Covid : le va-tout de Macron contre la quatrième vague – Les Échos

Publié le 15 juil. 2021 à 6:30Mis à jour le 15 juil. 2021 à 9:14

Opération réussie. Au lendemain de l’allocution d’Emmanuel Macron visant à accélérer la campagne de vaccination pour lutter contre la propagation de la quatrième vague de l’épidémie de Covid-19, les Français se sont précipités pour prendre rendez-vous et se faire vacciner. Mardi soir, un record de vaccination journalière a été battu en France avec près de 800.000 injections tandis que les réservations s’envolaient (2,2 millions de rendez-vous ont été pris sur Doctolib depuis lundi soir, plus de 3 millions au total). Près de 54 % de la population a reçu au moins une dose de vaccin et 42,2 % est totalement vaccinée.

L’effet de surprise et la fermeté des mesures annoncées par Emmanuel Macron, avec un recours quasiment systématisé au pass sanitaire pour nombre d’activités quotidiennes, ont eu un effet psychologique indéniable sur les indécis de la vaccination. La perspective de ne plus pouvoir aller au cinéma ou au théâtre dès la semaine prochaine, au restaurant ou dans un avion début août a joué à plein pour les inciter à se déplacer dans les centres de vaccination.

Les annonces d’Emmanuel Macron

Enjeu de l’opinion

L’entourage d’Emmanuel Macron assume de rendre, de fait, la vaccination quasi obligatoire, que certains responsables réclament par ailleurs, en optant pour la stratégie du bâton plutôt que la carotte. « Les Français attendaient ce petit coup de pression », a assuré le patron des députés En Marche, Christophe Castaner. Au risque de fracturer un peu plus la population, alors que l’enjeu sera aussi celui de l’opinion.

Les nouvelles restrictions sont majoritairement approuvées, selon un sondage Elabe publié mardi. Mais des manifestations contre le pass sanitaire ont eu lieu dans plusieurs villes de France, avec parfois des tensions comme à Paris. Sur les réseaux sociaux, les attaques très virulentes contre ces mesures « d’apartheid » ont fleuri, certains allants jusqu’à comparer la France à une dictature.

Exercice compliqué

Après les mots, les actes et, pour l’exécutif, le plus dur commence. Le durcissement des contraintes se révèle un exercice compliqué sur le plan pratique, périlleux sur le plan juridique et, sans surprise, polémique sur le plan politique. Plusieurs secteurs sont ressortis abasourdis après l’allocution présidentielle. Ils ont tiré la sonnette d’alarme, alertant d’une part sur la difficulté à contrôler systématiquement les passes sanitaires et, d’autre part, sur le caractère restrictif des nouvelles mesures. Elles risquent de priver de clientèle des secteurs en pleine relance comme les restaurants ou les établissements culturels.

« Comment je fais ? », s’est inquiété Richard Patry, le patron de la fédération des salles de cinéma, alors que le passe sanitaire sera obligatoire dans les salles à partir du 21 juillet. Touchés de plein fouet par les précédentes vagues, les exploitants de cinéma se sentent « punis », à l’unisson du monde de la culture. De leur côté, les restaurateurs, déjà en manque de personnel, craignent de ne pouvoir embaucher car il leur faudra du personnel vacciné. Après le choc des annonces présidentielles, l’exécutif a dû s’adapter et éclaircir les nombreuses zones de flou. Quelques heures après le propos présidentiel, il a été annoncé des assouplissements, voire des rétropédalages : ainsi, le recours obligatoire au passe sanitaire ne concernera les 12-17 ans et les salariés des établissements recevant du public qu’à partir du 30 août.

Projet de loi la semaine prochaine

Présenté la semaine prochaine en conseil des ministres et débattu dans la foulée à l’Assemblée nationale et au Sénat, le projet de loi , nécessaire pour rendre obligatoire la vaccination pour les soignants, renforcer l’isolement de toute personne testée positive et étendre le pass sanitaire aux restaurants, promet des débats animés. Son examen par le Conseil d’Etat, où il est en cours d’examen, et par le Conseil Constitutionnel à l’issue du vote, expose l’exécutif à des réserves ou des censures qui pourraient l’obliger à renoncer à certaines mesures.

Mais pour le gouvernement, l’essentiel est d’avoir créé un choc de vaccination pour, si possible, prendre de vitesse la quatrième vague. Il faut maintenant que l’embellie des vaccinations se confirme alors que le variant Delta poursuit sa croissance exponentielle. Le nombre de cas positif a progressé de 60 % en une semaine et, mardi soir, près de 7.000 nouveaux cas positifs avaient été enregistrés par Santé Publique France, du jamais vu depuis début juin.

Débats électriques

Sur le plan politique, les débats se sont électrisés. Le changement de doctrine de l’exécutif, qui assurait main sur le coeur il y a encore quelques semaines que le passe sanitaire ne servirait jamais à la vie de tous les jours, créé évidemment des remous. Les critiques dénoncent aussi une vaccination devenue factuellement obligatoire, à défaut d’être assumée, au vu des restrictions imposées aux non vaccinés.

Si à droite comme à gauche les mesures annoncées par Emmanuel Macron sont largement approuvées sur le fond – avec de sérieuses réserves sur la forme faute de consultation plus large du Parlement -, les propos les plus virulents sont venus des deux extrêmes. Marine Le Pen a dénoncé un « recul grave » des libertés individuelles tout en dénonçant la « brutalité » faite aux soignants. Son ancien allié Nicolas Dupont-Aignan a accusé Emmanuel Macron de « coup d’Etat sanitaire ». De son côté, Jean-Luc Mélenchon a ironisé sur « l’absurdie », en rappelant que la vaccination ne sera pas imposée aux policiers chargés des contrôles.

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