Donald Trump accusé de souffler sur les braises de la contestation – Le Figaro

La scène, orchestrée par ses conseillers, n’a duré que dix-sept minutes. Juste après avoir menacé de déployer l’armée si les violences continuaient dans le pays, Donald Trump s’est rendu à pied lundi soir à l’église épiscopale St John, située près de la Maison-Blanche et endommagée la veille. Accompagné de sa fille, de son gendre et du ministre de la Justice, le chef d’État a ensuite posé devant l’«église des présidents» pansée de plaques de bois, en brandissant une bible face aux objectifs, la mâchoire serrée et sans déclaration.

Cette initiative était-elle conçue comme un message d’apaisement, alors que plusieurs grandes villes américaines s’étaient embrasées pour la septième nuit après la mort de George Floyd, un homme noir asphyxié par un policier blanc lors de son arrestation à Minneapolis, le 27 mai? Elle a eu l’exact effet inverse.

D’une part, la police avait en amont tiré des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc sur les manifestants pacifistes devant la Maison-Blanche, afin de dégager la voie pour le convoi pédestre. Une dispersion jugée «honteuse» par la maire démocrate de Washington, Muriel Bowser, qui n’a servi qu’à offrir au président «une séance photo», selon le gouverneur de l’État de New York, Andrew Cuomo.

D’autre part, Donald Trump a été accusé de récupération religieuse et d’indifférence. L’archevêque de l’Église épiscopale de Washington, Michael Curry, l’a ainsi accusé d’avoir utilisé le lieu de culte à des fins politiques. «Il n’a pas prié. Il n’a pas mentionné George Floyd, il n’a pas parlé de l’agonie des gens qui sont victimes de cette expression terrible du racisme et de la suprématie blanche depuis des centaines d’années», s’est aussi insurgée Mariann Budde, évêque à Washington, dans le New York Times.

Avec un contraste évident, Barack Obama s’était exprimé plus tôt sur le site Medium, pour souhaiter «faire de ce moment le tournant d’un vrai changement», et condamner «la petite minorité de personnes» ayant recours à la violence. À cinq mois de la présidentielle, briguée par son ancien vice-président, Joe Biden, il a appelé à «se battre»pour avoir «un président, un Congrès, un ministère de la Justice et un système judiciaire fédéral qui reconnaissent réellement le rôle corrosif et permanent que le racisme joue dans notre société et veulent agir pour y remédier».

À travers le pays, les manifestations se poursuivaient mardi dans plus de 140 villes. New York, Los Angeles et des dizaines d’autres cités ont décrété ou étendu un couvre-feu nocturne. À Washington, des dizaines de manifestants ont été arrêtés lundi pour l’avoir violé. Dans le Missouri, quatre policiers ont été blessés, dont un grièvement.

Ces tensions ont peu de chances de retomber avant la comparution de l’agent de police Derek Chauvin, inculpé d’homicide involontaire, le 8 juin. Ou même avant les obsèques de George Floyd, aussi prévues la semaine prochaine. L’autopsie indépendante demandée par sa famille et dévoilée lundi conclut qu’il a succombé à une «asphyxie mécanique» et qu’il s’agit d’un homicide. L’autopsie officielle arrive à la même conclusion, mais note la présence de fentanyl, qui, ajouté à une hypertension et à une maladie artérielle, pourrait selon le légiste avoir contribué à son décès.

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