Coronavirus : les experts face à la fièvre de la chloroquine – Le Monde

Des tablettes de Nivaquine et de Plaqueril, des médicaments contenant de la chloroquine, le 26 février à l’Institut des infections méditéranéennes de Marseille.

Des tablettes de Nivaquine et de Plaqueril, des médicaments contenant de la chloroquine, le 26 février à l’Institut des infections méditéranéennes de Marseille. GERARD JULIEN / AFP

La nature humaine a horreur du vide. En témoigne l’intérêt massif suscité par une molécule, l’hydroxychloroquine (Plaquenil), présentée par certains comme la parade face au nouveau coronavirus, alors qu’aucune thérapeutique n’est pour l’instant validée. Donald Trump lui-même s’est fait médecin en chef pour enjoindre ses concitoyens de se la faire prescrire, avant d’être démenti par sa propre administration, bien plus circonspecte.

Lundi 23 mars, au « 20 heures » de TF1, le premier ministre, Edouard Philippe, a tenté de faire retomber cette fièvre pour l’hydroxychloroquine, née de résultats très préliminaires d’une étude clinique sur un effectif modeste, conduite par le professeur Didier Raoult (IHU Méditerranée infection, Marseille). Après avoir constaté que les avis « des personnes les plus éclairées en la matière sont souvent divergents », le premier ministre s’est référé au Haut Conseil de santé publique, qui n’a recommandé d’utiliser l’hydroxychloroquine que dans des cas sévères en milieu hospitalier et sur décision collégiale des médecins. Un arrêté va être pris en ce sens par le ministre de la santé, Olivier Véran.

Le chef du gouvernement répondait ainsi à la pression de certains élus, essentiellement de droite : « La chloroquine, pourquoi ne l’utilise-t-on pas ? », s’était ainsi interrogé sur France Inter le patron des sénateurs Les Républicains, Bruno Retailleau. Le maire de Nice, Christian Estrosi, contaminé par le coronavirus, a indiqué à Radio J qu’il a « envie qu’on fasse confiance » à Didier Raoult.

L’intéressé lui-même a créé un appel d’air en annonçant, dimanche 22 mars, que son institut allait pratiquer des tests sur tous les malades fébriles qui viendraient consulter, et proposerait aux patients infectés le traitement par hydroxychloroquine combinée à un antibiotique, l’azithromycine – hors autorisation de mise sur le marché. De longues files de patients se sont aussitôt constituées près de l’IHU. Ailleurs, des médecins généralistes et hospitaliers commencent à en prescrire. D’autres mettent en garde contre des utilisations non contrôlées, potentiellement dangereuses pour les patients et néfastes à l’acquisition de données scientifiques.

Des espoirs et des critiques

La fièvre n’est pas que française. Plusieurs pays ont inscrit l’hydroxychloroquine dans leurs protocoles de traitement, certains constituent des réserves – au Maroc, le gouvernement a préempté les stocks de Sanofi, fabricant de l’hydroxychloroquine (Plaquenil). En France, l’industriel indique ne pas avoir reçu une telle demande des pouvoirs publics – et souligne que les patients habituellement traités contre le lupus ou une polyarthrite – les indications reconnues– doivent rester prioritaires.

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