Crise énergétique : les Européens au bord de la panique – Le Monde
D’ordinaire, à la veille d’un conseil européen, les diplomates se veulent rassurants. Mais, ces derniers jours, alors que la réunion des chefs d’Etat et de gouvernement à Prague, vendredi 7 octobre, se rapprochait, plusieurs d’entre eux ne cachaient pas leurs inquiétudes. Et pas seulement en raison des risques d’escalade, notamment nucléaire, de la guerre en Ukraine. Alors que la flambée des prix de l’énergie, nourrie par l’offensive gazière du Kremlin, menace la paix sociale et leurs économies, les Vingt-Sept restent incapables de s’entendre sur la marche à suivre pour en atténuer les effets délétères. Entre panique et bataille rangée, ils ont essayé, vendredi, « d’identifier leurs points de convergence », confiait-on dans l’entourage de Charles Michel, le président du Conseil, façon de dire qu’un compromis est encore lointain.
Désireux d’afficher leur unité, le président français, Emmanuel Macron, et le chancelier allemand, Olaf Scholz, sont bien arrivés côte à côte sur le site du château de Prague, qui domine la veille ville, flanqués du chef du gouvernement néerlandais, Mark Rutte. Mais derrière l’image, les tensions entre Paris et Berlin sur les questions énergétiques restent vives.
Plus largement, les Vingt-Sept, qui ont réussi à faire front depuis le début du conflit en Ukraine, savent qu’aujourd’hui leur unité est menacée par le retour de l’inflation galopante. Depuis l’invasion de l’Ukraine, ils ont certes fait en sorte de se passer autant que possible du gaz russe : remplissage des réserves à 90 %, diversification des approvisionnements et réduction de la consommation. Mais, ce faisant, ils ont aussi exacerbé la hausse des prix, à leurs dépens. « Nous avons très substantiellement réduit notre dépendance au gaz russe », s’est réjoui Emmanuel Macron, mais, « à très court terme, nous avons un problème de prix ».
Von der Leyen sous pression
Pour ne rien arranger, le cavalier seul de l’Allemagne, en achetant d’abord du gaz à des prix élevés pour remplir ses réserves, puis en annonçant, le 29 septembre, un bouclier tarifaire de 200 milliards d’euros, constitue un défi quasi existentiel pour l’Union européenne (UE). Au risque de fragmentation du marché intérieur s’ajoute celui de voir les taux d’intérêt consentis aux pays de la zone euro diverger et l’Union monétaire tanguer.
Certes, tous les gouvernements ont adopté des plans pour soutenir les ménages et les entreprises, mais tous n’ont pas les mêmes moyens, au sud et plus encore à l’est du continent. « L’économie allemande est si grande que ce que l’Allemagne donne à ses entreprises pourrait détruire le marché intérieur », a ainsi attaqué le premier ministre letton, Krisjanis Karins, jeudi matin. « C’est le début du cannibalisme dans l’UE. Bruxelles doit agir à ce sujet, car cela va détruire l’unité européenne », commentait, pour sa part, le Hongrois Viktor Orban, le 3 octobre, pourtant peu enclin à appeler l’UE à la rescousse. « L’égoïsme allemand doit être remisé au placard », a, pour sa part, pesté le premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki.
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