
Crise en Ukraine : la tension monte encore d’un cran entre la Russie et les pays occidentaux – Le Journal du dimanche

Une offensive “à tout moment”. La tension est encore montée d’un cran entre la Russie et les pays occidentaux sur la situation en Ukraine. Les Etats-Unis ont annoncé dimanche avoir pris la décision d’ordonner une évacuation des familles de ses diplomates “en raison de la menace persistante d’une opération militaire russe”. Le personnel local et non-essentiel peut quitter l’ambassade à Kiev s’il le souhaite et les ressortissants américains sont encouragés à quitter le pays par des vols commerciaux. Pour expliquer cette annonce, le secrétaire d’Etat, Antony Blinken, doit notamment intervenir en visioconférence pendant une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne (UE) ce lundi.
“Des pourparlers francs” vendredi. Blinken doit également informer les Vingt-Sept de l’issue des “pourparlers francs” tenus vendredi avec Sergueï Lavrov, son homologue russe. En attendant, Londres a également suivi le mouvement du retrait d’une partie de son personnel de l’ambassade de Kiev. Le Premier ministre, Boris Johnson, a notamment averti quant au risque d’une “nouvelle Tchétchénie” en cas d’invasion russe. Quant à la France, elle a conseillé de reporter les voyages non essentiels sur place. L’Ukraine a déploré une décision “prématurée” et “excessive” de la part des autorités américaines.
“Hystérie” en Europe. La Russie dément les rumeurs d’intervention en Ukraine et dénonce des tensions “exacerbées par les annonces et les actions concrètes des Etats-Unis et l’Otan”, via le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, évoquant une “hystérie” sur le Vieux Continent. Dans ce climat tendu, l’Otan a en effet renforcé sa présence en Europe de l’Est, plaçant des forces en attentes et envoyant des navires et avions de combat.
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Une situation sécuritaire instable. Depuis l’automne, les pays occidentaux accusent la Russie d’avoir massé à la frontière plusieurs dizaines de milliers de soldats en vue d’une possible invasion. En effet, la guerre entre les séparatistes russes et l’armée ukrainienne dans le Donbass, à l’est de l’Ukraine connait un regain de tension. A l’origine de ce conflit qui dure depuis huit ans, l’annexion de la Crimée par la Russie et son soutien aux Républiques pro-russes autoproclamées indépendantes de Donetsk et de Lougansk. Des manœuvres de troupes ont été récemment observées et une cyberattaque visant plusieurs ministères ukrainiens a eu lieu la semaine dernière. Kiev y a vu la signature de la Russie, accentuant encore la pression.
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S’il existe une sorte de check-list avant de déclencher une guerre, je pense que Poutine en coche exactement et rapidement toutes les cases
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La semaine dernière, le chef de la diplomatie de l’UE, Josep Borrell, avait indiqué “redouter” une “intégration de fait” de ces régions au pays de Vladimir Poutine. “Il a massé des troupes à la frontière, il a augmenté les effectifs de ses services de renseignement militaire, il a fait évacuer les Russes vivant à Kiev et a réduit le personnel de son ambassade au strict minimum. S’il existe une sorte de check-list avant de déclencher une guerre, je pense que Poutine en coche exactement et rapidement toutes les cases”, décryptait dans le JDD, l‘ancien commandant de l’US Navy James Stavridis.
Moscou veut des garanties. La Russie nie tout projet d’attaques mais se dit menacée en revanche par l’expansion de l’Otan. Elle conditionne la désescalade à des garanties pour sa sécurité. Le Kremlin exige notamment un traité excluant tout élargissement de l’Alliance de l’Atlantique nord à l’Ukraine et à la Géorgie et la fin des manœuvres et des déploiements de militaires en Europe de l’Est de la part de l’Otan ou de ses alliés. Des conditions non négociables pour Moscou, mais inacceptables pour les Occidentaux. Ainsi, les discussions patinent. Après une réunion vendredi, la Russie et les Etats-Unis ont convenu d’un nouveau rendez-vous. En réponse aux conditions russes, les autorités américaines doivent transmettre des “réponses écrites à la Russie” d’ici la fin de semaine.
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Je ne pense pas qu’on devrait dramatiser dans la mesure où les négociations se poursuivent
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Les options prêtes en Europe. Réduction des achats de gaz et de pétrole, soutien financier à l’Ukraine… L’Union européenne a, quant à elle, préparé plusieurs options, dont des sanctions lourdes, pour réagir en cas d’attaque de la Russie, mais opte pour la prudence pour l’instant. “Je ne pense pas qu’on devrait dramatiser dans la mesure où les négociations se poursuivent et elles se poursuivent”, a affirmé Josep Borrell, chef de la diplomatie européenne, cité par l’AFP.
Une position unifiée des Vingt-Sept reste difficile. Certains pays sont partisans de la fermeté tandis que d’autres souhaitent poursuivre un dialogue avec Moscou. L’Allemagne, notamment, est dans une position ambivalente. Selon le ministre ukrainien de la Défense, Berlin aurait notamment refusé de livrer des armes à Kiev. Et le nouveau chancelier, Olaf Scholz, a appelé dimanche à la “sagesse” dans l’examen des sanctions possibles. Ce dernier est partagé entre fermeté, souhaitée par les Verts, et conciliation, plaidée par son parti, le SPD, en raison du projet de gazoduc Nord Stream2. Mardi soir, il rencontrera Emmanuel Macron pour évoquer ce sujet. Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky a d’ores et déjà appelé l’Union européenne à rester unie face à la Russie.