Emmanuel Macron demande « pardon » aux harkis en reconnaissant leur « singularité dans l’histoire de France » – Le Monde

Emmanuel Macron, lors d’une cérémonie d’hommage aux harkis, à l’Elysée, le 20 septembre 2021.

Il y a ce silence, lourd de sens, qui accompagne l’entrée du chef de l’Etat dans la salle des fêtes de l’Elysée. Un silence chargé de douleurs, de méfiance, de colère mais aussi d’espoir. Un silence qui rappelle que la guerre d’Algérie et ses conséquences tourmentent encore tant d’esprits. Lundi 20 septembre, cinq jours avant la journée d’hommage qui leur est consacrée, Emmanuel Macron a tenu à apaiser les souffrances des harkis et de leurs descendants, en les recevant avec honneur dans ce lieu symbolique. C’est au cœur du palais de la République qu’il a choisi de leur dire « pardon ».

Mais, avant d’entendre ce mot, les quelque 120 invités se demandaient ce que le président de la République allait leur annoncer. Que pouvait-il bien raconter à ces supplétifs engagés dans l’armée française qui ont été abandonnés avec leurs familles par l’Etat au lendemain de la fin du conflit, en 1962 ? Avant de prendre la parole, Emmanuel Macron a tenu à les écouter, en permettant à quatre d’entre eux de raconter leur histoire, qui « reste trop mal connue des Français ».

On peut retenir le discours tout en puissance de la journaliste Dalila Kerchouche. L’autrice de Mon père, ce harki (Seuil, 2003) décrit son enfance dans les camps où ont été enfermées des milliers de familles à leur arrivée en France, il y a près de soixante ans. « Ma famille est sortie du camp en 1974. Traumatisée, marginalisée et meurtrie à jamais, raconte-t-elle devant le chef de l’Etat. Rien ne me rendra mon frère, qui s’est suicidé à 35 ans parce qu’il a passé toute son enfance derrière les barbelés du camp de Bias [en Lot-et-Garonne]. »

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Mme Kerchouche regrette que ses parents, récemment morts, soient « partis sans savoir pourquoi ils ont été enfermés si longtemps derrière des barbelés ». « Ce drame souille notre démocratie. Le drame des harkis est irréparable », a-t-elle ajouté, avant de conclure qu’il faut désormais « réparer les vivants » afin de « libérer les générations futures de cet héritage de larmes et de souffrances ».

« Une étape collective »

Les invités se lèvent pour l’applaudir. Au fond de la salle, un homme crie : « Honte à la France ! » Puis, une fille de harki interpelle : « La France, elle a abandonné ses soldats et ses enfants. »

C’est au tour de M. Macron de parler. En s’installant derrière le pupitre, il retire la plaque sur laquelle est écrit « hommage aux harkis ». « Vous avez rendu hommage vous-mêmes, à vos pères, vos frères. Je vais essayer qu’ensemble on passe une étape collective », lance-t-il.

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