Au nom de la vengeance : la télénovela de l’année

Si, pour une obscure raison, vous êtes passé à côté de la série « Au nom de la vengeance », arrêtez immédiatement ce que vous êtes en train de faire, quittez le bureau, rentrez chez vous et branchez-vous sur Netflix. On vous pardonnera un petit délai avant de vous mettre en mouvement, mais uniquement pour finir de lire cette chronique.

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Cinq Juanas

Bienvenue au Mexique ! De manière totalement fortuite, cinq jeunes femmes se retrouvent dans le même hôtel de luxe à Cancún. Surprise : elles s’appellent toutes Juana et découvrent qu’elles ont un lien de parenté. Elles connaissent toutes leurs mères, elles en concluent qu’elles ont le même père biologique, conclusion confortée par la présence d’une tâche de naissance en forme de poisson.

Les voilà parties pour dénouer les fils du mystère de leur filiation. Elles découvrent très rapidement qui est leur père : une personnalité politique, proche du Président mexicain. Elles ont le début — leur géniteur — elles ont la fin de l’histoire — leur rencontre totalement accidentelle — ils leur manquent le milieu, à savoir comment et pourquoi. Évidemment, nous sommes dans une télénovela, il y a donc des complots, des meurtres, du sang, de l’amour, du sexe, un peu d’inceste qui se révélera ne pas être de l’inceste,du trafic d’êtres humains, des tueurs à gages et un hacker.

Contrairement à Mister Robot, il est beau, il est attachant, il fait des trucs parfaitement improbables sur le plan technique et c’est grâce à lui qu’on arrive à une conclusion heureuse pour les Juanas. Les puristes de la sécurité informatique tomberont dans les pommes en voyant les raccourcis scénaristiques utilisés pour le hacker de la série, mais fondamentalement, ce n’est pas important. Par ailleurs, il y a un policier qui a accès à différents fichiers ainsi qu’une journaliste, qui a ses propres sources d’information.

Partant de là, qui se soucie réellement de savoir si notre hacker obtient un 10/10 sur l’échelle technique de Mister Robot ?

Rythme endiablé

Le principe d’une télénovela réussie est que le rythme doit être rapide, car le cœur de l’intrigue est généralement vite balayé. En un épisode, on a les personnages principaux, leurs histoires, leurs motivations. Pour les Juanas, dès le premier épisode, on comprend que les cinq femmes ont un lien de parenté et qu’elles vont partir à la découverte de leurs origines. Toute la question était de savoir comment retenir le spectateur sur 18 épisodes. Qu’on se rassure : on les enchaîne sans s’en rendre compte, la première saison pouvant être visionnée en un week-end.

Les scénaristes ont été suffisamment intelligents pour prendre en compte les cinq femmes dans leur intégralité, à parts égales, avec leur passif. Pourtant, elles sont chacune un miroir opposé des autres. Manuela est une strip-teaseuse, Valentina une journaliste rationnelle, Charité est novice et aspire à devenir bonne sœur, Mathilde est une chanteuse un peu étourdie et Bautista, une médium. Il n’y a que dans les télénovelas qu’une novice et une strip-teaseuse bisexuelle peuvent s’entendre sans se taper dessus, tout comme une journaliste très rationnelle et une médium.

C’était d’autant plus improbable que la série a réussi à éviter un biais assez agaçant. En général, dans ce type d’intrigues, les héros laissent tout tomber pour résoudre le mystère qui les occupe : le travail, la famille, les amis, les amours. Dans cette série, elles continuent toutes à mener plus ou moins leur vie et essaient de dénouer le mystère autour de leurs origines, en parallèle. Évidemment, l’occasion fait le larron, les difficultés auxquelles elles sont confrontées dans leur vie quotidienne ont un lien avec leurs origines.

Clichés ou réalité ?

Leur père est un politicien en vue et un peu véreux, ce point est dévoilé dès les premières minutes du premier épisode. La corruption du personnel politique figure en bonne place dans la série, au point où l’on s’interroge. Faut-il y voir une volonté de caricaturer le Mexique ?

Malheureusement, si on se plonge dans les rapports, articles de journaux ou même billets de blog, on constate que les scènes de la série sont presque en deçà de la réalité. Il ne faut pas forcément y voir une critique politique ou un message spécifique, mais une œuvre de divertissement, qui s’insère dans une réalité qui n’est pas glorieuse et dont le pays n’arrive pas à se défaire.

De la même manière, le trafic d’êtres humains est une autre réalité, qu’on ne peut pas minorer. En 2018, un réseau de traite des femmes a été démantelé à Mexico et il est communément admis que le trafic d’êtres humains est largement facilité dans les pays où la corruption est endémique. Ce point est intelligemment souligné dans la série, sans pour autant tomber dans le voyeurisme ni dans la caricature.

Faut-il voir « Au nom de la vengeance » ? Oui. C’est la garantie de passer un très bon moment, d’entrer dans une histoire haletante, bizarrement reposante. Sans vouloir gâcher l’intrigue, si on se base sur les dernières minutes du dernier épisode, il est assez évident qu’une saison 2 va faire son apparition sur Netflix. Suivez les Juanas dans leurs péripéties, vous ne serez absolument pas déçu.

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