Crise des semi-conducteurs : Le plan de l’Europe pour rattraper son retard

Crise des semi-conducteurs : Le plan de l'Europe pour rattraper son retard

En pleine pénurie mondiale de semi-conducteurs, alors que les grands acteurs au niveau mondial sont en train de renforcer leurs niveaux d’investissements sur ces technologies, l’Europe sort aussi son plan providentiel pour sécuriser son approvisionnement en puces et renforcer la conception et la fabrication de semi-conducteurs sur le continent.

Ce mercredi, la Commission européenne a donné plus de détails sur sa stratégie, annoncée en mars, visant à doubler son niveau de production (de 10 % à 20 % de parts de marché mondial) d’ici à 2030. Inquiète pour sa compétitivité, l’Union européenne veut créer une alliance industrielle regroupant les principales entreprises et centres de recherche européens dans le domaine.

Mais tout le monde n’est pas de cet avis. Cette alliance, si elle voit le jour, se fera sans le fabricant de puces franco-italien STMicroelectronics. Son PDG, Jean-Marc Chéry, vient de déclarer sur BFM Business que si une telle politique à l’échelle européenne porte sur « des technologies avancées ,» alors le groupe « n’a pas de raison d’en faire partie » puisque cela représente une part « marginale » de son activité. Il a toutefois salué l’initiative et précisé : « on voit cela de façon positive. Cela va amener en Europe de la compétition sur les technologies avancées ». Interrogé enfin sur la pénurie, Jean-Marc Chéry a aussi dit s’attendre à ce qu’elle se prolonge encore. « La différence entre la demande et les capacités telles qu’elles avaient été anticipées est tellement importante que ça va durer au moins un an », a-t-il estimé.

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Des puces de pointe toujours plus coûteuses

La stratégie de l’Europe, détaillée ce mercredi, a pour but de renforcer la résilience du marché unique, mise à rude épreuve par les restrictions d’approvisionnement et les fermetures des frontières liées à la pandémie de Covid-19, et la pression des grands acteurs asiatiques et américains.

Dans une étude publiée ce jour, la Commission met en évidence des difficultés et des dépendances, notamment dans le domaine des technologies avancées. Au fil du temps, les puces de pointe sont devenues « plus difficiles et plus coûteuses à produire », la conception et le développement des puces les plus avancées technologiquement pouvant coûter jusqu’à 1 milliard d’euros aujourd’hui, tandis qu’une usine de fabrication de pointe nécessite des investissements pouvant atteindre les « 20 milliards d’euros ». Or, cette situation a entraîné une « consolidation du nombre de fabricants de puces de pointe », affirme la Commission, précisant qu’en 2020, seuls TSMC et Samsung fabriquent des puces à 5 nm.

L’Europe ne dispose donc pas de fonderie capable de fabriquer des composants dont la taille des caractéristiques est inférieure à 22 nm. Les industriels européens, tels que Infineon, NXP, STMicroelectronics et Bosch Semiconductors, desservent aujourd’hui principalement des équipementiers dans les secteurs de l’automobile, de l’automatisation industrielle, de la sécurité et des soins de santé, ainsi que dans l’aéronautique, la production d’énergie et des télécoms, mais délaissent le marché des téléphones mobiles ou des PC, mentionne la Commission. Pour ce qui est de la conception de processeurs à usage général, l’Europe s’appuie « presque entièrement » sur les outils de conception et la propriété intellectuelle développée par les entreprises américaines.

Renforcer toute la chaîne d’approvisionnement

La vulnérabilité de la chaîne d’approvisionnement de l’UE est donc très marquée par le « coût d’entrée élevé, l’escalade des tensions commerciales et des subventions au niveau mondial, la dépendance à l’égard de l’Asie pour la fabrication de puces avancées et des Etats-Unis pour les outils de conception de puces », souligne la Commission. Elle préconise face à cela un renforcement de la position industrielle de l’UE pour stimuler l’innovation et la compétitivité dans certains secteurs d’application, pour le traitement des données, la communication et les infrastructures de données connectées, ainsi que les nouvelles applications liées à l’intelligence artificielle.

A cet égard, la Commission considère qu’il n’y a de la place que pour un seul fournisseur européen capable d’accueillir des installations de fabrication de pointe et prépare le lancement d’une alliance industrielle dédiée aux processeurs et technologies de semi-conducteurs, dont le calendrier d’exécution est fixé au deuxième trimestre 2021.

La Commission fait savoir, en parallèle, qu’elle continuera à soutenir « les efforts déployés par les Etats membres » pour mettre en commun les ressources publiques par le biais du mécanisme “Projet important d’intérêt européen commun” (PIIEC). Elle soutient que cette collaboration entre Etats membres est nécessaire pour « soutenir la chaîne de valeur de l’électronique et des systèmes intégrés en Europe », et étendre ainsi la présence industrielle « tout au long de la chaîne d’approvisionnement ».

Sur le volet budgétaire, la Commission a rappelé que les technologies des semi-conducteurs font partie des domaines identifiés pour l’investissement, dans le cadre du « mécanisme de relance et de résilience ». Cela signifie que « 20 % des plans européens de relance et de résilience devraient être consacrés à la transition numérique, ce qui représente jusqu’à 145 milliards d’euros au cours des deux ou trois prochaines années », a-t-elle précisé.

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