Coronavirus : la France revoit sa doctrine et commande deux milliards de masques en Chine – Les Échos

Publié le 4 avr. 2020 à 18h19Mis à jour le 4 avr. 2020 à 18h31

Deux milliards de masques et un changement de doctrine. Confronté depuis le début de l’épidémie à une pénurie de ce revêtement de protection – ce qui l’a conduit à mener une politique contestée de rationnement -, l’exécutif monte en régime pour assurer l’approvisionnement du pays, a indiqué ce samedi le ministre de la Santé Olivier Véran.

« Sur les masques que nous avons commandés en Chine, on doit être pas loin des deux milliards, et on continue de passer des commandes », a assuré le ministre, dans une interview au média en ligne Brut. Mercredi, il avait déjà précisé que l’Etat avait commandé « plus d’un milliard et demi de masques en France et à l’étranger » lors d’une audition en visioconférence par la toute nouvelle mission d’information de l’Assemblée nationale sur la gestion gouvernementale de la crise.

Guerre des masques

Le sujet est sensible : le pays doit composer avec un manque criant de masques alors qu’il disposait il y a dix ans d’un stock d’un milliard de masques chirurgicaux (basiques) et de 600 millions de masques FFP2 (sophistiqués). Si les producteurs nationaux sont en plein « effort de guerre » et sont capables de produire 8 millions d’unités par semaine, ils ne peuvent combler les besoins des professionnels de santé, et du personnel hospitalier en particulier (24 millions par semaine).

Le dispositif, qui protège des émissions de gouttelettes par lesquelles est transmis le virus, fait aujourd’hui l’objet d’une « compétition mondiale », a par ailleurs concédé Olivier Véran. C’est même une guerre entre Etats qui fait rage pour l’approvisionnement.

Malgré le démenti des Etats-Unis, qui nient avoir acheté des masques initialement destinés à la France, les témoignages – de présidents de région, notamment – se sont succédé dans la semaine, affirmant que les Américains font monter les enchères. La France n’est d’ailleurs pas en reste puisqu’un stock de 4 millions de masques, propriété d’une entreprise suédoise et à destination de l’Espagne et l’Italie, a été saisi début mars à Lyon.

« Réévaluer la doctrine »

Cette commande de deux milliards de masques, passée auprès de fabricants chinois, doit notamment permettre de répondre à la demande de « 500.000 masques par jour » du secteur médico-social (établissements pour personnes âgées, handicapés, soins à domicile, dépendance…), a ajouté Olivier Véran lors d’une conférence de presse avec la secrétaire d’Etat chargée du secteur Sophie Cluzel.

Au sujet des recommandations des autorités sanitaires, qui conseillent désormais à la population le port de « masques alternatifs » en tissus, l’exécutif a demandé « au conseil scientifique, [aux] experts de virologie, [aux] agences sanitaires […] de réévaluer la doctrine », précise le ministre.

La porte-parole du gouvernement Sibeth N’Diaye avait dans un premier temps indiqué que le port du masque n’était pas nécessaire « dès lors qu’on respecte la distance de protection vis-à-vis des autres », et le directeur de la Santé Jérôme Salomon l’avait jugé « inutile dans la rue ».

Des préconisations vivement critiquée et à rebours de nombreux experts. « La grande erreur aux Etats-Unis et en Europe est, à mon avis, que la population ne porte pas de masques […] avec un masque, on peut empêcher les gouttelettes porteuses du virus de s’échapper et d’infecter les autres », a par exemple déclaré mi-mars George Gao, le directeur général du Centre chinois de contrôle et de préventions des maladies, dans une interview publiée par la revue américaine « Science ». La reconstitution des stocks pourrait changer la donne.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *