
Coronavirus : la France reste au stade 2 de l’épidémie, mais renforce les restrictions – Le Parisien

Mesure radicale et sans précédent en Europe. Depuis ce dimanche 8 mars, plus de quinze millions d’habitants du nord de l’Italie sont en quarantaine pour trois semaines. Objectif : endiguer l’épidémie de coronavirus dans le pays le plus durement touché en Europe, avec 7375 cas répertoriés et 366 décès. Une mise sous cloche qui rappelle celle de la province chinoise du Hubei (56 millions d’habitants confinés), d’où est parti le nouveau virus, désormais présent dans 99 pays. La décision de Rome a été saluée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Une mesure qui permet de « protéger le pays et le reste du monde », a salué son patron, Tedros Adhanom Ghebreyesus dans un tweet.
Face au Covid-19, un scénario comme celui-ci est-il envisageable en France ? Le gouvernement préfère cibler davantage les restrictions. Principal renforcement des mesures, annoncé dimanche soir par Olivier Véran, le ministre de la Santé, à l’issue d’un Conseil de défense qui aura duré plus de deux heures : l’interdiction sur tout le territoire des rassemblements de plus de 1000 personnes, contre 5000 jusqu’à présent.
« Les préfets, les ministères feront remonter une liste d’événements considérés comme utiles à la vie de la Nation », a précisé sur le perron de l’Elysée Olivier Véran, tout en indiquant que les manifestations, les concours et le recours aux transports en commun ne seraient pas concernés.
VIDÉO. Les rassemblements de plus de 1000 personnes interdits en France
Selon le dernier bilan, l’Hexagone compte désormais 19 morts et 1126 cas confirmés. Si le pays se prépare au passage inéluctable au stade 3, le niveau d’alerte le plus élevé, qui vise à atténuer les conséquences de l’épidémie et non plus à la contenir, il reste donc pour l’heure au stade 2, avec des mesures contraignantes, comme la fermeture à partir de lundi, pendant 15 jours, des crèches et établissements scolaires dans l’Oise et le Haut-Rhin, les départements les plus touchés. En tout, 300 000 élèves sont privés de classe.
La réserve sanitaire sur le pont
Le stade 3 prévoit la mobilisation complète du système sanitaire hospitalier et de ville mais, a priori, pas de mesures exceptionnelles de confinement de millions d’habitants, comme en Italie. La prise en charge dans les hôpitaux et les tests de dépistage seraient alors réservés aux cas jugés graves. Les patients présentant des symptômes bénins seraient, eux, soignés par leur généraliste.
Des professionnels qui s’interrogent et expriment « des inquiétudes concernant, notamment, l’insuffisance des masques à disposition », pointe Jacques Battistoni, président du syndicat MG France. Pour répondre à ces craintes, Olivier Véran a annoncé la publication ce lundi d’un décret qui va faciliter les téléconsultations.
La réserve sanitaire est également sur le pont « en anticipation des besoins à venir », précise la Direction générale de la santé. Constituée de professionnels de santé mobilisables à tout moment, elle intervient en renfort auprès d’acteurs de l’offre de soins confrontés à des situations sanitaires exceptionnelles. « Elle est composée de professionnels de santé volontaires (directeurs d’hôpital, médecins, psychologues, pharmaciens, infirmiers, ambulanciers) qui peuvent être en activité, à la retraite depuis moins de 5 ans ou en formation », détaille cette direction rattachée au ministère de la Santé.
Une couverture médiatique et gouvernementale inédite
Quand va-t-on passer au stade 3 ? « C’est le grand suspens », commente la Pr Anne-Marie Moulin, chercheuse émérite au CNRS, spécialiste des crises sanitaires et des épidémies dont elle étudie l’histoire à travers les siècles. Au-delà de cette question, pour cette médecin, « ce qui est inédit avec cette épidémie, c’est la couverture médiatique et gouvernementale. Elle est sans commune mesure avec d’autres crises sanitaires », juge l’experte.
« On pourrait se dire que le gouvernement a entendu la leçon des précédentes épidémies et la nécessité de transparence, poursuit la Pr Moulin. Mais d’un autre côté, on ne parle plus d’autre chose, y compris des problèmes chroniques du système hospitalier. Par ailleurs, en mettant toutes les ressources sur la recherche contre le nouveau coronavirus, on risque de dégarnir ailleurs des projets déjà engagés. »