En Biélorussie, la bravoure de l’opposante Kolesnikova met en lumière les méthodes du régime Loukachenko – Le Monde

L’opposante Maria Kolesnikova lors d’une manifestation à Minsk, le 30 août.

Sa confession n’a dupé personne. Alexandre Loukachenko a déjà démontré à maintes reprises qu’il était l’un des meilleurs apôtres de l’ère de la post-vérité. Mais l’aveu de l’autocrate biélorusse lâchant, mardi 8 septembre, aux grands médias publiques russes « Je suis peut-être resté [au pouvoir] un peu trop longtemps », aurait pu faire frissonner la foule qui réclame son départ depuis l’élection présidentielle du 9 août. Le frisson fut bref. Aux quatre journalistes dévoués au Kremlin, dont la célèbre patronne de Russia Today Margarita Simonian, le chef d’Etat a vite ajouté : « je ne vais pas partir comme ça. J’ai bâti la Biélorussie pendant un quart de siècle, je ne vais pas abandonner ». « De plus, a-t-il assuré, si je pars, mes soutiens seront massacrés ».

« Batka », (papa) comme il aime à se faire appeler a aussi promis une réforme constitutionnelle et la tenue d’élections présidentielles anticipées. « Des mensonges bien sûr ! », commente l’analyste politique Andrei Yeliseyeu. « Alexandre Loukachenko lance des promesses creuses pour tenter de calmer la population et la faire patienter », estime-t-il.

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La colère des Biélorusses a, de fait, franchi un nouveau cap dans la journée de mardi après le rocambolesque enlèvement et la tentative ratée d’expulsion de l’opposante Maria Kolesnikova, 38 ans. Membre du présidium du conseil de coordination, organisation créée mi-août pour tenter de gérer une transition pacifique du pouvoir, la trentenaire avait été kidnappée dans le centre de Minsk la veille, avant de réapparaître quelques heures plus tard à la frontière ukrainienne où elle a été arrêtée par les gardes-frontières.

Passeport déchiré

Maria Kolesnikova ainsi que deux de ses collaborateurs au sein du conseil de coordination, Anton Rodnenkov et Ivan Kravtsov, avait été conduits par les services spéciaux biélorusses à la frontière. Transportés dans diverses administrations, menottés et un sac sur la tête, ils ont été interrogés et menacés de poursuites judiciaires avant de se voir proposer de quitter le pays. Mais alors que MM. Rodnenkov et Kravtsov, optant pour l’exil forcé, traversaient la ligne les amenant en Ukraine, Maria Kolesnikova décide de déchirer son passeport et s’extirpe par la fenêtre de la voiture la menant à la frontière. « Elle criait qu’elle n’irait nulle part », ont raconté depuis Kiev dans la soirée de mardi les deux collaborateurs qui étaient à ses côtés. « Ce qui les intéressait, c’était le transport de Maria Kolesnikova hors des frontières. Ils l’expliquaient par la nécessité d’une désescalade de la situation », a expliqué Ivan Kravtsov.

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