
Au procès de l’accident ferroviaire de Brétigny-sur-Orge, le procureur demande le maximum prévu par la loi contre la SNCF – Le Monde

Il est presque 17 heures lorsque Rodolphe Juy-Birmann, procureur de la République d’Evry, se tourne vers les parties civiles, pour les prévenir : « La peine prononcée (…) vous paraîtra dérisoire au regard de votre souffrance », explique-t-il aux victimes et aux proches des sept morts, neuf blessés graves et centaines de blessés des suites du déraillement, le 12 juillet 2013, du train Intercités numéro 3657, en gare de Brétigny-sur-Orge (Essonne).
« Aucune peine ne ramènera personne à la vie », regrette-t-il, avant de requérir le maximum légal à l’encontre de la SNCF – responsable légale de la filiale SNCF Infra, alors chargée de la maintenance des voies – dont il vient d’accabler méthodiquement la « désorganisation » ayant conduit à un « échec dans la chaîne de maintenance », mais aussi l’attitude de « mépris à l’égard de la justice » : 450 000 euros d’amende. Une peine qui nécessite que le tribunal reconnaisse que la société ferroviaire était en état de récidive légale.
« Comment en est-on arrivé là ? », a demandé le procureur à plusieurs reprises, alors qu’il déroulait, durant quatre heures, les multiples « carences » de la compagnie qui, par « négligence évidente », n’a pas détecté à temps la fissure dans le « cœur », le dispositif qui permettant le croisement de rails. Un cœur qui n’a « jamais été examiné », estime-t-il, balayant la défense de la compagnie – pour qui la catastrophe est due à un défaut indétectable dans l’acier composant l’éclisse qui a cédé le 12 juillet. L’usure, argumente-t-il sur la foi des expertises, « n’est pas survenue en un jour, on voit bien la lente dégradation de l’assemblage ». Pour lui, « la seule explication tient dans les défaillances dans la réalisation de la maintenance », en partie due à l’organisation de la SNCF en diverses filiales à la recherche d’une réduction des coûts, quitte à négliger les inspections et l’entretien.
« Défaillance de la chaîne hiérarchique »
Reprenant méthodiquement les comptes rendus des diverses inspections et leurs carences, Rodolphe Juy-Birmann fustige la « défaillance de la chaîne hiérarchique totalement anesthésiée » de la compagnie, qui « ne se remet pas en cause ». Il évoque aussi la « lente dégradation » des conditions de travail des cheminots, dont le métier est « impacté par les objectifs de rentabilité qui leur étaient imposés », les poussant à ne pas démonter le dispositif pour l’inspecter, comme le prévoit pourtant le protocole, afin de « rendre la voie à la circulation plus rapidement ». Plus qu’un manque de personnel, le procureur pointe une « inadéquation entre les besoins humains et les besoins de maintenance », les conduisant à mal mener les inspections des matériels. « On dérape car d’autres urgences prennent le pas », justifie-t-il.
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