Aux Antilles, les parties civiles dénoncent une instruction « bâclée » après le non-lieu prononcé par la justice dans le scandale du chlordécone – Le Monde

Une manifestante brandit un panneau dénonçant les ravages du pesticide chlordécone, à Fort-de-France, à la Martinique, le 27 février 2021.

D’aucuns, aux Antilles, redoutaient ce dénouement. La justice a rendu, lundi 2 janvier, une décision de non-lieu définitif dans le dossier pénal du chlordécone, clôturant dix-sept années de procédure. Sans surprise, les deux juges d’instruction du pôle santé publique du tribunal judiciaire de Paris ont suivi les réquisitions du parquet, rendues le 24 novembre 2022, dans cette affaire de contamination de milliers d’hectares de terres agricoles par cet insecticide à forte toxicité, qui avait été abondamment épandu dans les plantations bananières de la Guadeloupe et de la Martinique entre 1972 et 1993.

Depuis deux ans, les associations qui avaient déposé plainte en février 2006 pour « empoisonnement », « mise en danger de la vie d’autrui », « administration de substance nuisible » et « tromperie sur les risques inhérents à l’utilisation des marchandises » ont connu plusieurs déconvenues qui semblaient rendre cette issue toujours plus inéluctable. En effet, dès janvier 2021, les juges d’instruction informaient les plaignants d’une possible prescription du dossier. Puis, en mars 2022, les deux magistrates notifiaient les parties civiles de la fin de leurs investigations, sans mises en examen.

Aucun des quatre avocats des parties civiles, contactés par Le Monde, n’avait encore reçu l’ordonnance de non-lieu le 5 janvier, date à laquelle la décision des juges était révélée par l’Agence France-Presse. Dans ce document de plus de 300 pages, souligne l’AFP, les deux juges reconnaissent un « scandale sanitaire », sous la forme d’« une atteinte environnementale dont les conséquences humaines, économiques et sociales affectent et affecteront pour de longues années la vie quotidienne des habitants » de la Martinique et de la Guadeloupe.

Lire aussi Scandale sanitaire aux Antilles : qu’est-ce que le chlordécone ?

« Déni de justice »

Les magistrates prononcent néanmoins un non-lieu, évoquant la difficulté de « rapporter la preuve pénale des faits dénoncés », et soulignant également « l’état des connaissances techniques ou scientifiques » au moment où les faits ont été commis. Autant de facteurs qui concourent à l’impossibilité de « caractériser une infraction pénale ».

« Ce n’est pas une déception. On s’y attendait », admet Christophe Lèguevaques, avocat de plusieurs parties civiles, dont l’association Vivre en Guadeloupe. Après l’annonce des réquisitions de non-lieu, Me Lèguevaques avait, le 22 décembre, adressé au tribunal un mémoire de 239 pages dans lequel il présentait notamment « de nouveaux arguments » contre la prescription. « Ce qui est surprenant, c’est qu’en même pas dix jours ils aient eu le temps d’assimiler tous ces arguments et d’y répondre », ironise cet avocat au barreau de Paris.

Il vous reste 49.24% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Leave a Reply

Discover more from Ultimatepocket

Subscribe now to keep reading and get access to the full archive.

Continue reading