Déconfinement : progressif, par étape, régionalisé, à dates… – Linternaute.com

Déconfinement : progressif, par étape, régionalisé, à dates échelonnées... Le scénario probable DECONFINEMENT. Le déconfinement “n’est pas pour demain matin”, selon Edouard Philippe. Le Premier ministre s’est exprimé jeudi soir sur TF1 et LCI sur la sortie de crise du coronavirus. Pour le chef du gouvernement, la fin du confinement doit se faire “de façon progressive”.

[Mis à jour le vendredi 3 avril 2020 à 11:09] Le gouvernement est “en train de réfléchir à la façon de procéder à ce déconfinement“. Edouard Philippe a évoqué les enjeux de la sortie de crise, jeudi soir, sur TF1 et LCI. Le Premier ministre avait déjà lancé l’idée d’un déconfinement la veille à l’Assemblée nationale. Devant les téléspectateurs, il a précisé qu’aucune date n’était pour l’instant envisagée. Les Français sont donc invités à rester chez eux jusqu’au 15 avril, et ” probablement plus longtemps ” pour lutter contre l’épidémie de coronavirus. Mais l’exécutif planche sur la sortie. “Je comprends l’impatience des Français, mais cela ne sera pas pour demain matin”, a déclaré Edouard Philippe. Avouant qu’il n’avait pas toutes les réponses, le chef du gouvernement affirme que “ce déconfinement ne pourra se faire que de façon progressive”. 

Mercredi 1er avril, déjà, devant les députés réunis pour une mission d’information sur le coronavirus, Edouard Philippe avançait que le “déconfinement” ne se ferait pas de façon “général[e] et absolu[e]”, pas “en une fois et pour tout le monde”. En effet, la crainte d’une deuxième vague d’épidémie lorsque les Français sortiront de chez eux est partagée par la communauté scientifique. Il y a donc plusieurs possibilités : un déconfinement par régions, en commençant par les zones les plus touchées par le coronavirus, un déconfinement par classes d’âge, un déconfinement qui concernerait d’abord les personnes immunisées…

Le sujet est délicat pour le gouvernement, car il reste des points d’interrogation, évoqués par le Premier ministre à la télévision. En effet, cela dépend de l’évolution du Covid-19 en France et du seuil d’immunité développée par la population. “Si une grande partie a développé le virus, ce n’est pas du tout la même chose que si c’est une petite partie”, a détaillé Edouard Philippe. Il y a aussi la question d’un traitement. “Existera-t-il un traitement reconnu qui peut limiter l’impact de la maladie ?”, s’interrogeait ainsi le Premier ministre. 

Edouard Philippe espère désormais présenter une ébauche de stratégie “dans les jours qui viennent”, stratégie de déconfinement qui sera élaborée par plusieurs acteurs. Le Conseil scientifique, qui conseille l’Elysée et le gouvernement depuis le début de la crise, et qui a d’ailleurs préconisé un confinement de six semaines, a évidemment un point de vue sur la question. Une “équipe spécifique” au sein de la cellule de crise dirigée par le Directeur général de la Santé Jérôme Salomon aurait aussi commencé à récolter les avis et à analyser les scénarios possibles. Mais il manquait un chef d’orchestre. Ce sera Jean Castex, haut-fonctionnaire et maire de la ville de Prades, dans les Pyrénées-Orientales.

“J’ai demandé à Jean Castex, un haut fonctionnaire qui connaît parfaitement le monde de la santé, de coordonner ces équipes pour déterminer des scénarios et pour ensuite, dans la mesure du possible, les présenter au public et les discuter”, a indiqué Edouard Philippe sur TF1. Il reviendra donc à Jean Castex, président de l’Agence nationale du sport et délégué interministériel aux Jeux Olympiques d’analyser les différentes possibilités, d’étudier les scénarios possibles de la sortie de crise. Le haut-fonctionnaire travaillera ainsi avec le ministère de la Santé. “C’est un haut fonctionnaire qui connaît parfaitement le monde de la santé et qui est redoutable d’efficacité”, a vanté le Premier ministre jeudi soir. 

