Covid-19 : comment les autorités font face au rebond de l’épidémie en Mayenne – Le Parisien

La situation y est « problématique », selon le ministre de la Santé, Olivier Véran. La Mayenne est confrontée depuis plusieurs jours à une forte recrudescence du nombre de patients positifs au Covid-19. Le département est désormais celui, en métropole, où le taux d’incidence – nombre de tests positifs rapporté à la population – est le plus élevé. Le seuil « d’alerte », fixé à 50 nouveaux cas pour 100 000 habitants sur sept jours, a été dépassé en début de semaine.

Covid-19 : comment les autorités font face au rebond de l’épidémie en Mayenne

La situation est due, notamment, aux sept foyers d’infection – les fameux « clusters » parmi lesquels se glissent plusieurs abattoirs – détectés depuis le début du déconfinement. Les autorités ont toutefois observé « qu’un certain nombre de cas n’était plus rattaché à des clusters », a indiqué ce jeudi en conférence de presse le docteur Pierre Blaise, directeur du projet régional de Santé de l’Agence régionale de Santé (ARS).

Autre indicateur permettant de jauger le niveau de l’épidémie, 15 patients étaient hospitalisés à cause du Covid-19 ce mercredi. Restée sous le seuil des 10 cas pendant un mois, la courbe repart à la hausse, même si l’on reste très loin du niveau atteint lors du pic de l’épidémie au début du printemps (plus de 90 malades hospitalisés du 16 au 22 avril).

Jusqu’à trois heures d’attente pour un test

Pour éviter une aggravation, les autorités misent sur une hausse rapide et massive du nombre de tests. L’idée : diagnostiquer au plus vite, afin d’isoler tout aussi rapidement les contaminateurs en puissance, même asymptomatiques (la majorité des cas) et casser ainsi la chaîne d’infection.

Depuis vendredi, des « bons de prescriptions standardisés » sont envoyés par l’ARS et l’Assurance maladie aux habitants des villes de Laval et L’Huisserie, afin qu’ils aillent se faire tester dans des drives sans sortir de leurs véhicules, détaille André-Gwenaël Pors, directeur du centre hospitalier (CH) de Laval.

Les autorités sanitaires, qui ont « ciblé les clusters », procèdent « par vagues ». « Elles s’adressent d’abord aux personnes plus âgées et à celles qui ont des infections longue durée, puis à toute la population de plus de 10 ans », précise-t-il.

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Depuis dimanche, 3 700 tests ont été effectués. Une vitesse de croisière de 1 500 prélèvements quotidiens est prévue, ce qui pourrait permettre de mettre fin aux files qui frôlent parfois les trois heures d’attente. La semaine prochaine, les habitants de Château-Gontier seront aussi sollicités, sur le même schéma.

Les deux « drives » en place dans le département depuis mars ont été renforcés lundi par deux autres points de prélèvement, gérés par la protection civile et cette fois sans rendez-vous. Afin d’accélérer la communication des résultats, certains drives envoient leurs écouvillons aux CHU de Nantes et bientôt à Angers, dont la capacité d’analyse est plus poussée.

Car le dispositif connaît pour l’instant un écueil : ces sites étant pris d’assaut, le laps de temps entre le test et son résultat peut varier de quelques heures à un jour et demi. Avec le risque que les personnes dépistées ne s’isolent pas durant cette attente et qu’elles en contaminent d’autres avant de se savoir malades.

Le Dr Luc Dusquesnel, généraliste en Mayenne, qui officie par ailleurs comme médecin régulateur, dit par exemple avoir été contacté par une femme atteinte d’un cancer, inquiète d’avoir passé l’après-midi avec une amie, avant que cette dernière ne découvre son infection au coronavirus.

Manque de médecins

Cette gestion de masse pose d’autres problèmes : l’Assurance maladie a vu sa tâche de « tracing » des cas contacts ralentie par la recherche de salariés d’abattoirs étrangers et de leurs proches, qui n’apparaissaient pas toujours dans leurs fichiers.

Cette campagne de tests est permise grâce à une dizaine d’infirmières de la réserve sanitaire, mais les autorités comptent sur des renforts pour continuer leur campagne de tests : « On recherche des médecins, généralistes, gériatres, urgentistes ou biologistes, car les nôtres fatiguent », énumère le directeur du CH de Laval.

Au sein de l’hôpital aussi les moyens manquent. Il manque au moins un médecin infectiologue à l’appel et des effectifs ont dû être réorientés vers les malades du Covid-19. Cette résurgence, même faible, du coronavirus « a des conséquences sur l’organisation des moyens et déstabilise notre mode de fonctionnement alors qu’on était en train de récupérer l’activité des soins programmés », constate André-Gwenaël Pors.

Quoi qu’il en soit, les tests ne suffiront pas sans une bonne application des gestes barrière. Comme l’a demandé Olivier Véran ce jeudi matin, le préfet a rendu le port du masque obligatoire dans les lieux publics clos de six communes de l’agglomération de Laval. Avant qu’il soit généralisé, la semaine prochaine, à l’ensemble du département (et de toute la France).

« Il faut que l’on soit tous raisonnable »

Une décision dont se réjouit le maire de Laval, Florian Bercault. L’élu, qui juge ses pouvoirs « assez limités », avait déjà imposé le port du masque sur les marchés dès le week-end dernier. « Les sentiments des habitants sont assez variés et ils formulent beaucoup d’interrogations mais il y a une prise de conscience de plus en plus forte chez eux. Certains commerçants ont même placardé sur leur vitrine le message que je leur avais envoyé pour recommander le port du masque dans leur boutique », confie l’édile, qui cherche à « rassurer ».

Covid-19 : comment les autorités font face au rebond de l’épidémie en Mayenne

Le président du département, Olivier Richefou, appelle lui aussi la population à porter un masque « de façon systématique, même dans la rue ». Les 300 000 habitants de Mayenne sont censés en avoir reçu un, dans leur boîte aux lettres, en mai. Quant aux masques chirurgicaux en vente dans les pharmacies et les grandes surfaces, aucun élément ne fait craindre une pénurie de stocks.

« Il faut que l’on soit tous raisonnable et que l’on respecte les gestes barrière, personne n’a envie de connaître à nouveau les deux mois qu’on a vécus », pointe l’élu auprès du Parisien, assurant que « tous les éléments sont en place pour que la situation redevienne rapidement normale ».

Reste à savoir comment prendre en charge sur le moyen terme ces nouveaux malades du Covid-19 – dont on sait que les symptômes peuvent se déclarer tardivement et s’avérer persistants – dans un département en mal de généralistes, où 10 % des habitants n’ont pas de médecin traitant. Huit centres, créés en mars et dédiés à la prise en charge du Covid-19, ont fermé leurs portes le 10 juillet. Un timing malheureux, qu’il faudra compenser par des alternatives de prise en charge sanitaire.

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