Cette étude compare l’avis des Français et des Américains sur l’avortement (et c’est plutôt rassurant) – Le HuffPost

MARSEILLE, FRANCE - 2022/09/28: A protester holds up a placard protecting the right to abortion in the middle of the crowd during the demonstration. Demonstration in Marseille on the occasion of the
SOPA Images / SOPA Images/LightRocket via Gett MARSEILLE, FRANCE – 2022/09/28: A protester holds up a placard protecting the right to abortion in the middle of the crowd during the demonstration. Demonstration in Marseille on the occasion of the “International Day for the right to abortion”. (Photo by Denis Thaust/SOPA Images/LightRocket via Getty Images)

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81 % des Français soutiennent le droit d’avorter librement contre seulement 50 % des Américains.

DROIT DES FEMMES – Si vous aviez peur que la France suive le même chemin que les États-Unis sur l’avortement, rassurez-vous. Une étude de l’Ifop pour le blog Partir à New York, publiée ce mardi 29 novembre 2022 (48 ans jour pour jour après la légalisation de l’avortement en France), montre que l’opinion des Français est très éloignée de celui des Américains sur le sujet : ils sont en moyenne 81 % à soutenir le droit d’avorter librement, contre seulement 50 % de leurs homologues outre-atlantique.

Le sondage a été réalisé en ligne auprès d’un échantillon représentatif de la population de 1550 Américains et de 1506 Français, tous âgés de 18 ans et plus. Parmi les résultats, on trouve qu’aux États-Unis, 30 % des répondants pensent qu’une femme doit avoir le droit d’avorter seulement dans certaines circonstances (contre 14 % des Français) ; 14 % des Américains estiment qu’une femme ne doit pas y avoir accès sauf si la grossesse met sa vie en danger (contre 4 % des Français) ; et 6 % des Américains sont pour une interdiction pure et simple de l’IVG, contre 1 % des interrogés français.

Bref, un monde d’écart. Le directeur du pôle actualité et politique de l’Ifop, François Kraus, précise : « Dans ce contexte de montée de la tolérance et de la liberté de choix, la société française est aujourd’hui nettement plus attachée à une législation ’libérale’ de l’avortement que la société américaine ».

Des petites évolutions depuis juin

Ces différences concordent avec l’historique récent en matière d’IVG des deux pays. Quand la France vient d’approuver à l’Assemblée l’inscription du droit à l’avortement dans la Constitution, les Etats-Unis se sont distingués en révoquant il y a peu un arrêt de la Cour suprême garantissant l’égalité du droit de toutes les femmes américaines à se faire avorter.

Selon le sondage de l’Ifop, 86 % des Français soutiennent cette évolution dans leur pays. « La large adoption à l’assemblée est complètement en phase avec le consensus dans l’opinion française », résume François Kraus, que nous avons également contacté par téléphone.

Les Américains qui approuvent la révocation de l’arrêt Roe v. Wade ne sont toutefois pas majoritaires : seulement 39 % se disent d’accord avec la décision de la Cour suprême. Selon le directeur du pôle actualité de l’Ifop, « le fait qu’une majorité d’Américains désapprouve la déconstitutionnalisation du droit à l’avortement dans leur pays montre les limites de l’assise politique sur laquelle repose l’arrêt émis en juin par les juges de la Cour suprême. »

Il est vrai qu’une lueur d’espoir subsiste pour les Américains les plus progressistes. Depuis la déconstitutionnalisation de l’IVG, la vision libérale de l’IVG a gagné des partisans. Ils n’étaient ainsi que 40 % à soutenir le droit d’avorter librement en 2020 – contre 50 % aujourd’hui.

Cette révocation a aussi eu une résonance de l’autre côté de l’Atlantique, puisque le nombre de Français à soutenir la constitutionnalisation a augmenté de 5 % depuis juin dernier. François Kraus estime que « leur jugement n’est pas le fruit de l’émotion. Il est structurel et s’est même renforcé au fil des mois. »

Une évolution différente

Pourtant, en 1969, comme le rappelle l’étude de l’Ifop, les deux sociétés sont toutes les deux partagées sur cette question. 43 % des Français étaient alors favorables à la légalisation de l’avortement contre 40 % des Américains, selon une ancienne enquête de l’Ifop réalisée auprès de 1459 personnes. Mais en 50 ans, la société française s’est largement ouverte au libre recours à l’IVG. Ils étaient 25 % à souhaiter autoriser l’interruption de grossesse que dans certains cas limités et précis en 1974. Ils ne sont que 13 % aujourd’hui.

« La France a évolué au milieu des années 1970 avec le débat autour de la loi Veil et le procès de Bobigny (le procès pour avortement de 5 jeunes femmes) », analyse François Kraus pour le HuffPost. Mais le facteur déterminant de cet écart reste la religion : « Au fil des années, l’accès à l’avortement a été massivement accepté grâce à la sécularisation des Français. La France est un pays où l’influence de la religion sur les comportements conjugaux des gens est la plus faible. »

« Aux États-Unis, il y a une période similaire après l’arrêt Roe v. Wade en 1973. Mais cette révolution sociétale a suscité une contre-révolution incarnée politiquement par les années Reagan. Les Églises, les milieux conservateurs et les médias ont mené un combat idéologique et culturel qui a abouti à la révocation de l’arrêt. »

Les Américains moins féministes

D’une manière la générale, la France est beaucoup plus progressiste concernant les enjeux liés aux femmes, au genre et à la sexualité. 45 % des Américains condamnent moralement l’avortement contre seulement 15 % des Français.

Ils sont aussi nombreux à condamner les relations sexuelles entre adolescents (55 %), le changement de sexe (54 %) et les relations gays et lesbiennes (39 %) alors que les Français sont moins nombreux : respectivement 35 %, 38 % et 19 %.

« Ces clivages tirent une part de leur explication dans le rejet plus fort dont fait l’objet le féminisme dans le pays de l’Oncle Sam », explique François Kraus. « Aux États-Unis, la société est très polarisée », ajoute-t-il au téléphone. « Il y a des personnes qui sont à la pointe de certains sujets, plus qu’en France, mais d’autres y sont extrêmement opposés. »

En effet, si seulement un Américain sur deux (52 %) s’affirme « féministe »contre les deux tiers des Français (67 %) – ils sont plus nombreux à se dire « très féministes » (19 % contre 16 %). Mais près d’un quart la population américaine se dit « pas du tout féministe » (23 %) contre seulement 11 % des Français.

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