Candidate à la tête de l’Arcep, Laure de La Raudière livre ses premières priorités

Candidate à la tête de l'Arcep, Laure de La Raudière livre ses premières priorités

Laure de la Raudière n’a pas manqué son premier rendez-vous. Auditionnée ce mercredi par ses anciens collègues députés de la Commission des Affaires économiques, la candidate de l’Elysée à la présidence de l’Arcep a brossé le tableau de ce qui devraient être ses futures priorités à la tête du gendarme des télécoms. Engagée dans la course à la succession de Sébastien Soriano, la députée d’Eure-et-Loir doit voir sa candidature adoptée en commission par les deux chambres avant de la voir définitivement validée et de prendre ses quartiers rue Gerty-Archimède.

Première étape à l’Assemblée nationale, où l’élue, reconnue pour son expertise dans le domaine du numérique, a répondu durant une heure aux questions de ses anciens collègues à l’occasion d’une audition fortement attendue par le secteur. Celle-ci n’a pas manqué son rendez-vous, en fixant sur le front des télécoms trois priorités pour son futur mandat, en cas de validation de sa candidature à la tête du régulateur. Un poste que la normalienne et ancienne diplômée de Telecom Paris juge « comme une continuité logique de sa carrière professionnelle », elle qui a officié au sein de la direction de France Telecom (devenu Orange), puis en qualité de cheffe d’entreprise, et enfin d’élue, durant de nombreuses années.

« C’est un challenge qui me motive énormément, je pense que c’est un poste passionnant et que je saurais parfaitement faire la différence entre le rôle politique de l’élu sur ces sujets et le rôle du régulateur neutre, s’appuyant sur des données scientifiques et dialoguant avec les élus par rapport aux attentes de nos concitoyens », estime l’ingénieure dans ce qui sera la seule réponse apportée aux critiques de Xavier Niel sur cette candidature. Sans nier l’expertise de l’élue, le patron de Free avait, rappelons-le, critiqué publiquement le passé de Laure de La Raudière au sein de France Telecom lors de l’annonce de sa candidature.

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Toujours plus de régulation par la donnée

Première priorité, pour la députée de centre-droit, l’aménagement du territoire. Pour elle, cet objectif « doit être poursuivi en veillant au respect des engagements des opérateurs dans le cadre du New Deal Mobile et du déploiement de la fibre dans les zones AMEL, les zones AMII et les RIP ». A l’instar des orientations adoptées par Sébastien Soriano, cette dernière entend bien donner une place spéciale à la régulation par la donnée, en donnant des outils aux consommateurs pour peser sur les choix des opérateurs.

Ce qui passera par une attention encore plus soutenue apportée aux cartes de couverture du territoire, dont le gendarme des télécoms s’est fait une spécialité au cours des dernières années. « L’Arcep devra poursuivre ces démarches de transparence vis-à-vis des consommateurs en complétant l’approche actuelle avec l’accès à une certaine prévision des déploiements fixes et mobiles, des mesures de qualité de service des réseaux mobiles plus fiables et conformes aux conditions de réception des utilisateurs et l’accès à des données d’éligibilité de la fibre fiabilisées par rapport à aujourd’hui », juge en effet Laure de La Raudière.

Pour elle, il faut aller encore plus loin dans la précision de ces cartes. « Tout le monde a intérêt à ce qu’on ait des données fiables sur les cartes de couverture. Il faut que ce soit en termes de qualité de couverture réelle pour les utilisateurs », a-t-elle estimé devant une représentation nationale en grande partie acquise à sa cause. « Quand vous appelez qualité bonne ou très bonne, qu’est-ce que cela veut dire concrètement ? Il y a une amélioration à faire en prenant en compte des données de remontées du terrain ». Et de s’engager pour multiplier encore davantage les relations avec des acteurs comme nPerf, Qosi ou des associations de consommateurs pour améliorer la remontée des informations du terrain.