Un déconfinement progressif, par étape

Edouard Philippe a évoqué “un déconfinement qui serait régionalisé” et “sujet à une politique de tests, en fonction, qui sait, de classes d’âge”.  “Il s’agit d’hypothèses. Il faut les travailler”, a complété le Premier ministre jeudi soir. Pour ce faire, Jean Castex va très probablement se pencher sur ce qui est actuellement fait en Chine, dans la région de Hubei, berceau de l’épidémie où le déconfinement a débuté ce 25 mars et devrait s’achever le 8 avril. L’Italie prévoit aussi un “retour à la normale” qui devra se faire “graduellement”, selon le Président du conseil Giuseppe Conte. Mais la France regarderait plutôt de l’autre côté de l’Atlantique, selon Le Parisien, et s’intéresserait de près à une stratégie élaborée dans une étude américaine publiée très récemment.

Cette étude, baptisée “A road map to reopening” (“Une feuille de route pour la réouverture”), rédigée par d’anciens experts de l’agence de sécurité de l’alimentation et du médicament, la célèbre “Food and Drug Administration”, doit donner un cap à l’administration de Donald Trump qui se trouve dans la même problématique que le gouvernement français, avec quelques jours de décalage. Et cette étude préconise bel et bien une stratégie de déconfinement progressif, région par région.

Le rapport américain préconise plus précisément un déconfinement “Etat par Etat”, écrit encore le Parisien, le tout organisé en fonction de la chronologie de l’épidémie. Les Etats touchés en premier seraient déconfinés les premiers, avec quelques conditions importantes : un nombre de cas en recul depuis au moins 14 jours et des services de réanimation désengorgés. En France, le Conseil scientifique a d’ores et déjà indiqué de son côté que la fin du confinement ne serait envisageable que quand les indicateurs épidémiologiques certifieront “que la saturation des services hospitaliers, et des services de réanimation” est “jugulée”.

Plusieurs médecins, épidémiologistes et politiques s’accordent sur ce point : l’épidémie ne sera vaincue que si une part importante de la population a été infectée puis immunisée. Plusieurs seuils à atteindre ont été avancés allant de 50 à 70% d’une population donnée. Pour s’assurer que ce niveau sera atteint, au niveau national comme au niveau régional, il faut donc être en capacité de “tester en masse la population”, assure l’étude “A road map to reopening”.

Des kits de détection rapide, capables de détecter et mesurer les anticorps en quelques minutes, avec une simple goutte de sang, sont présentés comme la solution. Ces tests permettraient de déterminer très rapidement si une personne a été ou non exposée au virus. Ils seraient donc indispensables pour déconfiner les personnes déjà immunisées, en leur fournissant une sorte de droit de sortie. Des “laissez-passer”, “passeports d’immunité” et autres “carnets de vaccination” sont d’ores et déjà évoqués, comme cela est aussi envisagé en Allemagne. Mais il faudra au préalable s’assurer de la fiabilité de ces tests rapides, qui sont encore expérimentaux, tout comme il faudra acquérir la certitude que les personnes présentant des anticorps sont réellement immunisées contre le Covid-19. Ce qui n’est pas encore une évidence chez tous les scientifiques.

La France se prépare néanmoins à cette option, puisque le ministre de la Santé Olivier Véran a promis samedi 28 mars une montée en puissance des tests en France pour atteindre jusqu’à 100 000 tests quotidiens en juin, notamment via la commande de 5 millions de tests rapides. Dans le journal La Croix, Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique, valide “cette stratégie de tests massifs, utilisée notamment par les Coréens”. “Je suis sûr que si on n’assortit pas le déconfinement de dépistage dans les lieux clos, les Ehpad, les hôpitaux, les prisons…., on ne s’en sortira pas”, abonde le professeur Eric Caumes, chef du service des maladies infectieuses et tropicales à l’hôpital de La Pitié-Salpêtrière, sur BFMTV.

Reste que tester tous les habitants d’une région peut se révéler complexe, même en décuplant les capacités de test. C’est là que l’âge pourrait intervenir, avec un test des populations les plus jeunes en priorité, puis des personnes âgées et fragiles en fin de cycle. Une logique qui permettrait en outre à ces populations plus fragiles de rester confinées plus longtemps et donc de se protéger plus longtemps.

