Election présidentielle 2022 en direct : « La France n’est pas idéale mais on y vit quand même pas mal » – Le Monde

« Dans le principe, voter devrait être l’évidence. Dans la pratique, on se demande ce que ça va changer », affirme une enseignante à la retraite à Nemours

Nemours, dans le Gâtinais, extrême sud de la Seine-et-Marne, en bordure de Loing. Son château médiéval, ses maisons à colombages, le carillon de l’église Saint-Jean-Baptiste… La terrasse de L’Ecu de France est bondée en ce dimanche, on sirote son petit blanc entre amis et on partage ses meilleures astuces pour limiter le coût des carburants – « Je roule à l’éthanol, 75 centimes du litre, j’ai fait poser un boîtier au “black” pour 300 euros, ce sera vite rentabilisé ! » – et ses meilleures blagues – « Moi, j’ai pas vu augmenter le prix du gasoil, j’en mets toujours pour 50 euros ! », hilarité générale.

Natacha Sergent, 42 ans, vient de voter pour Marine Le Pen au bureau de vote numéro 1 de Nemours, en Seine-et-Marne, lors du second tour de l’élection présidentielle, le 24 avril 2022.

A quelques centaines de mètres, le bureau de vote numéro 1, dans l’hôtel de ville. En sort, très apprêtée, Natacha Sergent, 42 ans qui tient un salon d’esthétique à Fontainebleau. Cette électrice de Valérie Pécresse au premier tour, de François Fillon et de Nicolas Sarkozy avant elle, qui désigne Les Républicains comme sa famille politique de cœur, a voté « pour le changement », explique-t-elle, essorée par deux années de crise sanitaire : « On dit qu’on nous a aidés, mais ce n’est pas vrai. Je n’ai eu droit qu’à 1 500 euros de fonds de solidarité, pas plus, parce que j’avais un arriéré de TVA. J’ai dû prendre un prêt garanti par l’Etat de 30 000 euros qu’il me faut rembourser ainsi que l’Urssaf de 2020 qu’on a pu reporter. Nous, les petits, on ne nous écoute pas. Il n’y en a que pour les grandes entreprises dans ce pays ! Alors j’essaie Marine Le Pen, on verra bien, on ne [lui] a jamais laissé [sa] chance ! »

Chignon grisonnant, masque sur le nez, Agnès Chapuis, enseignante à la retraite, hésite d’abord à répondre à la question suivante : « Etait-ce facile de vous décider à voter ? » « Pffff, dans le principe, voter devrait être l’évidence. Dans la pratique, on se demande ce que ça va changer, de faire ce geste de voter. Donc ça ne s’arrête pas là. Il faut s’interroger sur comment on peut agir au quotidien. Pas par la protestation, mais par quelque chose de plus profond que ça, dans toutes nos actions de citoyens, nos engagements associatifs par exemple. Tout ce qui crée du lien, tout ce qui amène à réfléchir » explique-t-elle en choisissant bien ses mots. Mais prononcer le nom du candidat qu’elle a choisi l’écorche. « Ce vote, je l’assume, mais il n’est pas satisfaisant. On est passé à côté de tellement de sujets pendant cette campagne : la santé, l’écologie, la justice sociale, la démocratie active, participative. Tout ce qui se pose à nous comme société, comme humanité… »

Bureau de vote numéro 1 à Nemours, en Seine-et-Marne, le 24 avril 2022.

En ce milieu d’après-midi, sur les bords du Loing, Antonin Belo, 23 ans, et son amie Laëtitia, 22 ans pique-niquent de nuggets de chez McDonald’s. Arrivée en France avant ses 2 ans, la jeune femme ne vote pas car elle n’a que la nationalité portugaise. Lui hésite à se rendre aux urnes. La flemme. « Je viens de finir de travailler, précise cet agent d’accueil dans une salle de sport. Y aura sûrement la queue dans mon bureau de vote, j’ai pas envie de perdre mon temps à attendre, surtout pour des candidats qui ne me représentent ni l’un ni l’autre. »

Antonin Belo, 23 ans, sur les bords du Loing, à Nemours, lors du second tour de la présidentielle, le 24 avril 2022.

Aline Leclerc

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