Cafouillages et déceptions devant les boîtes de nuit à cause du passe sanitaire – Le Monde

Réouverture de la boîte de nuit le Malvern à Arzon (Morbihan), le 9 juillet 2021.

Ils s’étaient mis sur leur 31 pour leur première soirée en boîte depuis mars 2020, certains avaient même réservé, mais des fêtards n’ont pas pu entrer en discothèque, vendredi 9 juillet dans la soirée, faute… de passe sanitaire valable, condition sine qua non pour accéder à ces établissements.

« Avant, on avait peur de se faire recaler en boîte. Maintenant, on a peur de se faire recaler à cause du passe sanitaire », dit François, 24 ans, devant la salle du Sacré, dans le 2arrondissement de Paris.

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C’est l’agitation à l’extérieur. Laurent, 48 ans, cadre dirigeant, est arrivé avant minuit pour être sûr d’avoir une place parmi les 300 personnes autorisées, la jauge étant fixée à 75 % de la capacité habituelle. « Ce soir, ça va être magique, assure-t-il. C’est comme si on était des ressorts coincés depuis longtemps, et là ça va lâcher. »

Mais son ami Lionel n’a pas son passe sanitaire et ne peut pas entrer. Le gouvernement a décidé qu’il fallait présenter une preuve de vaccination complète depuis au moins quatorze jours, un test PCR ou antigénique négatif de moins de quarante-huit heures, ou une preuve d’une contamination au Covid-19 entre six mois et quinze jours plus tôt.

« C’est nouveau pour nous »

En pratique, l’affaire est compliquée. Les agents de sécurité refusent les captures d’écran de test négatif, par peur de la falsification. En l’absence de QR code, ils demandent le mail du laboratoire avec le résultat… Trente minutes après l’ouverture, quelques dizaines de clients seulement ont pu entrer. « On ne sait pas combien de temps ça va prendre, c’est nouveau pour nous », assure Martin Munier, le gérant.

Pour résoudre le problème, alors que seulement 21 % des 18-29 ans – cible privilégiée des boîtes – sont complètement vaccinés, le Sacré a fait installer une tente dans la rue pour faire des tests en quinze minutes, en partenariat avec une pharmacie.

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Ces scènes se reproduisaient dans toute la France, devant les quelques discothèques qui ont effectivement rouvert – seulement 30 %, selon le ministre de la santé. Les autres, comme le Petit Palace ou Le Magnifique dans le même quartier que le Sacré, attendent encore un peu. Les plus petites ont souvent jugé inutile de rouvrir à moins de 100 %, ou préféraient conserver la totalité de leurs aides publiques.

Il faut dire que la réouverture, tant réclamée par la profession qui avait elle-même accepté le principe du passe sanitaire, tombe mal, alors que le très contagieux variant Delta est en passe de devenir majoritaire. Membre du conseil scientifique, l’épidémiologiste Arnaud Fontanet a redit, vendredi, le consensus médical sur les lieux clos et mal aérés : les discothèques sont « clairement un endroit à risque par rapport à l’émergence de ce variant ».

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« Je suis dégoûtée »

Au Mistral, boîte historique d’Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), « c’est uniquement sur réservation ce soir », dit le patron Jean-Simon Faby.

L’une des plus anciennes discothèques de Bordeaux, Le Monseigneur, dit ne pas avoir eu le droit d’installer une tente dehors ; alors les vigiles envoient les fêtards sans QR code… à la pharmacie de garde pour réclamer des tests antigéniques. « Ça va être l’enfer à gérer », dit le gérant, Sebastien Labeyrie, qui a cinq agents pour vérifier les smartphones. Souvent, le code ne déclenche pas de sésame, un homme ne comprend pas pourquoi alors qu’il a eu sa seconde dose il y a quatorze jours…

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Déjà, des rumeurs se répandent sur les discothèques qui seraient plus ou moins souples à l’entrée. A Toulouse, le Purple se classe parmi les plus strictes. « On va se fâcher, mais ils ne rentreront pas » sans passe, dit le directeur, Jean-Bernard Oggero, qu’on trouvait à faire les cent pas dehors avant l’ouverture. Il est également stressé par un éventuel nouveau tour de vis d’Emmanuel Macron – des mesures restrictives pourraient être annoncées lundi. « Toute cette attente, l’achat de stocks de boissons… Si on doit refermer, ça va mal passer », souffle-t-il.

L’inévitable arrive quelques minutes plus tard : Lou Busby, assistante dentaire de 24 ans, est refoulée du Purple. Elle et ses amies ont faux sur toute la ligne : sa seconde dose date de moins de quatorze jours, et ses trois amies ont fait leur test mercredi, donc pas dans la fenêtre des quarante-huit heures. « J’ai envie de pleurer, je suis dégoûtée, dit la jeune femme. On ira dans un bar, tant pis. 

Le Monde avec AFP

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