Canicules, famines, villes englouties… Pourquoi le prochain rapport du Giec est aussi alarmiste – Edition du s – Ouest-France

Par Léo ROUSSEL

Un résumé du projet du rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) a été dévoilé ce mercredi 23 juin. Le texte alerte sur les catastrophes naturelles à venir et sur l’impact cataclysmique que pourrait avoir un réchauffement supérieur à 1,5°C au cours des cinquante prochaines années.

Le précédent rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) était déjà bien loin d’être optimiste, celui qui est attendu pour 2022 devrait l’être encore moins. C’est du moins ce qu’indique un résumé du rapport du groupe de travail II, qui évalue les impacts, l’adaptation et la vulnérabilité au changement climatique, qui a été diffusé pour examen par les gouvernements et les experts du 4 décembre 2020 au 29 janvier 2021. L’Agence France-Presse (AFP) est parvenue à se le procurer et en a publié les grandes lignes.

Si les climatologues que nous avons contactés se refusent pour l’heure à tout commentaire sur la version diffusée, préférant attendre la publication relue et corrigée, attendue pour le premier semestre 2022, tout laisse à croire que le rapport devrait être encore plus pessimiste qu’il ne l’était il y a sept ans. Explications.

Un rapport déjà alarmiste en 2014

Pour rappel, le Giec a été créé en 1988 par deux institutions, l’Organisation météorologique mondiale (OMM) et le programme Environnement de l’Onu (Unep), pour évaluer et mettre à jour les données et les connaissances sur le changement climatique.

En 2014, son cinquième rapport fixait déjà l’objectif de limiter le réchauffement climatique à 2 °C, par rapport au niveau préindustriel. « Nous ne sommes pas préparés aux risques liés au changement climatique », estimait alors Vicente Barros, co-président du groupe de scientifiques auteurs du rapport. Parmi les conséquences du réchauffement climatique : une augmentation des pénuries d’eaux, des problèmes plus importants à cause de canicules plus fréquentes, des déplacements de population…

Des conséquences déjà importantes et dramatiques pour l’humanité, qui ont motivé la naissance de certaines réflexions et mesures pour limiter le réchauffement : Accord de Paris en 2015, Convention Citoyenne pour le climat…

Par ailleurs, un manque de mesures a pu être constaté par les gouvernements, pour respecter les engagements pris. Une inaction attaquée en France en justice par des organisations non gouvernementales (ONG) via « L’affaire du siècle », puis condamnée. Récemment, cinq ministres qui ont été poursuivis pour « abstention de combattre un sinistre ».

Le rapport complet du Giec ne sera rendu public qu’en 2022. (Photo d’illustration : Jonathan Nackstrand / archives Ouest-France)
Gâvres (Morbihan) est une commune menacée par le risque de submersion avec la montée des eaux due au réchauffement climatique. (Photo d’archives : Thierry Creux / Ouest-France)

Un gain supérieur à 1,5 °C aurait « des impacts irréversibles »

Cette fois, dans le document qu’a pu se procurer l’AFP, les scientifiques du Giec sont encore plus clairs : il faut à tout prix empêcher le réchauffement climatique. Une hausse supérieure à 1,5°C aurait des « impacts irréversibles pour les systèmes humains et écologiques ».

« Le pire est à venir, martèle le Giec, avec des implications sur la vie de nos enfants et nos petits-enfants bien plus que sur la nôtre. » En 2020, le climatologue Jean Jouzel expliquait déjà dans Ouest-France l’importance d’une limitation de ce réchauffement climatique, notamment en limitant au maximum les émissions de gaz à effet de serre. Il préconisait déjà la limitation à 1,5 °C.

« Limiter le réchauffement climatique à 2 °C serait raisonnable, même si 1,5 °C serait encore mieux, expliquait-il dans une interview après le premier confinement. Il faudrait diminuer nos émissions de près de 40 % entre aujourd’hui (2020) et 2030. Et atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. » Une urgence « au caractère mondial » et aux « conséquences environnementales ».

Des villes côtières englouties, des canicules extrêmes ?

Selon l’AFP, les scientifiques du Giec alertent sur les nombreuses catastrophes qui pourraient découler d’un réchauffement de plus d’1,5 °C. Parmi celles-ci, la possibilité de voir certaines villes côtières se faire engloutir. Elles sont menacées par une augmentation des vagues-submersion, causée par la hausse du niveau de la mer.

Par ailleurs, des canicules « extrêmes », qui exposeront 420 millions de personnes supplémentaires, sont aussi redoutées par les experts avec une augmentation du climat de 2 °C. D’ici 2050, ce sont 80 millions d’êtres humains en plus qui seront menacés de faim.

Les périodes de canicule devraient être plus fréquentes et toucher davantage de personnes sur Terre. (Photo d’archives : Kenzo Tribouillard / AFP)

Aucune raison d’optimisme ?

Si le prochain rapport ne devrait pas être très optimiste, son co-auteur, le directeur du CNRS et climatologue Christophe Cassou, de passage à Lorient, assurait début juin à Ouest-France que non, « tout n’est pas perdu ». Pour lui, « il est encore possible de le limiter le réchauffement […] si on prend des actions immédiates, fortes, continues et cohérentes, et cela à l’échelle mondiale. Le niveau d’engagement de la prochaine décennie conditionnera le niveau de réchauffement après 2050. »

La sécheresse et les pénuries d’eau seraient également plus fréquentes en cas d’un réchauffement climatique supérieur à 1,5°C. (Photo d’archives : Arindam Dey / AFP)

Dans un communiqué, le Giec a, de son côté, rappelé que ses scientifiques ne commenteraient pas le travail tant que ce dernier ne sera pas fini, et qu’il devait encore franchir plusieurs étapes de relectures et de modifications. « Comme dans la pratique normale de l’examen par les pairs, ce processus vise à garantir que le rapport est aussi précis, complet et objectif que possible », précise le communiqué.

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