Le chantier du marché Entreprise

Deuxième chantier, et pas des moindres : la stimulation d’une concurrence nouvelle sur le marché Entreprise. Un marché qui souffre depuis longtemps de la domination du duopole formé par Orange Business Services et SFR Business, les branches B to B des deux opérateurs. « J’aurais une attention particulière pour le marché Entreprise, faiblement concurrentiel aujourd’hui, ce qui conduit les PME à être aussi faiblement fibrées en France », promet en effet la candidate à la présidence de l’Arcep.

Celle-ci n’a pas exclu de faire évoluer la régulation de ce secteur, une fois passée une période d’observation destinée à évaluer les fruits de la politique menée jusque-là par l’Autorité. « L’Arcep a posé un cadre de régulation pour développer des offres avec qualité de service renforcée sur les réseaux FttH. J’apporterais avec le collège de l’Arcep une attention particulière sur ce marché pour voir si le cadre de régulation actuel assez récent commence à porter ses fruits, c’est parfois long, ou alors s’il faut le faire évoluer », explique Laure de La Raudière.

« La régulation est récente, il n’y a pas encore eu un effet “Wahou” sur le marché de cette régulation, et l’Arcep va veiller à voir ce qui s’y passe en 2021, d’autant que Kosc vient d’être racheté par Altitude et qu’il faudra attendre de voir comment se passera son intégration », indique cette dernière en référence au destin contrarié de l’opérateur de gros, dont la création avait été portée à bout de bras par l’Arcep pour apporter une concurrence nouvelle sur le marché Entreprise, dont les revenus globaux étaient chiffrés à 8,9 milliards d’euros par l’Autorité en 2018.

Pour Laure de La Raudière, l’heure est à la prudence sur ce dossier brûlant. D’autant qu’une concurrence nouvelle, incarnée par Bouygues Telecom et par Free, pourrait bien mettre son grain de sel sur ce marché. « On va voir si ça bénéficie au marché. Si ça ne bénéficie pas au marché, il faudra envisager un nouvel axe de régulation. On va également surveiller l’arrivée de Free sur le marché entreprises au début 2021, qui peut avoir un effet sur le marché. »

Accompagner l’extinction du cuivre

La candidate à la présidence de l’Arcep a également listé trois autres chantiers à venir pour le gendarme des télécoms. Tout d’abord, l’extinction du cuivre. « Les obligations liées au service universel qui s’appuyait sur le réseau cuivre ont vocation à s’arrêter et le cahier des charges du service universel n’a pas encore été adopté par le gouvernement. La situation actuelle est source de grandes tensions, il faut que ce sujet soit à l’ordre du jour des travaux de l’Arcep dès 2021 », a-t-elle expliqué devant les députés.

L’année qui se présente devra aussi conduire l’Arcep à accompagner l’adoption et le déploiement des réseaux 5G. « L’Arcep devra veiller au suivi des obligations et à préparer l’appel à candidatures sur la bande des 26 GHz, mais aussi lancer des appels à candidature 5G sur les territoires ultra-marins », indique cette dernière qui devrait être très pro-active sur le sujet de la dernière génération de technologie mobile, qu’elle a fortement défendu durant ses années à l’Assemblée nationale.

Enfin, la candidate à la tête de l’Autorité a également fait de l’empreinte environnementale du numérique l’un de ses cheval de bataille. Rappelant que « l’ensemble du secteur du numérique représente 2 % de l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre en France, et 6,7 % en 2040, et que les réseaux eux-mêmes ne représentent que 5 % du total », l’élue s’est engagée à ce « que l’Arcep regarde, au fil de tous ses chantiers de régulation, comment la régulation peut contribuer à l’objectif de développement durable tout en conservant des objectifs ambitieux d’aménagement du territoire, d’innovation et de développement de la filière ».

Prochaine étape de cette campagne déjà bien engagée le 20 janvier prochain, à l’occasion de la seconde audition de la candidate à la présidence de l’Arcep, qui se déroulera cette fois devant les sénateurs de la commission des Affaires économiques.

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