtemps à l’opposition médiocre d’en face. Il était important de se recentrer sur les «basiques» fondamentaux et déplorables qui dans l’exercice de son mandat devraient objectivement la disqualifier: saleté, insécurité et embouteillages. Pour ne mentionner que ces graves carences. Je ne suis pas persuadé que les mesures idéologiques ou démagogiques qu’elle croit nous offrir mais dont elle nous menace lui garantiront un avenir électoral plus rassurant. Il serait aberrant qu’une maire globalement vilipendée soit récompensée par une réélection! Certes il y a de l’ironie en politique mais il ne faudrait pas en abuser. Anne Hidalgo est la plus sûre et paradoxale alliée de Rachida Dati à cause du pire dont on l’accable à juste titre.

Paris peut devenir la première marche, dans les élections municipales, pour faire perdre à LREM une forme d’arrogance dont elle a l’habitude depuis 2017.

Rien n’est gagné mais Paris peut devenir la première marche, dans les élections municipales, pour faire perdre à LREM une forme d’arrogance et lui enseigner une modestie dont depuis 2017 elle avait perdu l’habitude. Certes toujours un ancien monde mais dont les maîtres auraient changé.

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