Chloroquine : comment vont se dérouler les essais cliniques – Le Parisien

« Discovery ». Tel est le nom donné à l’essai clinique européen, qui débute ce lundi, pour tester quatre traitements contre le Covid-19. Alors que le nouveau coronavirus continue à se propager dans le monde, tuant déjà près de 14 000 personnes, la couse au traitement est devenue une priorité pour les autorités sanitaires en France et dans tous les pays frappés par l’épidémie.

Qui va être concerné par cet essai clinique ?

Au total, 3200 patients atteints du Covid-19 vont être concernés dans au moins sept pays européens, a fait savoir ce dimanche l’Inserm, qui chapeaute la recherche médicale en France. Dans notre pays, 800 malades hospitalisés à Paris, Lyon, Strasbourg, Lille et Nantes vont être recrutés à partir de ce lundi, sur la base du volontariat.

Quatre traitements et cinq molécules au total vont être testés, dont la fameuse chloroquine. Ce produit, utilisé jusque-là notamment contre le paludisme (ou malaria), n’était pourtant pas prévu au départ. Le professeur Didier Raoult, qui dirige à Marseille l’Institut hospitalo-universitaire Méditerranée Infection (IHU), a mené sa propre expérimentation sur 24 patients hospitalisés à la Timone, un des hôpitaux de la ville. Ceux-ci ont absorbé de l’hydroxychloroquine associée à de l’azithromicyne et seulement 25 % d’entre eux étaient encore porteurs du virus au bout de six jours. Des résultats qualifiés de « spectaculaires » par le Pr Raoult dans Le Parisien ce lundi.

Certains des confrères du médecin marseillais critiquent ces essais et leur méthode, estimant que les conditions du tests ne permettent pas d’en tirer des conclusions définitives et que cette molécule peut présenter des effets secondaires dangereux.

Prudentes également dans un premier temps, les autorités sanitaires ont finalement fait ajouter ce traitement à ceux testés au niveau européen. Les résultats du Pr Raoult ont même été jugés « intéressants » par le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon, dimanche soir.

« La chloroquine fait partie des médicaments bien connus qui peuvent donner des troubles du rythme cardiaque comme effets indésirables, mais j’ai appelé hier [dimanche] des collègues italiens qui m’ont dit qu’ils en constataient peu », indique pour sa part au Parisien le Pr Olivier Bouchaud, chef de service d’infectiologie de l’hôpital Avicenne (Bobigny).

Quand aura-t-on les résultats ?

L’Inserm promet que « l’analyse de l’efficacité et de la sécurité du traitement sera évaluée 15 jours (après le début de la prise des produits) ». Samedi, le ministre de la Santé disait aussi attendre de premiers résultats « dans une période [estimée] à moins de quinze jours ».

Jeudi dernier, le virologue Bruno Lima, cocoordinateur de l’étude en France, envisageait un délai de six à huit semaines pour aboutir à des conclusions définitives.

Pourquoi certains médecins prescrivent-ils déjà de la chloroquine contre le Covid-19 ?

Sans attendre la fin de l’essai clinique, plusieurs médecins donnent déjà de la chloroquine à des malades hospitalisés. Ils se basent pour cela sur les résultats du professeur Raoult, estimant que « le jeu en vaut la chandelle », illustre un infectiologue exerçant en Île-de-France.

A l’hôpital Avicennes de Bobigny, qui accueille plus de 50 patients atteints du Covid-19, l’équipe du Pr Bouchaud va se réunir ce lundi pour décider du « seuil de sévérité à partir duquel on prescrira de la chroloquine ». « On en donnera sûrement aux malades qui ont des facteurs de risque, pas à ceux qui ont des signes mineurs. Cela vaut le coup d’essayer avec une forte surveillance car ce serait idiot d’attendre les résultats de l’essai clinique si on se rend compte qu’il y a un bénéfice », nous précise le chef de service.

Pourtant, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) n’a pas délivré d’autorisation de mise sur le marché (AMM) de cette molécule pour soigner le Covid-19. Et pour cause : les essais cliniques menés dans un cadre officiel débutent à peine.

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Contrairement à ce qu’on pourrait penser, une prescription hors AMM est possible dans certains cas. « Il faut que ce soit scientifiquement éclairé, connu, et que le patient en soit informé », souligne auprès du Parisien Gérard Bapt, médecin et ancien député socialiste, qui avait suivi de près plusieurs scandales sanitaires, dont celui du Mediator. Autrement dit, un soignant a le droit de prescrire un traitement hors AMM « s’il estime qu’il est dans l’intérêt de ses patients et que nous sommes dans une prescription dans l’état actuel de la connaissance », renchérit Philippe Parola, chef du service des maladies infectieuses de l’IHU à Marseille, interrogé sur France Info ce lundi.

Le ministre de la Santé, Olivier Véran, a jugé « absolument fondamental d’asseoir toute décision de politique publique en santé sur des données scientifiques validées et les processus de validation ». « On ne peut pas négocier avec [cela] », a-t-il insisté dimanche sur LCI.

Y a-t-il d’autres tests ?

Oui. En parallèle de « Discovery » au niveau européen, un autre essai clinique, baptisé « Solidarity », va bientôt débuter sous l’égide de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Il aura lieu en France mais aussi, notamment, en Afrique du Sud, en Argentine, au Canada ou encore en Thaïlande, a énuméré le directeur général de l’OMS, mercredi 18 mars. Cet essai clinique à grade échelle « prévoit des procédures simplifiées pour ‎permettre aux hôpitaux même surchargés de participer », a ajouté le responsable, alors que de plus en plus d’établissements sont débordés par l’afflux de malades. ‎

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