Blanquer : «Il y a chaque jour entre 20 et 30 incidents graves» à l’école – Le Parisien

Après le dramatique décès de Kewi Yikilmaz, 15 ans, aux Lilas (Seine-Saint-Denis), qui porte à trois le nombre de lycéens poignardés depuis la rentrée devant leur établissement et aux abords, Jean-Michel Blanquer avance ses pistes. Le ministre de l’Education nationale annonce dans une interview au Parisien – Aujourd’hui en France une plus grande transparence sur les faits de violence dans les établissements. Et promet d’envoyer dès lundi des inspecteurs à Sarcelles (Val-d’Oise), où un enseignant a reçu un coup de de poing le 30 septembre.

Le gouvernement va-t-il mettre des moyens concrets pour lutter contre la guerre des bandes aux Lilas, en Seine-Saint-Denis, qui a fait deux morts en un an ?

JEAN-MICHEL BLANQUER. C’est dramatique. Les réactions sur place ont été à la hauteur, à commencer par celle du professeur d’EPS (Education physique et sportive, NDLR) qui est intervenu avec énormément de courage. L’assassinat a fait l’objet d’arrestations immédiates. Je vais recevoir la famille de la victime. Le ministère de l’Intérieur a annoncé qu’il accentuait ses actions contre les bandes. Je veux rappeler que ce drame ne s’est pas produit dans un contexte lycéen, mais d’affrontement urbain.

Mais ces affrontements viennent percuter l’école. Rien qu’en Ile-de-France, depuis septembre, trois élèves ont été poignardés devant leurs camarades. L’école n’a-t-elle aucun rôle à jouer ?

Nous avons un rôle préventif à jouer, c’est évident. Mais je ne prétends pas résoudre du jour au lendemain des violences qui sont en réalité l’affaire de tous. Nous allons renforcer la présence policière dans les zones qui le nécessitent. Il existe 47 quartiers de reconquête républicaine. Le gouvernement a le projet d’en établir d’autres.

Aux Lilas, par exemple ?

Oui, c’est tout à fait imaginable.

Au lycée, les enseignants ont exercé leur droit de retrait, les élèves sont dehors et n’ont pas accès aux cellules de crise. Qu’allez-vous faire pour que l’établissement fonctionne à nouveau ?

Je comprends l’émotion des enseignants. Je veille à ce qu’ils aient droit à une protection maximale, avec une présence importante de la police. Mais il ne faut pas se tromper dans l’usage du droit de retrait. On a besoin de tous les adultes pour le retour à la normale en classe.

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A Sarcelles (Val-d’Oise), un professeur a été frappé à coups de poing par un élève parce qu’il lui demandait d’enlever sa casquette. L’Etat a-t-il abandonné des lycées ?

Pas un seul lycée ne doit se sentir en dehors de la République. Je vous l’annonce, à chaque fois qu’un établissement se trouve dans une situation comme celle de Sarcelles, j’enverrai l’inspection générale et les corps d’inspection de l’académie pour faire le point sur l’ensemble des enjeux de sécurité, et les raisons qui font que les personnels s’estiment abandonnés. Les inspecteurs seront à Sarcelles dès la semaine prochaine.

Quels sont les chiffres de la violence depuis la rentrée ?

Il y a chaque jour entre 20 et 30 incidents graves, à mettre en regard des 63 000 implantations scolaires de France. Depuis deux semaines, s’est produite une succession de faits, pas plus nombreux que d’habitude, mais d’une gravité exceptionnelle. Nous avons appliqué le plan violence pour y faire face. La justice a été très vite saisie.

Depuis des années, la violence scolaire ne fait plus l’objet de statistiques détaillées. Allez-vous enfin rendre à nouveau publiques les faits de violence, dans chaque territoire ?

Oui. Il faut que les pouvoirs publics puissent être transparents sur les enjeux de sécurité. J’ai décidé de faire un point national régulier sur ce sujet, chaque trimestre. Et je vous l’annonce, nous allons publier les chiffres de la violence scolaire département par département. Par ailleurs, chaque collège et lycée auront une évaluation de son climat scolaire présenté à son conseil d’administration. Le climat scolaire sera un des points de vigilance qui entrera en compte dans l’évaluation des établissements.

Les enseignants sont quelquefois confrontés dès le primaire à des enfants incontrôlables, comment allez-vous les aider ?

Il y a trois catégories d’enjeu derrière ce phénomène qui se développe : le médical, le social, l’éducatif. On doit progresser dans ces trois directions, par exemple le développement de 80 cités éducatives va permettre de consacrer des moyens supplémentaires aux facteurs sociaux de la réussite scolaire.

Quel suivi ensuite pour les élèves violents ?

On considère qu’environ 1 500 élèves par an manifestent un comportement d’une violence très grave, dans le secondaire. Je vais demander aux directeurs académiques de s’assurer qu’un enfant qui manifeste très tôt des signes de violence sera suivi avec des réponses médicales, sociales et éducatives.

Le placement d’office des élèves violents dans des dispositifs relais, annoncé dans le cadre du plan violence, a-t-il été appliqué depuis septembre ?

Il commence à se mettre en place. A Sarcelles, il va sans dire que les élèves concernés ne reviendront pas dans ce lycée. Ils sont définitivement exclus et feront l’objet d’un suivi éducatif.

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