ENTRETIEN. Double assassinat de deux professeurs à Pouyastruc : Jean-Romain Pardon, le frère d’Aurélie : “Je n – LaDepeche.fr

l’essentiel Six mois après le double assassinat de deux professeurs à Pouyastruc, Aurélie Pardon et Gabriel Fourmigué, le frère d’Aurélie, Jean-Romain Pardon, sort de sa réserve pour que l’affaire ne tombe pas dans l’oubli. Persuadé que l’auteur présumé du crime, son ex-beau frère Cédric Tauleygne, ne s’est pas suicidé, il revient sur les semaines qui ont précédé le drame. Interview.

Jean-Romain, six mois après la mort de votre sœur Aurélie et la fuite de votre ex-beau frère Cédric Tauleygne, suspecté d’être l’auteur de ce double assassinat, vous mobilisez les médias alors que jusqu’à présent, vous aviez préféré rester en retrait. Pourquoi ce choix?

Lorsque nous avons perdu Aurélie, c’est comme si un tsunami avait tout emporté. Il y avait de la tristesse et de la colère, mais surtout la peur que Cédric revienne “finir le travail” et s’en prenne à ma nièce et à mon neveu. Nous avions placé toute notre confiance en la justice et aux services d’enquête pour qu’il soit arrêté. Mais aujourd’hui, nous avons le sentiment que plus rien n’est fait pour le localiser. Nous ne voulons pas que les morts d’Aurélie et Gaby tombent dans les oubliettes. Nous avons récemment rencontré la juge d’instruction en charge de l’enquête, et sommes ressortis de son bureau démunis, avec des éléments contradictoires. Je suis moi-même policier, et cela est très frustrant de voir que l’on apporte des éléments, et d’avoir l’impression que rien n’est vérifié. Nous ne comprenons pas pourquoi des recherches ne sont pas menées au-delà de l’Espagne car le connaissant, il n’est pas resté là-bas bien longtemps.

Vous êtes persuadé que Tauleygne est toujours en vie. Pourquoi cette conviction?

Quelques jours après le drame, nous avons demandé aux autorités de pouvoir accéder à la maison d’Aurélie et Cédric placée sous scellés, pour y récupérer les affaires et les vêtements des petits. Nous nous sommes alors rendu compte que le frigo, le congélateur, et la réserve étaient pleins à craquer. Jamais de telles courses n’avaient été faites auparavant. Il y avait de quoi tenir pour plusieurs semaines. Le ménage avait été fait en grand, les haies taillées, la pelouse tondue. Comme si Cédric avait voulu donner une image parfaite des lieux, et de lui. Mais surtout, il n’y avait plus aucune affaire d’Aurélie et des enfants dans la maison. Il a tout jeté! Deux de ses armes ont disparu. Un silencieux et un Glock.

Puis la juge d’instruction nous a confirmé qu’il a été aperçu en train de boire des bières avant d’arriver dans la région de Jaca. Il n’est pas passé par le tunnel du Somport, mais a emprunté des petits axes routiers pour gagner l’Espagne. Il connaissait parfaitement la région aragonaise puisque chaque année, il passait un mois de vacances chez son oncle à Sainte-Engrace au Pays basque. De là, il partait tous les jours faire des centaines de kilomètres à vélo, souvent vers Jaca. Il a pu facilement y cacher de l’argent dans les semaines précédentes.

Selon vous, Cédric Tauleygne a-t-il les moyens de financer une cavale et a-t-il pu bénéficier de complicité?

Nous ne savons pas s’il a bénéficié de complicité, mais un de ses proches a eu un comportement suspect envers nous les jours suivant la mort d’Aurélie. Il nous a posé des questions insistantes et précises, notamment sur les enfants. Il passait constamment à la maison alors que nous étions dans la douleur. Tant et si bien que j’ai explicitement demandé aux gendarmes à ce que cette personne ne soit pas présente aux obsèques de ma sœur.

Peut-être Cédric est-il simplement parti en Afrique. Vous savez, lorsque vous avez ne serait-ce que 10 000 euros en liquide, ce n’est pas compliqué de trouver une personne qui vous fait passer de l’Europe vers d’Afrique. Le trajet inverse est par contre est bien plus cher et moins aisé.

Il gagnait très bien sa vie  et touchait environ 5 000 euros mensuels. Ma sœur était propriétaire de la maison et du terrain à Barbazan-Dessus, il économisait beaucoup. Lorsque Aurélie et lui sont passés devant le notaire pour la procédure de divorce, il a  attesté qu’il avait 150 000 euros de côté. Quand le notaire lui a expliqué qu’il allait devoir en donner la moitié à ma sœur, il était furieux. Elle ne voulait rien. Elle voulait même lui laisser la maison pour ne pas avoir d’histoires avec lui.

La jalousie ne serait donc pas le seul mobile de Tauleygne?

C’est un ensemble de chose. Aurélie avait décidé de le quitter plusieurs mois avant le drame. Il ne l’acceptait pas. Parce qu’il était extrêmement possessif et jaloux oui. Mais aussi parce qu’il allait tout perdre. De plus, il ne s’est jamais occupé des enfants, et la garde alternée aurait été un fardeau pour lui. Je l’ai eu au téléphone à plusieurs reprises à cette période. Il voulait la reconquérir à tout prix, mais elle voulait reprendre sa liberté. Elle a dormi sur le canapé pendant des mois jusqu’à ce que mes parents lui disent de s’installer chez eux. C’était trois semaines avant le crime. C’est là que les choses sont montées en pression avec Cédric.

Aurélie a-t-elle exprimé un sentiment de peur à cette période?

Le week-end avant sa mort, Aurélie assistait au mariage de sa meilleure amie. À cette occasion, elle a confié que Cédric la suivait à moto et lui faisait des crises. Elle venait de se rapprocher de Gabby et avait des sentiments naissants pour lui. Elle rayonnait. Le lendemain, elle a récupéré le petit. Cédric lui avait rasé la tête. Le lendemain, il l’a à nouveau suivie mais pour mettre son plan à exécution.

Depuis le drame, vos parents s’occupent des enfants d’Aurélie. Comment vivent-ils la disparition de leurs parents?

Nous avons suivi les conseils de psychologues pour leur expliquer la situation. Ma nièce qui a bientôt six ans posait beaucoup de questions. Mais depuis que nous lui avons dit la vérité, elle ne demande plus rien. Lorsque son petit frère regarde les étoiles, il dit que maman est l’étoile du Berger. Il est trop petit et ne gardera pas de souvenirs de son père. Mais nous pensons que la grande cherchera à savoir où il est.

Quel souvenir gardez-vous de votre sœur Aurélie?

Nous étions fusionnels. Elle était solaire, et impliquée dans son travail. Ce qui me soulage, c’est de savoir que les dernières semaines de sa vie ont été heureuses. Elle se faisait belle, sortait, profitait de la vie. Comme un oiseau qui sortait de sa cage. C’est ça qu’il n’a pas supporté.

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