Didier Raoult entendu par la chambre disciplinaire de l’ordre des médecins – Le Monde

Didier Raoult, lors de la conférence de presse sur la situation du Covid-19 à Marseille, dans le sud-est de la France, le 27 août 2020.

Il est visé par deux plaintes de ses pairs pour des entorses au code de déontologie. Le controversé professeur Didier Raoult, chantre de l’hydroxychloroquine comme traitement contre le Covid-19, doit être entendu vendredi 5 novembre au matin par la chambre disciplinaire de l’ordre des médecins de Nouvelle-Aquitaine à Bordeaux.

Cette chambre, présidée par un magistrat administratif, pourra prendre des sanctions allant d’un simple avertissement à une radiation. Sa décision sera connue entre quinze jours et huit semaines après l’audience.

Indépendamment de cette décision, il était déjà acté que Didier Raoult, à la retraite comme professeur d’université praticien hospitalier, devrait quitter la tête de l’institut hospitalo-universitaire en maladies infectieuses de Marseille (IHU Méditerranée Infection), qu’il dirigeait depuis 2011, au plus tard à la fin de juin.

Promotion de l’hydroxychloroquine

A l’automne 2020, le conseil départemental de l’ordre des médecins des Bouches-du-Rhône avait engagé des poursuites contre le professeur. Il lui reprochait plusieurs entorses au code de déontologie liées notamment à la promotion de l’hydroxychloroquine comme traitement contre le Covid-19, malgré l’absence d’effet prouvé aujourd’hui encore.

Plusieurs études réalisées par l’IHU pour appuyer l’intérêt de ce traitement ont été vertement critiquées par de nombreux scientifiques pour leur méthodologie et leurs conditions de réalisation.

Le Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM) s’était associé à ces poursuites en déposant à son tour une plainte à la fin de décembre.

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Hommage à la « première ligne »

L’avocat du conseil de l’ordre des médecins des Bouches-du-Rhône, Philippe Carlini, liste des entorses à « neuf ou dix articles du code de déontologie » effectuées par le Pr Raoult, parmi lesquelles des attitudes qu’il considère comme « anticonfraternelles » envers « les médecins qui ne pensent pas comme lui » lors de ses nombreuses communications « sur les réseaux sociaux et les plateaux télé ».

Ces poursuites ne constituent « pas un règlement de comptes » mais « un soutien à tous les médecins libéraux, en première ligne pendant la crise, complètement déstabilisés par des positions agressives de patients qui exigeaient de l’hydroxycholoroquine », a expliqué Me Carlini à la veille de l’audience.

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Pour Me Fabrice Di Vizio, qui assure la défense de Didier Raoult, les plaignants dénoncent « une communication générale », le dossier ne comportant, selon eux, aucun propos « précis, factuel, daté » montrant que le professeur marseillais « déconsidère la profession ».

La juridiction bordelaise, où a été dépaysée l’affaire, doit examiner également une troisième plainte, déposée cette fois par le professeur marseillais lui-même contre le vice-président de l’ordre des médecins des Bouches-du-Rhône, le Dr Guillaume Gorincour, pour « non-confraternité ». Didier Raoult reproche à ce médecin chargé de la déontologie au sein de l’instance, une cinquantaine de tweets le dénigrant, postés au long de l’année 2020.

Accusations d’essais illégaux

L’infectiologue et l’IHU de Marseille ont acquis une vaste et controversée notoriété avec la pandémie de Covid-19, en promouvant un traitement à base d’hydroxychloroquine afin de lutter contre la maladie due au SARS-CoV-2. Plusieurs études ont été réalisées par l’IHU pour affirmer l’intérêt de ce traitement, mais elles ont subi des critiques de nombreux scientifiques quant à leur méthodologie et leurs conditions de réalisation. Plus récemment, M. Raoult a fait l’objet de critiques pour avoir fait la publicité d’une étude brésilienne défendant un traitement à base d’hydroxycholoroquine, alors que ces essais ont ensuite provoqué un vaste scandale pour avoir été menés sur des patients sans leur consentement, et pour avoir donné lieu à la publication de résultats tronqués.

Depuis la fin d’octobre, l’IHU et son directeur sont également accusés d’avoir mené depuis 2017 de supposés « essais cliniques » illégaux contre la tuberculose, provoquant chez plusieurs patients, dont un mineur de 17 ans, de graves complications. Ces essais avaient été menés malgré le refus de l’ANSM, l’Agence nationale de sécurité du médicament, qui doit donner son aval aux recherches nécessitant des expérimentations sur des êtres humains, en particulier les essais cliniques de médicaments. L’IHU de Marseille et son directeur nient ces accusations.

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Le Monde avec AFP

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