Au procès du 13 Novembre, Abdeslam justifie les attentats par l’intervention militaire française contre Daech – Le Parisien

Cette fois, le président avait décidé de procéder à rebours de l’ordre alphabétique. Salah Abdeslam s’est donc levé en dernier pour ce premier tour de parole octroyé ce mercredi 15 septembre matin par la Cour d’assises spéciale de Paris aux 14 accusés qui comparaissent dans le procès des attentats du 13 Novembre. L’occasion pour eux de livrer leur point de vue sur les lourdes charges dont ils font l’objet.

Avant lui, plusieurs de ses coaccusés avaient fait part de leur compassion envers les victimes, de leur condamnation des actes commis, de leur ignorance des projets en cours ou bien même, comme Yassine Atar, plaidé leur innocence. Certains, comme Abdellah Chouaa, Ali Oulkadi ou Farid Kharkhach, n’avaient pu cacher leur émotion. Son voisin et meilleur ami Mohamed Abrini avait fait le service minimum, reconnaissant une participation « infime » aux attentats.

Mais c’est naturellement envers le seul membre des commandos encore en vie, quasi mutique pendant l’instruction, que l’attente était la plus grande. D’une voix incroyablement calme, réfléchie, Salah Abdeslam a alors assumé, revendiqué et même tenté de justifier sa participation à ce carnage qui a fait 130 morts et plus de 800 blessés le soir du 13 novembre 2015 à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) et à Paris.

« On a voulu que la France subisse la même douleur que nous subissons »

« Bonjour à tous. Par où commencer ? » lance l’accusé, vêtu d’un chandail gris. Le natif de Bruxelles décide de s’appuyer sur les propos tenus la veille par sa compatriote Isabelle Panou, la juge d’instruction belge, qui a longuement témoigné devant la cour. « Elle a parlé de terroriste, de djihadiste et de radical. Mais tous ces termes-là créent de la confusion. Il ne s’agit que l’islam authentique. Et ces radicaux, ce sont des musulmans », développe Salah Abdeslam, dont les premières prises de parole avaient déjà montré qu’il n’avait pas rompu avec son ancrage dans la radicalité.

Mais cette fois, celui qui fête en ce mercredi son 32e anniversaire va plus loin et se lance dans un plaidoyer pro domo pour cette campagne de terreur ciblée. Mardi, un avocat des parties civiles avait demandé à la juge Panou pourquoi la France avait été visée. « Elle n’a pas donné une réponse convaincante », ironise Salah Abdeslam. « On a combattu la France, on a attaqué la France, on a visé la population, les civils mais, en réalité, on n’avait rien de personnel à leur égard », clame l’accusé.

Et l’ancien petit délinquant de Molenbeek de reprendre à son compte la propagande de l’organisation État islamique, dont, dès le premier jour d’audience, il s’était réclamé, disant en être « un combattant ». « On a visé la France et rien d’autre, se rengorge-t-il derrière son masque noir. Parce que les bombes des avions français qui bombardent l’État islamique ne font pas la distinction entre les hommes, les femmes et les enfants. On a voulu que la France subisse la même douleur que nous subissons. »

« Je sais que certains de mes propos peuvent choquer, surtout les âmes sensibles »

Le soldat de Daech poursuit avec un parallèle nauséeux et absurde entre François Hollande et Jacques Chirac, le premier ayant dû savoir que « des Français allaient rencontrer la mort » lorsqu’il s’est engagé au sein de la coalition contre l’EI en Irak et en Syrie quand le second aurait refusé de participer à la guerre en Irak pour épargner sa population.

Sa voix ne trahit aucune émotion. Le geste de son bras trahit même sa volonté de convaincre son auditoire. Sa morgue est glaçante lorsqu’il s’adresse aux parties civiles, nombreuses dans la salle. « Je sais que certains de mes propos peuvent choquer, surtout les âmes sensibles. Mon but n’est pas d’enfoncer le couteau dans la plaie mais d’être sincère envers tous ces gens qui subissent une douleur incommensurable », ose-t-il. Salah Abdeslam jure qu’il n’est pas un provocateur. C’est juste : c’est un soldat encore en guerre.

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