Dans le premier stade du déconfinement, les personnes fragiles et âgées resteraient donc isolées, mais d’autres précautions seraient aussi prises pour ne pas aller trop vite en besogne. Si les autorités françaises suivent in fine les recommandations américaines, les rassemblements de plus de 50 personnes seraient toujours interdits. Les autorisations de réouverture seraient accordées aux écoles et aux restaurants, mais les grands rassemblements resteraient impossible dans un premier temps. Les déconfinés devraient également porter des masques, quitte à utiliser du tissu et à les fabriquer de manière artisanale. Le Directeur général de la Santé Jérôme Salomon a indiqué sur France Info mercredi que les gestes barrières devront être respectés encore pendant “quelques mois” après le confinement, avec une attention particulière portée “au lavage des mains, aux distances”.

Parmi les précautions à prendre dans les premières semaines ou les premiers mois de déconfinement, la question d’un tracking des populations se pose crûment aux dirigeants des pays concernés. L’exemple de la Corée-du-Sud, qui a mis en place un “tracing” pour suivre les déplacements des malades, est évoqué comme une clé de son succès dans la lutte contre le Covid-19. Grâce aux données de géolocalisation transmises directement par les opérateurs aux autorités, une personne qui a été en contact rapproché avec une personne infectée peut être alertée et donc se faire tester. Emmanuel Macron a mis en place à la mi-mars un comité d’experts chargé notamment de réfléchir à une “stratégie numérique d’identification des personnes ayant été au contact de personnes infectées”. Mais cette option est difficilement envisageable en France, compte tenu de la protection des libertés individuelles.

Un compromis pourrait être inspiré par Singapour, qui a mis en place également un tracking, mais l’a assorti d’une application basée sur le volontariat. “Trace Together”, le nom de cette app de traçage, a été installée par un million de personnes sur 5,6 millions d’habitants et permettrait de suivre les contacts dans l’espace public, de mieux alerter les personnes potentiellement exposées à des cas positifs, et donc de mieux traquer le virus. Le secrétaire d’Etat au numérique Cédric O a déclaré mercredi 1er avril que le gouvernement étudiait ce genre de dispositif. Lors de son audition devant la mission d’information sur le coronavirus de l’Assemblée, Edouard Philippe a lui aussi ouvert la voie à un traçage “volontaire” du même acabit en France.

Les régions Grand-Est et Ile-de-France seront-elles déconfinées en premier ?

En résumé, on peut donc imaginer un déconfinement échelonné par région en France, partant du Grand-Est d’abord, puis de la Picardie, puis de l’Ile-de-France etc. avec comme préalable une amélioration de la situation épidémiologique depuis 14 jours dans chacune de ces régions et des services de réanimation ayant retrouvé des capacité d’accueil suffisantes. Des tests massifs des populations seraient menés pour leur permettre de reprendre leur activité, avec des précautions comme le port de masques et la mise à l’écart des personnes âgées ou fragiles. Mais rien n’est encore certain. “Nous expertisons des scénarios en fonction des hypothèses”, c’est-à-dire en fonction “de notre capacité à tester” ou “de la façon dont le virus aura circulé”, indiquait Edouard Philippe aux députés mercredi, déplorant que les informations pour se décider sont encore “parfois incomplètes et souvent contradictoires”. D’autres scénarios sont évoqués comme des phases de reconfinement en cas de signaux négatifs ou un confinement intermittent pour ne pas brusquer les choses.

Qui est Jean Castex, le “ministre du déconfinement” ? 

Conseiller départemental des Pyrénées-Orientales et actuel maire de Prades, Jean castex était un temps pressenti pour entrer au gouvernement. Enarque, il présidait également l’Agence nationale du sport et était jusqu’ici délégué interministériel aux Jeux Olympiques et Paralympiques et aux grands événements sportifs, ayant un rôle clé dans l’organisation des JO de 2024 auprès de l’exécutif. Jean Castex est passé par l’Elysée de 2010 à 2012 auprès de Nicolas Sarkozy et sera même un temps secrétaire général adjoint du Palais. Il sera surtout, entre 2004 et 2006, directeur de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (actuelle DGOS) avant de devenir directeur de cabinet de Xavier Bertrand quand celui-ci était ministre de la Santé. Il est présenté à ce titre comme un spécialiste de l’organisation de soins.

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