Eric Dupond-Moretti : « Les procès en laxisme sont intentés par les populistes extrémistes » – Le Monde

Eric Dupond-Moretti dans son bureau du ministère de la justice à Paris, le 12 avril.

Neuf mois après sa nomination comme garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti devait présenter, mercredi 14 avril, « sa » loi au conseil des ministres. A cette occasion, il dénonce « l’interprétation obstinément manichéenne ou politicienne » du thème de la sécurité et rejette les accusations de laxisme adressées à la justice. Le ministre veut peser sur la réorganisation de la police judiciaire que compte mener son collègue de l’intérieur, Gérald Darmanin.

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Vous présentez le 14 avril votre projet de loi pour la « confiance dans l’institution judiciaire ». Qu’est-ce qui, selon vous, a ébranlé cette confiance ?

Mon sentiment se fonde sur l’étude du Cevipof de février selon laquelle plus de 50 % des Français n’ont pas confiance dans la justice. Ils disent qu’elle est trop lente, que le taux de réponse pénale n’est pas satisfaisant. Mais souvent ils ne savent pas ce que fait la justice. Alors je dis aux magistrats, communiquons ! Dites ce que vous faites, comment vous le faites. La possibilité de filmer des procès s’inscrit dans cette idée. Les Français ne doivent pas découvrir la justice que quand ils y sont confrontés. Faire connaître la justice, c’est aussi renouer un lien de confiance. Et cela obligera Marine Le Pen [la présidente du Rassemblement national] à ne plus dire n’importe quoi sur la justice et son fonctionnement.

Les Français sont moins sévères vis-à-vis de la justice que des partis politiques.

Et alors ? C’est de la justice dont je suis le ministre…

Vous ne répondez pas, dans votre projet, au reproche de laxisme envers la justice, à un moment où le thème de la sécurité est omniprésent.

J’ai répondu quinze fois à cette question en disant qu’elle ne l’était pas. Ce qui me chagrine, c’est l’interprétation obstinément manichéenne ou politicienne de ce thème. La justice est un jour trop laxiste, un jour trop répressive, le garde des sceaux étant Taubira en pire ou qui sais-je en mieux. Mais ce n’est pas le ministre de la justice qui dicte les peines !

Les procès en « laxisme » sont intentés par les populistes extrémistes. Ils utilisent la défiance grandissante des Français envers leur justice et profitent du déficit de connaissance du milieu judiciaire pour politiser des décisions rendues.

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Les syndicats de policiers, aussi, évoquent une justice faible face à la délinquance…

Ce n’est pas vrai. Je constate que les peines prononcées en France sont de plus en plus lourdes depuis des années. C’est un fait. Je rappelle aussi que pour les crimes jugés aux assises, c’est le peuple qui au travers des jurés décide de la peine. Et les jurés, je le sais d’expérience, ne voient plus la justice de la même façon après. Ils savent à quel point il est plus difficile de définir une peine dans un délibéré de cour d’assises qu’au Café du Commerce. C’est pour cela que j’ai un attachement viscéral et charnel pour la cour d’assises.

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