Carburants : pourquoi le retour à la normale n’est pas pour demain – Les Échos

Publié le 21 oct. 2022 à 17:20Mis à jour le 21 oct. 2022 à 17:57

Les départs en vacances de la Toussaint des Français sont saufs, mais le retour à la normale dans la distribution de carburant prendra encore un certain temps. De l’avis des professionnels, qui croulent sous les commandes des 10.500 stations-service de l’hexagone dont 5.100 gérées par la grande distribution, la remise en route des circuits de gazole et d’essence n’est pas une mince affaire .

Vendredi, le ministère de la transition écologique s’est pourtant voulu rassurant, en soulignant quelques initiatives. « Les stations-service sur les autoroutes et les routes nationales les plus fréquentées dans le cadre des départs en vacances seront desservies en priorité », comme les contrats des stations sur autoroute le stipulent par construction. Ailleurs, « des camions-citernes du service opérationnel de l’énergie du ministère des Armées seront mobilisés pour soulager les systèmes logistiques dans les zones les plus tendues », promet le ministère, sans s’avancer sur le nombre de divisions mobilisables. Enfin pour éviter la panne sèche sur de longs trajets, l’Etat a demandé aux préfets de mettre fin aux rationnements dans les stations-service (30 litres par voiture maximum), qu’il a lui-même préconisé.

Temps de conduite allongés

Pour compléter le ravitaillement accéléré du pays, alors que plusieurs préavis de grève dans les raffineries ou dépôts ont été récemment levés , le ministère des transports a pris jeudi deux arrêtés : l’un pour lever une nouvelle fois les restrictions de circulation des camions-citernes le week-end, et l’autre pour autoriser des dérogations temporaires aux règles sur les temps de conduite des chauffeurs, jusqu’au 23 octobre.

Pour autant, la machine ne peut redémarrer en un clin d’oeil. En matière de camions-citernes, « il n’y a pas un véhicule qui ne circule pas, la totalité des capacités de transport disponibles, véhicules ou chauffeurs, est optimale », décrit Jean-Marc Rivera, délégué général de l’OTRE (Organisation des transporteurs routiers européens). Mais beaucoup d’obstacles existent, comme aller piocher dans les stocks stratégiques de l’Etat, ce qui suppose un allongement des temps de parcours. Ou bien faire la queue de longues heures dans le parc des 200 dépôts ouverts. Les chauffeurs font ainsi des journées beaucoup plus longues que d’ordinaire, mais ont du mal à honorer pour autant toutes les commandes quotidiennes.

Habilitations professionnelles

« Nous sommes dans une partie ascendante, mais la situation n’est pas rendue à la normale , il faut laisser du temps au temps », résume Jean-Marc Rivera. Plusieurs raisons à cela : d’abord, les chauffeurs d’hydrocarbures disposent d’habilitations et formations très spécifiques (ADR), comme pour les produits chimiques, et ne peuvent donc être suppléés par d’autres collègues au pied levé, même quand la demande explose et qu’il faut effectuer plus de tournées qu’à l’habitude.

Ensuite, les entreprises de transport, souvent des PME ou ETI (comme Premat, le groupe Mertz ou Charles André au niveau supérieur) ont parfois un rayon d’action régional, guère plus. « Certains ne comptent que 5 ou 10 véhicules », selon un expert. Si un tracteur routier peut tout tirer sur la route (citerne de gazole, de lait ou encore une benne de granulats ou de betteraves), les citernes tractées aptes aux hydrocarbures sont par définition limitées chez ces PME multicartes.

Des oléoducs en renfort

De plus, au moment où tous les clients sont demandeurs, et alors que leurs services expédition croulent sous les appels, les transporteurs sont contraints d’établir des listes de priorité, en plaçant en haut les clients abonnés aux contrats annuels, et faisant passer ensuite les acheteurs « spot », par définition moins fidèles.

Par chance, la France dispose d’un réseau de plusieurs pipelines, qui raccourcissent nettement les distances routières entre les raffineries et les bassins consommateurs de carburants (Haute-Normandie-Région Parisienne, le Grand Lyon vers les alentours de Genève, ou Fos-sur Mer vers toute la région Paca). Mais il faut néanmois une noria de camions à l’arrivée, pour livrer les distributeurs finals.

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